Législatives : contesté, Taha Bouhafs retire sa candidature

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Ugo Padovani / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
par Maxence Kagni, le Mardi 10 mai 2022 à 11:25, mis à jour le Mardi 10 mai 2022 à 16:08

Alors qu'il devait être candidat aux élections législatives dans la 14e circonscription du Rhône, sous les couleurs de La France Insoumise, le journaliste et militant Taha Bouhafs a finalement renoncé à se présenter, dénonçant un "système" qui souhaite le "broyer". La France insoumise affirme qu'elle choisira elle-même le nom de son remplaçant, alors que le Parti communiste veut imposer sa propre candidate.

Il "n'arrive plus" à "se battre" face à ce qu'il estime être une "tempête d'attaques sans précédent" : Taha Bouhafs renonce. Le journaliste et militant, qui devait se présenter aux élections législatives dans la 14e circonscription du Rhône sous la bannière de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (NUPES), a déclaré se retirer de la course dans un message posté dans la nuit sur Twitter. "Tous les jours, une nouvelle calomnie, une nouvelle insulte, une nouvelle menace de mort, une nouvelle accusation", a-t-il notamment écrit, dénonçant un "système" qui a tenté de le "broyer".

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Engagé contre l'islamophobie, très critique envers le gouvernement, Taha Bouhafs s'est fait connaître en étant le seul à filmer Alexandre Benalla en train de molester un couple de manifestants à Paris, le 1er mai 2018. Quelques jours plus tôt, il avait relayé la fausse information selon laquelle un étudiant avait trouvé la mort à la suite d'une intervention policière. Taha Bouhafs a par ailleurs été condamné en 2021 pour "injure publique à raison de l'origine" pour avoir qualifié sur Twitter la syndicaliste Linda Kebbab d'"arabe de service". Une condamnation dont il a fait appel.

L'annonce de sa candidature avait provoqué de nombreuses critiques, venues de tous les bords politiques, mais aussi des tensions entre la direction du Parti communiste, qui souhaite la candidature de la maire communiste de Vénissieux, Michèle Picard, et l'état-major de la France insoumise, qui avait décidé d'investir le jeune homme âgé de 25 ans. Lundi, le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, avait déclaré sur France 2 que l'investiture de Taha Bouhafs posait "problème" et avait invité LFI à "revoir" sa décision : "Je ne comprends pas que LFI puisse présenter sous ses couleurs quelqu'un qui a été condamné en première instance pour injures raciales.

"C'est LFI qui choisira"

Mardi matin, quelques heures après l'annonce de Taha Bouhafs, Jean-Luc Mélenchon a pris la défense de l'éphémère candidat : "Une meute s'est acharnée contre lui, a-t-il déploré. Je m'en veux de ne pas avoir su le réconforter autant que nécessaire."

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"Il est plus que temps de regarder en face l'injustice, la violence des attaques venues de l'extrême droite, relayées ad nauseam dans les médias, par la macronie et jusque dans certains rangs à gauche, contre un jeune homme sans diplôme, issu des quartiers populaires et de l'immigration", a réagi la députée LFI Clémentine Autain dans un message publié sur Twitter. Le secrétaire national d'Europe Ecologie-Les Verts Julien Bayou a lui aussi apporté son soutien à Taha Bouhafs, dénonçant un "échec collectif" : "Il aurait fait (et peut-être fera un jour) un très bon député."

La tonalité est loin d'être la même au sein de le section communiste de la 14e circonscription du Rhône. Michèle Picard et ses soutiens ont estimé dans un communiqué que "la raison l'a emporté" tout en appelant à investir "la meilleure candidate pour rassembler toute la population de toutes nos communes" face au député sortant Yves Blein (La République en marche).

La NUPES doit maintenant reconnaître Michèle Picard comme la candidate qui peut rassembler toute la gauche. Nous attendons maintenant son soutien. Communiqué de presse

Mais le parti de Jean-Luc Mélenchon n'entend pas se faire dicter son choix dans cette circonscription attribuée à LFI dans le cadre de l'accord conclu entre les formations de gauche : "De toute manière, il y aura un candidat de La France insoumise", a déclaré mardi matin sur France 2 le député LFI Alexis Corbière. Le député européen et ancien directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, Manuel Bompard, est encore plus catégorique : "Bien évidemment, c'est La France insoumise qui choisira sa candidature sur cette circonscription et personne d'autre."

Interrogé par LCP, le député sortant Yves Blein (La République en marche) dit rester "imperturbable" et "serein", assurant "faire campagne avec beaucoup de conviction et un esprit de concorde dans une circonscription qui en a besoin". L'élu dénonce la candidature avortée de Taha Bouhafs, un "parachutage méprisant pour la population" : "Cela veut dire 'nous ne sommes pas capables de trouver parmi les vôtres quelqu'un qui correspond'." Après cette "capitulation en rase campagne", Yves Blein ironise sur les tensions au sein de la NUPES : "Je ne comprends plus très bien la stratégie de ce que fut cette alliance qui se délite."