La proposition de loi relative à "la raison impérative d'intérêt public majeur de la liaison autoroutière entre Castres" sera examinée, ce mercredi 21 mai, en commission à l'Assemblée nationale. Avant d'être débattue dans l'hémicycle la semaine du 2 juin. Le texte, déjà adopté au Sénat, vise à permettre la reprise du chantier de l'A69, dont la justice a ordonné l'arrêt en février dernier. Une décision qui fait, par ailleurs, l'objet d'une procédure en cours devant la cour d'appel administrative de Toulouse.
C'est un texte particulièrement controversé qui arrive à l'Assemblée nationale. Ce mercredi 21 mai, les députés de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire examineront la proposition de loi relative à "la raison impérative d’intérêt public majeur de la liaison autoroutière entre Castres et Toulouse", qui a déjà été largement adoptée au Sénat.
Comme son nom l'indique, le texte ambitionne de faire approuver sur le plan législatif le projet de construction de l'A69, une autoroute reliant la sous-préfecture du Tarn à la préfecture de la Haute-Garonne. Et ce en dépit de la décision du tribunal administratif de Toulouse, qui a annulé les autorisations environnementales du projet en février dernier. Aucune raison impérative d'intérêt public majeur ne justifiant qu'il soit dérogé aux dispositions du code de l'environnement relatives aux habitats et espèces protégés, a tranché la justice en première instance, entraînant l'arrêt immédiat de travaux. Cette décision fait cependant l'objet d'un recours suspensif, déposé par l'Etat, devant la cour d'appel administrative de Toulouse. Dans le cadre de cette procédure actuellement en cours, le rapporteur public a recommandé, lundi 19 mai, à la cour d'appel - qui doit rendre sa décision d'ici à la fin du mois de mai - de permettre la reprise du chantier.
L'enjeu pour les finances publiques et le bon usage des deniers publics est majeur. Marie-Lise Housseau et Phillipe Folliot, sénateurs Union centriste
Sans attendre, après la décision rendue en première instance, la proposition de loi qui arrive cette semaine à l'Assemblée nationale a été déposée au Sénat le 18 mars. Les auteurs du texte, les sénateurs Union centriste Philippe Folliot et Lise Housseau, faisant valoir que cette décision avait des effets "extrêmement dommageables pour l'Etat". Les deux élus du Tarn, qui rappellent que l'Etat a fait appel de la décision, énumèrent les avantages du projet autoroutier - gain de temps, amélioration du cadre de vie des habitants, sécurité renforcée... Une annulation définitive du projet conduirait, en outre, à indemniser les concessionnaires, ce qui représenterait "plusieurs millions d'euros". La puissance publique devrait également assumer le coût de destruction de l'ensemble des travaux réalisés jusqu'à ce jour, "estimé à plus d'un milliard d'euros".
Les deux sénateurs évoquent aussi les "conséquences socio-économiques", qui "seraient également très lourdes", insistant notamment sur la disparition d'environ "1 000 emplois directement concernés par le chantier de l'A69". Leur proposition de loi, qui ne comporte qu'un article, consiste donc à valider les autorisations environnementales, en actant que le projet répond bien à une "raison impérative d'intérêt public majeur". Et s'attache donc à suivre une ligne de crête : contester sur le plan législatif une décision judiciaire, sans remettre en cause l'indépendance de la justice.
De leur côté, les opposants au projet sont vent debout contre la proposition de loi, qu'ils assimilent à un contournement de la justice. "La droite crée un précédent dangereux : celui de faire passer en force n'importe quel projet contesté au mépris des procédures juridiques", s'est insurgé le groupe Ecologiste du Sénat, qui a dénoncé une "attaque à peine masquée contre l'Etat de droit". Plusieurs élus et juristes pointent le risque d'inconstitutionnalité du texte, laissant augurer une saisine du Conseil constitutionnel si celui-ci venait à être définitivement adopté par le Parlement.
"Une telle loi bafoue les bases d’un principe fondamental de notre démocratie qu’est le respect du droit et des décisions de justice, elle créerait un précédent extrêmement préjudiciable", a également dénoncé La Voie est libre, principale association locale opposée au projet.
A l'Assemblée, le texte sera porté par le député du Tarn Jean Terlier (Ensemble pour la République), farouche défenseur du projet. Les débats s'annoncent particulièrement engagés du fait de la nature du texte et du projet autoroutier, contre lequel les parlementaires de gauche, et notamment la députée de la Haute-Garonne Christine Arrighi (Ecologiste et social), ont ferraillé.
Hasard du calendrier, la proposition de loi sera examinée en commission le jour où la justice étudiera le recours du gouvernement contre la suspension du chantier, la décision étant attendue dans les prochains jours. En cas de décision favorable, comme le recommande le rapporteur public dont les avis sont généralement suivis, les travaux pourront temporairement reprendre, dans l'attente de la décision en appel sur le fond, qui n'interviendra pas avant plusieurs mois. Après son examen en commission mercredi, la proposition de loi est inscrite à l'ordre du jour de l'hémicycle de l'Assemblée nationale le 2 juin.