Auditionné à l'Assemblée nationale, le patron d'EDF, Jean-Bernard Lévy, a fait le point sur le démantèlement de la centrale alsacienne, dont les deux réacteurs ont été arrêtés en 2020, et sur le calendrier de fermeture des autres réacteurs. Il a aussi défendu l'énergie nucléaire qui doit selon lui être intégrée au "Green new deal" européen.
"Nous regrettons bien-sûr qu'elle se soit arrêtée." Auditionné vendredi par la mission d'information "sur le suivi de la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim", le PDG d'EDF Jean-Bernard Lévy a pris la défense d'un site "exemplaire" mais aussi de toute la filière nucléaire, qui produit "une des énergies les plus décarbonnées qui soit".
S'exprimant devant les députés par visioconférence, Jean-Bernard Lévy l'a rappelé avec force : "Ce n'est pas EDF qui a décidé d'arrêter la centrale, ce n'est pas l'analyse économique qui aurait conduit à ce que cette centrale ne joue plus un rôle positif (...) ce n'est pas la sûreté non plus." Comme l'a rappelé le PDG du géant français de l'énergie, la fermeture de la centrale de Fessenheim est "une conséquence directe" de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015. Ce texte, qui devait répondre à la promesse de campagne de François Hollande, a fixé un plafond à la capacité nucléaire totale installée en France.
"Le site de Fessenheim avait été désigné depuis longtemps par les responsables politiques", a ajouté Jean-Bernard Lévy, qui déplore l'arrêt d'une centrale "performante en termes de production comme en termes de sureté". "Nous regrettons bien sûr que la centrale de Fessenheim ce soit arrêtée puisque nous avions investi beaucoup sur le plan humain, je dirais presque affectif, avec cette centrale exemplaire", a déclaré le PDG. Avant d'ajouter : "Nous avions investi beaucoup pour la rendre plus sûre et plus robuste en termes financiers, techniques."
Le démantèlement, qui doit concrètement débuter en 2025, devrait durer jusqu'en 2040. EDF a été indemnisé à hauteur de 370 millions d'euros en décembre 2020 et pourrait recevoir d'autres sommes à l'horizon 2031 et 2041 en fonction du "manque à gagner" qui sera ensuite constaté. Jean-Bernard Lévy a fait un point sur la situation des salariés du site : de 1100 emplois en 2018 (dont 737 pour EDF), les effectifs sont passés à 670 aujourd'hui. En 2025, 60 employés d'EDF seront présents sur site ainsi qu'une "centaine de prestataires". 82% des 737 salariés d'EDF ont pour l'instant été reclassés.
L'audition a été l'occasion pour le PDG d'EDF de défendre son parc de centrales : "Fessenheim a été la tête de série, le premier site pour nous permettre de disposer d'une électricité abondante, compétitive, disponible, produite dans les meilleures conditions de sûreté." Selon lui, ce parc est "une contribution majeure à la performance climatique de notre pays" puisque le nucléaire, qui emploie près de 220.000 salariés en France, est "une des énergies les plus décarbonnées qui soit".
Jean-Bernard Lévy va même plus loin : "Nous attendons pour la mi-juillet les premières propositions concrètes de la commission européenne pour la mise en place du Green new deal et il nous paraît très important que le nucléaire y trouve toute sa place."
EDF a toutefois prévu de fermer ses 56 réacteurs nucléaires actuels entre 2030 et 2060. "Notre stratégie est de fermer deux unités par an", a déclaré Jean-Bernard Lévy. L'entreprise française ne veut toutefois pas se faire dicter son calendrier.
Car l'Etat pourrait tout à fait décider, via la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), de fermer des réacteurs supplémentaires avant cette échéance. Une hypothèse qui ne plaît pas au géant français du nucléaire : "Nous avons convenu avec l'Etat que s'il prenait une telle décision, alors EDF demanderait une indemnité pour des fermetures qui ne correspondent pas à l'optimisation industrielle d'EDF en tant qu'entreprise", a mis en garde Jean-Bernard Lévy.