Devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur le maintien de l'ordre, le préfet de police de Paris, Didier Lallement, constate une réduction de la taille des cortèges et la radicalisation de plus en plus forte "chez certains" pour "faire le buzz en cassant".
Nostalgique, Didier Lallement ? Auditionné mercredi sur la doctrine du maintien de l'ordre des forces de police, le préfet de Paris constate que les manifestations ne sont plus vraiment ce qu'elles étaient, à tout point de vue : "Les grosses manifestations aujourd'hui c'est 50 000 personnes. Il n'y a plus de manifestations dans Paris telles que j'ai pu les connaître dans ma jeunesse [à] 300, 400, 500 000 personnes, ça n'existe plus."
Le haut fonctionnaire, nommé à Paris au printemps 2019 et aux méthodes de maintien de l'ordre contestées par les Gilets jaunes, a donné son sentiment aux députés sur le changement de nature de la contestation dans la rue aujourd'hui.
Car si les cortèges sont moins importants, ils sont de plus en plus nombreux. En dix ans, leur nombre a doublé dans la capitale. Sur environ 10 000 manifestations dénombrées en 2019, le préfet explique n'en avoir interdit que 75, sans toutefois détailler la nature des événements interdits.
Surtout, Didier Lallement fait le diagnostic d'une contestation basée sur la "casse" plus que sur le nombre :
Aujourd'hui, ce n'est pas le nombre qui compte, c'est la capacité de détruire. (...) Chez un certain nombre de gens, l'objectif c'est de casser. On fait le buzz en cassant ! Didier Lallement
Alors que le ministère de l'Intérieur a revu sa doctrine de maintien de l'ordre pour notamment mieux "superviser" l'utilisation des lanceurs de balles de défense (LBD), Didier Lallement estime que les éruptions de violences sur la voie publique "ne sont pas un problème de police mais un problème sociétal". "Est-ce que la contestation doit passer par l'irrespect de la loi ? Voilà un beau sujet de philosophie", a lancé le représentant de l'État.
Lors de l'audition, la députée parisienne Brigitte Kuster (LR) s'est étonnée d'avoir vu, dans sa circonscription, une manifestation où le port du masque n'était pas respecté et cela sans verbalisation. "La difficulté quand nous constatons cela, c'est de ne pas nous-mêmes, en allant verbaliser, provoquer un trouble à l'ordre public, même si c'est ce que nous devrions faire", a concédé Didier Lallement.
Dans ce genre de situation, le remède pouvant être pire que le mal, le préfet a expliqué qu'il était en général préférable de demander aux policiers d'essayer "de persuader les gens", par exemple, en passant des appels dans des hauts-parleurs. Didier Lallement précise cependant que le non-respect des obligations sanitaires n'est "pas si fréquent" et se limite souvent "à quelques individus" en fonction de l'âge des manifestants.