Libérer le travail, inventer un nouveau modèle de croissance, rénover la démocratie, simplifier la vie des Français... En 2017, Emmanuel Macron proposait une "révolution" aux Français. Cinq ans plus tard, quelles sont les promesses qui ont été tenues ou non ?
Les campagnes électorales sont aussi l'heure de l'inventaire. Sur la centaine de propositions formulées par Emmanuel Macron en 2017, nous avons retenu une trentaine de points qui compte tenu de leur ampleur politique ou budgétaire, ainsi que des débats qu'ils ont suscité au Parlement et dans l'opinion, permettent d'évaluer et de mettre en perspective l'action menée lors d'un quinquennat perturbé par le mouvement des gilets jaunes et l'épidémie de Covid-19.
Les cotisations salariales chômage et maladie ont été supprimées en deux fois, entre janvier et octobre 2018, soit 3,15% rendus aux salariés sur leur fiche de paie. Les heures supplémentaires ne sont plus soumises à cotisation ni à l'impôt (dans la limite de 5000 euros par an) et la prime d'activité a été revalorisée de 100 euros pour un salarié au Smic.
Le nombre d'apprentis, fin 2021, s'établissait à plus de 650 000. Un chiffre record, à comparer aux quelque 294 800 apprentis en 2017.
Le crédit d'impôt compétitivité pour la compétitivité et l'emploi a été transformé en une baisse de cotisations pérenne de six points pour les entreprises sur les rémunérations brutes inférieures ou égales à 2,5 smic et l'impôt sur les sociétés a été progressivement passé de 33 à 25%.
Les accords majoritaires ou les référendums d'entreprise peuvent prévaloir sur les branches professionnelles sur certains sujets depuis la réforme du code du travail par ordonnances.
La taxation des revenus du capital, auparavant alignée sur le barème de l'impôt sur le revenu, est fixée en 2017 à 30%. L'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) est remplacée par un impôt sur la fortune immobilière (IFI), permettant d'exonérer l'imposition des valeurs mobilières dans les patrimoines des plus aisés.
Si l'on s'en tient à un bilan purement quantitatif, le quinquennat a été l'occasion de plusieurs années de recouvrements records pour l'administration fiscale : près de 11 milliards d'euros en 2019 - record absolu -, 8,7 milliards en 2020 et 10,7 milliards en 2021.
Le plan "15 000 places" a bien été approuvé à travers le déblocage de crédits budgétaires au Parlement, même si leur livraison doit s'échelonner jusqu'en 2027.
Le candidat Macron avait prévu d’invertir 50 milliards d'euros sur la "qualifications de tous les citoyens, de la transition écologique, de la révolution numérique, de la modernisation des services publics et de la rénovation urbaine". Finalement, cet objectif a été dépassé par le vote du plan France Relance (100 milliards d'euros) à l'occasion de la sortir du premier confinement en 2020 et par le lancement fin 2021 d'un deuxième plan, France 2030 (34 milliards d'euros).
Les deux prestations que sont l'allocation de solidarité aux personnes âgées et l'allocation aux adultes handicapés ont été revalorisées chacune d'environ 100 euros.
Le "dédoublement" des effectifs a concerné 10 800 classes fin 2021, proche de l'objectif des 12.000 classes annoncées dans le programme.
Après une phase d’expérimentation, le pass culture a bien été généralisé à tous les moins de 18 ans, pour un montant de 500 euros, conforme à la promesse initiale.
Dans l'espoir de faire reculer le renoncement aux soins, la réforme 100% santé est rentrée progressivement en vigueur entre 2019 et 2021. Selon le ministère des Solidarités, 10 millions de Français auraient bénéficier d'un zéro reste à charge sur ces prestations.
Supprimée pour 80% des foyers imposables dès 2018, la taxe d'habitation le sera totalement pour les 20% restant en 2023.
Réévalué à travers une loi de programmation, le budget des armées a atteint 2,1% du PIB en 2020. Une part qui devrait se maintenir en 2021 et 2022.
Emmanuel Macron avait promis d'ouvrir les droits à l'assurance-chômage aux salariés qui démissionnent et aux indépendants, une fois tous les cinq ans. Si le principe a été acté, une liste de conditions est venue restreindre ce nouveau droit, tant pour les démissionnaires que pour les indépendants.
La législation prévoit bien "des objectifs d'approvisionnement en produits de qualité et durables dans la composition des repas servis en restauration collective, à atteindre au plus tard au 1er janvier 2022". Mais ces cibles, fixées par la loi à 50% de l'approvisionnement total dont 20% d'aliments biologiques, ne sont actuellement pas atteintes par les acteurs. Le ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie, refusant un amendement de précision pour inclure la viande et les laitages dans les 50%, a argué que la loi actuelle était déjà "un défi pour les gestionnaires".
Première réforme du quinquennat, les lois de moralisation ont instauré la plupart des mesures promises (interdiction des emplois familiaux, contrôles des frais de mandats et suppression du régime spécial de retraite pour les députés). Toutefois, l'imposition promise d'un casier judiciaire vierge pour les candidats à une élection n'a pas été votée. Les députés et sénateurs ont aussi gardé une enveloppe mensuelle, de respectivement 600 et 885 euros, qu'ils peuvent dépenser sans justificatif.
Stoppée par la pandémie de Covid-19, la réforme instituant un système universel de retraite n'a pas été réinscrite à l'agenda du Parlement après un vote en première lecture à l'Assemblée, en mars 2020.
Derrière le flou de la formule, la France n'a pas interdit le glyphosate, faute de trouver une alternative jugée satisfaisante, par le monde agricole. L'objectif d'une réduction de 25% de l'utilisation des produits phytosanitaire n'est pas suivi d'effet et le Parlement a même voté la réautorisation temporaire d'un néonicotinoïde pour la culture des betteraves sucrières.
Censée aider les producteurs agricoles dans leur rapport de force avec les industriels et la grande distribution, la loi Egalim a échoué à augmenter, ou même sécuriser, leurs revenus. Un deuxième volet de la loi, promulguée en octobre 2021, a pour objectif de rectifier le tir, mais ses effets ne seront pas connus avant la fin de l'année.
Cette promesse est loin d'être atteinte : selon les estimations, le nombre de constructions s'établit entre 30 000 et 36 000 pour les logements étudiants. Le nombre de logements pour jeunes actifs n'a lui pas été évalué.
L'idée d'un revenu universel d'activité, qui fusionnerait RSA, APL et prime d'activité, rendant les aides plus lisibles et automatisant leur versement, n'a pas été concrétisée. En cas de réélection, Emmanuel Macron devrait remettre cette proposition sur la table.
Abandonnée au cours de l'été 2019, lors de l'affaire Benalla, la réforme de la Constitution n'a pas été menée à son terme. L'instauration d'une dose de proportionnelle lors des élections législatives mais aussi la limitation des mandats des parlementaires dans le temps ne sont donc pas mis en oeuvre.
La proposition phare du programme d'Emmanuel Macron était la suppression "d'au moins un quart des départements", en les rapprochant notamment des métropoles. Une réduction du nombre de départements qui n'a pas eu lieu.
Les deux principaux objectifs de la loi asile et immigration, votée en 2018, était de réduire la durée d'examen des demandes d'asile à moins de six mois et de procéder à l'expulsion de tous ceux dont la demande était rejetée. Selon le directeur de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, les délais de traitement des demandes d'asile étaient encore de 8 mois fin 2021, notamment à cause de stocks importants. Quant à l'expulsion des étrangers en situation irrégulière, elle est très loin des 100% visés par Emmanuel Macron, et s'établirait autour de 15% selon l'Élysée.