Mayotte : ce que contient le projet de loi d'urgence pour la reconstruction après le cyclone Chido

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François Bayrou et Manuel Valls, à Mayotte, le 30 décembre 2024. Julien De Rosa - AFP
François Bayrou et Manuel Valls, à Mayotte, le 30 décembre 2024. Julien De Rosa - AFP
par Maxence Kagni, le Mercredi 8 janvier 2025 à 15:05, mis à jour le Mercredi 8 janvier 2025 à 17:09

Le projet de loi "d'urgence pour Mayotte" a été présenté, ce mercredi 8 janvier, en conseil des ministres. Le texte permet de déroger à de nombreuses règles d'urbanisme, afin d'accélérer la reconstruction de l'archipel dévasté mi-décembre par le cyclone Chido. Il ne contient, en revanche, pas de mesures liées à l'immigration, ce sujet ayant vocation a être débattu dans un deuxième temps. 

"Préparer la reconstruction" de Mayotte, dévastée le 14 décembre 2024 par le cyclone Chido. Le gouvernement de François Bayrou a présenté ce mercredi 8 janvier, en conseil des ministres, le projet de loi "d'urgence pour Mayotte". "Sa philosophie est simple : permettre la mise en œuvre très rapide de mesures urgentes pour faciliter l'hébergement et l'accompagnement de la population, ainsi que la reconstruction ou réparation des infrastructures", a expliqué le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, à l'issue du Conseil des ministres.

Le projet de loi, qui contient 22 articles, permet notamment d'adapter temporairement les règles en matière d'urbanisme ou d'expropriation. Il ne porte pas, en revanche, sur le sujet sensible de l'immigration à Mayotte, pourtant jugée "incontrôlée" par François Bayrou le 30 décembre dernier. Cette thématique, selon prioritaire Bruno Retailleau, Manuel Valls et Sébastien Lecornu (respectivement ministres de l'Intérieur, des Outre-mer et des Armées), devrait être abordée dans un texte distinct, au printemps prochain.

Le 18 décembre 2024, le Premier ministre de l'époque, Michel Barnier, qui gérait les affaires courantes après la censure de son gouvernement, avait déjà déclaré l'état de calamité naturelle exceptionnelle à Mayotte, afin de "permettre une gestion plus rapide et efficace de la crise". Dans l'exposé des motifs de son projet de loi, le gouvernement Bayrou ajoute qu'il ne renonce pas à la possibilité de prendre prochainement, par décret, "de nombreuses mesures, y compris de nature législative".

Un établissement public

Le projet de loi permet, en premier lieu, l'intervention d'un établissement public dédié à la reconstruction de Mayotte. Il devra s'agir d'un "opérateur puissant", a souligné Manuel Valls, qui a fait référence à la méthode retenue pour reconstruire Notre-Dame de Paris. Le ministre des Outre-mer a par ailleurs indiqué que le général Pascal Facon sera chargé de "préfigurer cet établissement" avec l'idée qu'il en devienne à terme le directeur général.

Le texte facilite aussi la reconstruction des écoles et facilite l'installation rapide de constructions temporaires "destinées à l'hébergement d'urgence". Ces constructions seront "dispensées" de formalités liées au code de l'urbanisme, à condition que leur durée d'implantation ne soit pas supérieure à deux ans. Dans le cas contraire, les constructions devront être régularisées ou détruites.

Un autre article permet au gouvernement de prendre par ordonnances "toute mesure de nature législative permettant de déroger à certaines règles de construction à Mayotte". Cependant, tout ne sera pas permis : les nouveaux logements, destinés à perdurer, devront offrir "des garanties de durabilité" mais aussi et surtout "répondre aux exigences prévues par les réglementations relatives à la prévention des risques naturels".

Expropriations facilitées

Des projets de reconstruction ou de réfection pourraient aussi, si le texte est adopté en l'état, ne pas respecter les règles "actuellement prévues par les documents d'urbanisme locaux ou les normes en vigueur". L'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme seraient sensiblement accélérées. 

La durée totale d’instruction ne devrait donc ainsi pas dépasser un mois et demi,
contre plusieurs mois dans le droit commun. Exposé des motifs du texte

Autre mesure : puisqu'il est "souvent difficile d’identifier formellement les propriétaires des terrains" à Mayotte, le texte permet au gouvernement de modifier par ordonnance les "règles relatives à l’expropriation pour cause d’utilité publique". L'ordonnance serait "préparée en concertation étroite avec les acteurs locaux". "Notre priorité est que les Mahorais aient le plus vite possible un toit", a déclaré Manuel Valls.

En outre, le projet de loi autorise, "sur le modèle des dispositions adoptées pour la reconstruction de Notre-Dame", l'aménagement des règles de défiscalisation de dons. Il autorise aussi les collectivités territoriales à verser des subventions aux associations qui participeront à la reconstruction de Mayotte. Enfin, le texte contient plusieurs mesures sociales, valables jusqu'au 31 mars 2025, comme la "suspension du recouvrement des cotisations sociales" et la prolongation des droits pour les demandeurs d'emploi.

Un examen dès lundi en commission

Le texte sera examiné lundi 13 janvier par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, en vue d'une adoption rapide par le Parlement. Manuel Valls espère que "le débat parlementaire" permettra de "compléter" le texte sur deux sujets qu'il juge majeurs : la "lutte contre l'habitat illégal" et le "blocage temporaire des loyers". 

Nous ne laisserons pas Mayotte redevenir une île bidonville. Manuel Valls

Le ministre des Outre-Mer est également revenu sur sa volonté de porter un autre texte contenant des mesures plus "structurelles". Ce "projet de loi-programme de refondation de Mayotte" sera présenté "dans les trois mois" qui viennent, a-t-il annoncé. Il contiendra les mesures du plan "Mayotte debout" présenté le 30 décembre par François Bayrou, afin de permettre le développement économique de l'île et de "lutter contre le fléau de l'immigration illégale".