La proposition de loi "interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne", dont le dépôt avait été annoncé dès juin 2020 par la députée de l’Allier Laurence Vanceunebrock (La République en marche) est examinée en commission des lois ce mercredi 29 septembre. Le texte est soutenu par plusieurs associations, ainsi que des personnalités publiques, qui avaient plaidé pour que le Parlement s’en empare au plus vite.
Laurence Vanceunebrock (LaREM) avait relayé leurs messages de soutien sur Twitter : les chanteurs Eddy de Pretto et Hoshi avaient réclamé publiquement, il y a quelques mois, un examen en urgence de sa proposition de loi pour interdire les thérapies dites "de conversion", demande suivie d’un hashtag porteur d'un message clair : "rien à guérir".
Je savais qu’il y avait un sujet outre-atlantique, et ce depuis la fin des années 1970, mais pour moi, ce n’était pas le cas en France. Laurence Vanceunebrock
À la suite de ce qu'elle qualifie de "coming-out un peu involontaire", ayant elle-même fait part de sa situation familiale, la députée de l’Allier avait été interpellée par un internaute fin 2017. Laurence Vanceunebrock reconnaît qu'elle n’avait alors pas pris la mesure du phénomène. "Je savais qu’il y avait un sujet outre-atlantique, et ce depuis la fin des années 1970, mais pour moi, ce n’était pas le cas en France". Après quelques recherches et prises de contact avec des associations, elle décide de porter à l'Assemblée ce sujet alors quasiment méconnu et qui suscite d’abord "beaucoup d’étonnement" au sein de son propre groupe. "La plupart de mes collègues n’étaient pas au courant de l'existence de ces pratiques, il a fallu faire de la pédagogie". Dans un premier temps, c’est une mission d’information, que Laurence Vanceunebrock mène conjointement avec son collègue de La France insoumise Bastien Lachaud, qui sort de terre en 2019. Repoussée en raison de l’épisode des gilets jaunes, puis de la crise sanitaire, le président du groupe La République en marche, Christophe Castaner, propose finalement que la proposition de loi visant à lutter contre les "thérapies de conversion", soit reprise par l’ensemble du groupe.
La proposition de loi n’hésite pas à qualifier de "tortures" les pratiques prétendant agir sur l’orientation sexuelle et genrée des individus, et vise à les interdire, à l’instar de Malte, qui avait franchi le pas dès 2016.
Dans son exposé des motifs, le texte indique que ces "thérapies", qui partent du postulat que l’homosexualité et la transidentité seraient des "maladies", sont bien souvent l’apanage de certains représentants des cultes, et peuvent prendre la forme de simples entretiens, de stages de "virilisation", jusqu’à des séances d’exorcisme, voire des traitements par injections d’hormones ou électrochocs. Le principal vecteur d’orientation vers ce type de pratiques serait familial.
Par la proposition de loi, il s’agit en premier lieu de créer une infraction spécifique au code pénal. Si la sanction préconisée est de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende, l'objectif est avant tout pour Laurence Vanceunebrock de faire en sorte que le délit ainsi créé fasse l'objet d'une reconnaissance en tant que tel, pour aider les victimes dans leur parcours de dépôt de plainte et permettre à terme de mieux quantifier le phénomène.
Outre les représentants ou fidèles religieux, les médecins qui prétendent "guérir" ce qu’ils considèrent comme une maladie en tentant de modifier ou de réprimer une orientation sexuelle ou une identité de genre, seront par ailleurs condamnés au titre de l’exercice illégal de la médecine.
La proposition de loi formule, par ailleurs, une demande de rapport au gouvernement "afin d’assurer l’information des citoyens, la formation sur la prise en charge des victimes par les professionnels concernés, et le suivi de la lutte contre ces pratiques". Ce rapport aura notamment pour visée d’identifier les moyens permettant de former les personnels de police et de justice, mais aussi de l’Éducation nationale, à même de détecter les jeunes victimes de ce type de pratiques et de lutter contre la reproduction des discriminations visant une orientation sexuelle ou une identité de genre.
L’idée est justement de rassurer les différentes communautés religieuses, et pas du tout, au travers de ce texte, de viser les religions. Laurence Vanceunebrock
Ce type de pratiques a été constaté chez les trois grandes religions monothéistes, et notamment, au sein du christianisme, dans la communauté évangélique. Si Laurence Vanceunebrock anticipe déjà les craintes qui pourraient se faire jour au sein de ces religions, elle tient à préciser que ce qu’elle dénonce est une forme de dévoiement au nom du sacré. "L’idée est justement de rassurer les différentes communautés religieuses, et pas du tout, au travers de ce texte, de viser les religions". Après son passage en commission des lois, le texte sera examiné en séance dès le 4 octobre prochain.