La coalition présidentielle (Ensemble) va désigner, mercredi 22 juin, son candidat au perchoir. Yaël Braun-Pivet, Roland Lescure, Barbara Pompili, Joël Giraud, Sophie Errante et Éric Woerth sont candidats. Les groupes d'opposition devraient aussi avoir leurs prétendants, mais sans presque aucune chance de l'emporter. L'élection aura lieu mardi 28 juin.
Qui succédera à Richard Ferrand ? Rôle aussi honorifique qu'essentiel au bon fonctionnement du pouvoir législatif, le président de l'Assemblée nationale sera désigné par ses pairs mardi 28 juin. En plus de présider les séances et la conférence des présidents – l'organe qui fixe l'ordre du jour avec le gouvernement –, le quatrième personnage de l'État peut saisir le Conseil constitutionnel sur un texte de loi et procède à des nominations stratégiques. Mathématiquement, et malgré la perte de la majorité absolue, les députés Ensemble devraient faire élire l'un des leurs au perchoir, là où siège le président de l'Assemblée.
Six candidats sont sur la ligne de départ de la primaire interne organisée par la coalition présidentielle : Yaël Braun-Pivet, Joël Giraud, Barbara Pompili, Roland Lescure, Sophie Errante et Éric Woerth. Au sein d'Ensemble, seuls les députés étiquetés La République en marche - la principale force de la coalition présidentielle - peuvent candidater à cette primaire organisée mercredi 22 juin. Les élus du MoDem et d'Horizons pourront participer au choix en votant pour leur candidat préféré.
Le jour du vote dans l'hémicycle, les autres groupes d'opposition pourront aussi proposer leur candidat, à l'instar d'Annie Genevard pour Les Républicains, qui s'est déjà déclarée dans les colonnes du Figaro. Mais leurs chances de l'emporter, sauf coup de théâtre, seront quasi nulles (voir encadré ci-dessous).
La situation n'est pas banale : actuellement ministre de l'Outre-mer, Yaël Braun-Pivet est membre du gouvernement depuis un peu plus d'un mois. Largement réélue députée dans les Yvelines, la ministre est désormais candidate pour prendre les rênes d'une institution dont elle connaît bien les rouages, pour avoir été pendant cinq ans présidente de la prestigieuse et laborieuse commission des lois. A la fin de son mandat précédent, elle avait publié un manifeste pour un Parlement davantage maître de son temps, afin de rééquilibrer les pouvoirs au détriment de l'exécutif. En 2018, elle avait déjà montré son intérêt pour le perchoir, avant de retirer sa candidature face à Richard Ferrand, soutenu par le sommet de l'État.
Candidate à la présidence de l'Assemblée nationale, @YaelBRAUNPIVET
— LCP (@LCP) June 22, 2022
estime avoir prouvé qu'elle savait "tenir la barque dans la tempête". "J'ai également montré que j'étais capable de construire des ponts avec chacun. [...] Ma candidature est celle de l'apaisement."#DirectAN pic.twitter.com/Bup4VoNG1V
"Le compromis, ça me parle !" À 62 ans et vingt ans de mandat au compteur, Joël Giraud trouve que la nouvelle donne politique à l'Assemblée nationale est un "beau défi". La pente ne semble pas trop raide pour cet ancien secrétaire d'État à la Ruralité et député montagnard (Hautes-Alpes), qui met en avant son expérience à des postes-clés : "Quand j'étais rapporteur général du budget [NDLR : 2017 à 2020], j'ai su travailler avec l'ensemble des forces politiques du Parlement en gardant un équilibre et une loyauté", explique-t-il à LCP. Membre du Parti radical, Joël Giraud a aussi fait valoir sa sensibilité politique dans un tweet :
L’Assemblée nationale se trouve dans une situation politique inédite. Pour faire avancer le pays ensemble, elle devra être représentée par une Présidence équilibrée, expérimentée et de confiance. Le Parti radical, témoin de 120ans d’histoire, peut être le garant de cette balance.
