Le député PS Jean-Louis Bricout voulait permettre aux élèves de seconde de passer l'examen du code de la route dans le cadre de leur temps scolaire.
Mercredi, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a rejeté la proposition de loi du député socialiste Jean-Louis Bricout "relative au passage de l'épreuve théorique du code de la route dans les lycées".
L'élu de l'Aisne souhaitait étendre à d'autres territoires volontaires l'expérimentation menée actuellement dans sa circonscription : celle-ci permet à "767 lycéens des classes de secondes", dans huit établissements publics et privés, de "suivre l'apprentissage du code de la route" dans le "cadre de leur temps scolaire" mais aussi de "passer l'examen" au sein de leur lycée.
"Le permis de conduire doit être considéré comme un diplôme à part entière", explique Jean-Louis Bricout dans sa proposition de loi, puisque "sans lui, l'insertion professionnelle s'en trouverait singulièrement compliquée".
L'obtention du permis est d'autant plus nécessaire "dans un milieu rural souvent privé de transports en commun", écrit l'élu socialiste.
"Avec une telle disposition, le reste à charge [pour les lycéens et leur famille] est de 30 euros, soit 10% du prix moyen de l'examen du code", a expliqué mercredi en commission l'élue PS Sylvie Tolmont.
Conscient que la majorité est peu encline à voter des textes issus de l'opposition, Jean-Louis Bricout avait soigné son argumentaire à destination des députés La République en Marche.
L'expérimentation, débutée en octobre 2019, est une des applications du "pacte pour la réussite de la Sambre-Avesnois-Thiérache" signé "en présence" d'Emmanuel Macron et donc avec son "soutien implicite".
Par ailleurs, a précisé mercredi le député socialiste, "le passage de l'épreuve théorique du permis de conduire peut [déjà] être organisé, en dehors du temps scolaire, dans les locaux des lycées" : une disposition prévue par la loi du 6 août 2015 dite "loi Macron"...
Jean-Louis Bricout avait même déposé un amendement réécrivant sa proposition de loi. L'élu socialiste, qui souhaitait au départ étendre l'expérimentation à l'ensemble du territoire français, a finalement proposé de permettre "sa mise en œuvre par les établissements d’autres territoires qui le souhaiteraient".
Mais cela n'a pas suffi à convaincre la majorité parlementaire, Alexandre Freschi (La République en Marche) évoquant plusieurs "problèmes de fond".
Selon lui, la proposition socialiste crée des "inégalités entre les établissements qui auront la possibilité de mettre en oeuvre une telle expérimentation et ceux qui ne pourront pas le faire". Quant à la version initiale du texte, elle aurait coûté "a minima 50 millions d'euros".
Cette proposition de loi ne répond pas non plus au cœur du problème, qui reste le prix de la formation à l'épreuve pratique.Alexandre Freschi
La majorité souhaite s'en tenir aux propositions du Premier ministre Edouard Philippe et du ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, qui "ont publié le 2 mai dernier une série de mesures pour abaisser le coût du permis de conduire".
"A l'été 2019, trois mesures majeures sont entrées en vigueur : le passage de l'épreuve pratique à 17 ans pour les jeunes qui optent pour la conduite accompagnée, le développement de la formation sur simulateur de conduite, la réduction du taux d'attente de six à trois mois entre l'obtention du permis de conduire 'boîte automatique' et la possibilité de le transformer en permis classique", a précisé le député La République en Marche.
La proposition de loi a fait l'objet d'autres réserves venant de plusieurs députés d'opposition, malgré un soutien de La France insoumise.
"Est-ce le rôle de l'Education nationale d'organiser le passage du code sur le temps scolaire lorsque l'on voit déjà les difficultés de formation des élèves ?", a ainsi interrogé l'élue Les Républicains Frédérique Meunier.
"On demande beaucoup à l'école", a tenu à rappeler Elsa Faucillon (PCF), pourtant plutôt favorable à l'expérimentation, à condition que celle-ci n'entraîne pas "une lourdeur supplémentaire pour les lycées".
Le député "UDI, Agir et Indépendants" Michel Zumkeller s'est pour sa part interrogé sur la "temporalité" de cette proposition de loi élargissant une expérimentation qui a commencé au début du mois dernier : "Il aurait peut-être été préférable d'attendre la fin de cette expérimentation pour légiférer de manière acceptable."
Interrogé par LCP, Jean-Louis Bricout a interprété le rejet en commission de sa proposition de loi comme étant un "bras d'honneur" adressé par la majorité "à notre jeunesse, aux familles et aux territoires".
J'ai l'impression qu'il y a une espèce de mépris du fait parlementaire.Jean-Louis Bricout
L'élu socialiste aura l'occasion de défendre à nouveau son texte lors de son examen en séance publique, prévu le 5 décembre.