L'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité la proposition de loi visant à garantir un avocat à chaque enfant placé, ce jeudi 11 décembre. Porté par le groupe Socialistes dans le cadre de sa journée de "niche parlementaire", le texte ne fait que démarrer son parcours législatif.
Garantir l'accès à un avocat à chaque enfant placé ou suivi dans sa famille par les services sociaux. C'est l'objectif de la proposition de loi qui été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, ce jeudi 11 décembre, dans le cadre de la journée réservée au groupe Socialistes et apparentés. Le texte, examiné en première lecture, était porté par Ayda Hadizadeh.
La République n'est grande que lorsqu'elle sait prendre dans ses bras les plus petits d'entre les siens. Ayda Hadizadeh, députée "Socialistes et apparentés"
La députée a raconté à la tribune de l'hémicycle l'origine de son engagement, après une rencontre décisive il y a cinq ans avec le militant des droits de l'enfant Lyes Louffok, ex-enfant placé. "Il me raconte l'enfer. Les coups, les cris, les humiliations, les viols", "ces enfants qu'on déplace comme des objets et qu'on finit par jeter dehors", a-t-elle témoigné. "Plus il parle, plus je suis prise de vertige. Ce que j'appelais des faits divers est en réalité un système qui broie. Et j'ai honte pour notre République."
Et d'expliquer que garantir la présence d'un avocat permettrait de mieux protéger les enfants placés ou suivis. Quelque 380 000 jeunes sont concernés par ces mesures. Le plus souvent, ils ne sont pas accompagnés par un avocat, bien qu'ils puissent déjà en faire la demande.
"Pour un enfant, un avocat, c'est la sentinelle. C'est celui qui vérifie, qui questionne, qui alerte", a estimé Ayda Hadizadeh. La députée a rappelé l'émotion et l'indignation causées il y a quelques jours par les images de l'enfant placé tondu par ses éducateurs de l'aide sociale à l'enfance (ASE) dans un foyer parisien. "Et si Eliott, ce petit garçon de 8 ans avait eu un avocat ? (...) Peut-être que ces lâches n'auraient pas osé le toucher, parce qu'ils auraient su qu'Eliott avait dans sa poche le numéro de son avocat."
Reconnaissant le "dysfonctionnement désormais bien documenté dans le fonctionnement de certaines structures de la protection de l'enfance", Stéphanie Rist a rappelé avoir saisi la procureure de Paris sur la situation d'Eliott. La ministre de la Santé, après avoir également rappelé qu'une "refondation" de la protection de l'enfance était engagée, a salué "l'intention louable de la proposition de loi". Elle a toutefois fait part du souhait d'en passer par une expérimentation, redoutant que l'évolution entraînée par le texte n'entraîne une "déstabilisation" du financement de l'aide juridictionnelle et des juridictions.
Cette "prudence" gouvernementale n'a convaincu que peu d'élus, y compris au sein de l'ex-majorité présidentielle. "Il n'est plus temps d'expérimenter, il est temps de passer à l'action" a estimé Perrine Goulet (Les Démocrates). "Ce n'est pas comme si rien n'avait été fait. [...] les barreaux sont prêts", a renchéri Caroline Yadan (apparentée Ensemble pour la République). A l'issue de ces échanges, un amendement d'Elisabeth de Maistre (Droite républicaine), qui défendait elle aussi une expérimentation, n'a pas été adopté, malgré le soutien du gouvernement.
La proposition de loi va désormais être transmise au Sénat, où elle devra être inscrite à l'ordre du jour pour continuer son cheminement législatif. Après l'adoption de ce texte, les députés poursuivent, ce jeudi, l'ordre du jour établi par les socialistes, avec l'examen d'un texte visant à protéger les mineurs isolés et à lutter contre le sans-abrisme.