— Joël Giraud (@JoelGiraud05) June 21, 2022
Deuxième tentative pour se hisser au sommet de l'Assemblée nationale pour Barbara Pompili. Candidate malheureuse contre Richard Ferrand en 2018, l'ancienne ministre de la Transition écologique d'Emmanuel Macron va tenter d'être la première femme élue à ce poste prestigieux et a des arguments pour : "Je connais très bien la maison, je fais partie des personnes qui peuvent aider et apporter leur pierre à ce poste", souligne-t-elle. Élue pour la troisième fois députée, elle a présidé la commission du développement durable où elle assure avoir su négocier et "trouver des compromis", une qualité essentielle dans une législature sans majorité claire.
Contrairement à la plupart de ses concurrents, Roland Lescure n'a pas de passé politique avant La République en marche. Soutien fidèle du chef de l'Etats, celui qui fut président de la commission des affaires économiques pendant cinq ans ambitionne désormais de présider l'Assemblée nationale. Et pense lui aussi être prêt à naviguer dans ce nouveau monde politique : "J'ai vécu dix ans au Canada. Des gouvernements minoritaires, ça existe et ça fonctionne. Ce qui est vrai, c'est que ce n'est pas l'habitude de la France. Il va falloir qu'on apprenne à faire ça", s'est-il projeté au micro d'Europe 1.
"Je pense que dans le dernier quinquennat j'ai montré ma capacité d'autorité et de leadership pour travailler avec les composantes de la majorité présidentielle, et au-delà", fait valoir @RolandLescure, lui aussi candidat de la majorité au perchoir.#DirectAN #Législatives2022 pic.twitter.com/7KAGNdwAMo
— LCP (@LCP) June 22, 2022
Sophie Errante entame son troisième mandat dans la 10e circonscription de Loire-Atlantique où elle a été élue pour la première fois en 2012. Une expérience qui peut compter pour prétendre accéder au perchoir, d'autant que la députée a déjà été candidate à la présidence de l'Assemblée en 2017, voulant à l'époque "faire entendre la voix d'une femme". Ancienne maire de la Chapelle-Heulin et présidente de la caisse des dépôts, cette ex-membre du Parti socialiste est aussi une macroniste de la première heure.
Rallié à Emmanuel Macron en février, l'ancien ministre du Budget de Nicolas Sarkozy vise lui aussi la plus haute fonction du Palais-Bourbon. Éric Woerth entame son cinquième mandat à l'Assemblée nationale. Après avoir présidé la commission des finances sous la précédente législature, qu'il occupait au titre de son appartenance au principal groupe d'opposition, il veut "tout faire pour que les institutions de notre République ne soient pas bloquées". Dans un entretien au Parisien, il assure que son profil n'est pas moins consensuel qu'un autre : "Par les temps qui courent, les profils consensuels n’existent pas ! À la présidence de la Commission des finances, je ne braquais pas grand monde… Bien sûr, qu’il y a chez LR des personnes qui me tournent le dos. Qu’elles restent le dos tourné."
"Ce qui compte c'est qu'il y ait des responsables solides, sérieux à la tête des différentes instances de l'Assemblée nationale, il faut absolument éviter un blocage", déclare @ericwoerth, qui, candidat à la présidence de l'Assemblée, fait valoir son "expérience". #DirectAN pic.twitter.com/RF7BOWnKXS
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Le perchoir, mode d'emploi
L'élection du président de l'Assemblée nationale a lieu à bulletin secret, lors de la première séance de la législature qui est alors présidée par le doyen d'âge de l'hémicycle. La majorité absolue des scrutins est requise lors des deux premiers tours, la majorité relative suffit au troisième tour. En cas d'égalité, le candidat le plus âgé est élu. C'est pour cela qu'une majorité même relative de députés, comme c'est le cas pour Ensemble, devrait pouvoir faire élire l'un des siens à ce poste clé... à moins que l'ensemble des oppositions, de LFI au RN, ne s'unissent.
Le nouveau président s'installe ensuite au perchoir, où il prononce son premier discours et décrit l'état d'esprit dans lequel il entend incarner la fonction. Son mandat court jusqu'à la fin de la législature. En cas de démission, un nouveau vote est organisé.