Présidentielle : retraites, les projets d'Emmanuel Macron et Marine Le Pen à la loupe

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Des personnes attendent devant une agence retraite à Dunkerque en 2018
Des personnes attendent devant une agence retraite à Dunkerque en 2018 (PHILIPPE HUGUEN / AFP)
par Jason Wiels, le Mardi 19 avril 2022 à 10:43, mis à jour le Mercredi 20 avril 2022 à 12:32

Age de départ, niveau des pensions, carrières longues... En matière de de retraites, le Président-candidat et la candidate du Rassemblement national ont des projets bien différents. Avec la question du financement au coeur du débat. 

Notre régime de retraite a-t-il besoin d'être réformé ? Depuis la loi Touraine de 2014, qui prévoit l'allongement progressif de la durée de cotisation à 43 ans, le système actuel n'a pas subi de retouche de la part des gouvernements successifs. Début 2020, le gouvernement d'Édouard Philippe a tenté en vain de faire aboutir un système universel de retraite à points, stoppé net par la pandémie de Covid-19.

Selon les projections du Conseil d'orientation des retraites (COR), malgré le vieillissement en cours de la population, "la part des dépenses des retraites dans le PIB resterait sur une trajectoire maîtrisée" d'ici à 2070. L'alourdissement du nombre de retraités par rapport au nombre de cotisant serait contrebalancé par la diminution relative du niveau des pensions (indexées sur les prix et non les revenus) et par l'entrée en vigueur progressive des dernières réformes, dans un environnement de chômage bas (avec une hypothèse moyenne de 7%). En résumé le COR prévoit, selon ses différents scénarios de long terme, un solde des régimes de retraire entre -0,7% et +2,1% du PIB. Soit une situation légèrement déficitaire à plutôt excédentaire, et ce sans changement des règles.

Ce constat "n'emporte toutefois aucune appréciation politique sur le niveau actuel ou futur de ces dépenses, s'empressent toutefois de préciser les experts. Selon les préférences politiques et les priorités qu'on souhaite assigner aux finances publique, il est parfaitement légitime de défendre que ces niveaux sont trop ou pas assez élevés." Autrement dit, les retraites de demain sont d'abord et avant tout un choix éminemment politique.

Ce que propose Emmanuel Macron

Le contenu. Le Président-candidat ne propose plus aux Français la même réforme que lorsqu'il avait été élu en 2017. Reportant à plus tard un éventuel système de retraite universel à points, Emmanuel Macron souhaite désormais repousser l'âge légal de départ de 62 à 65 ans, à raison de quatre mois par an jusqu'en 2030. Cette mesure, inscrite noir sur blanc dans son programme du premier tour, pourrait cependant être légèrement amendée. Après le premier tour, l'actuel Président a cependant "ouvert la porte" à un report limité à 64 ans, avec une "clause de revoyure" dans cinq ans.

La durée de cotisation de 43 ans tout comme l'âge de départ légal sans décote à 67 ans resteraient les mêmes. Un système analogue favorisant les départs anticipés serait toujours prévus "pour les cas d’incapacité, des carrières longues ou pénibles", mais il serait fixé à 62 ans, contre 60 ans aujourd'hui. Enfin, Emmanuel Macron a annoncé vouloir la mise en place d'une pension minimale fixée à 1100 euros pour une carrière complète.

Le chiffrage. En faisant les plus et les moins de sa réforme, l'équipe du candidat a calculé que les mesures conjuguées rapporteraient après 2030 environ 9 milliards d'euros par an aux caisses de la Sécurité sociale. Une équation dont l'équilibre dépend toutefois de la "clause de revoyure" évoquée dans l'entre deux tours et des critères précis retenus pour les départs anticipés. De plus, la réindexation des pensions sur l'inflation dès l'été (+4%) au lieu d'attendre l'année prochaine, comme le prévoit la loi, pourrait aussi peser sur les bénéfices attendus.

Ce que propose Marine Le Pen

Le contenu. Marine Le Pen aussi a évolué sur les retraites entre 2017 et 2022. Il y a cinq ans, elle souhaitait le retour à 60 ans pour tous. Aujourd'hui, la candidate du Rassemblement national prône le maintien de l'âge de départ à 62 ans, avec la possibilité d'un départ anticipé à 60 ans pour les Français entrés dans la vie active avant 20 ans. Ensuite, les générations entrant entre 20 et 24 ans et demi pourraient partir entre 60 ans et neuf mois et 62 ans, au prorata des trimestres cotisés. Après 25 ans, le système resterait le même. Quant à la durée de cotisation, elle serait de 42 ans et non plus 43 ans. Marine Le Pen veut, par ailleurs, un minimum vieillesse à 1000 euros pour les personnes aux carrières incomplètes et restaurer la demi-part fiscale en faveur des veuves et veufs.

Le chiffrage. La prétendante à l'Élysée a chiffré le coût de sa réforme à 9,6 milliards d'euros par an, lissés sur le quinquennat. Mais en annulant les mesures d'âge votées ces dernières années, l'addition pourrait être près de trois fois plus lourde selon l'Institut Montaigne, qui chiffre la réforme globale de la candidate à - 26,5 milliards d'euros par an. Par ailleurs, ce chiffre n'inclut pas l'indexation des retraites sur l'inflation, dont le chiffre retenu dans le projet pour 2022 (2,1% contre 4,5% attendus à date par l'Insee) est déjà caduc. Quelques économies sont toutefois mises en avant : la sortie de 108 000 seniors de plus de 60 ans du chômage, soit une économie indirecte de 1,9 milliard d'euros pour l'assurance-chômage.