Bioéthique : Le gouvernement mis en minorité sur l'anonymat des donneurs

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Coralie Dubost défend l'article 3 du projet de loi bioéthique
par Fanny SALIOU, le Jeudi 30 juillet 2020 à 17:45, mis à jour le Vendredi 2 octobre 2020 à 15:39

Un amendement du gouvernement qui prévoyait que les anciens donneurs de gamètes se manifestent s'ils souhaitaient lever leur anonymat a été rejeté par les députés. Par deux fois sur l'article 3 du projet de loi de bioéthique, les députés n'ont pas suivi l'avis du gouvernement. 

Le Premier ministre avait demandé aux députés de la majorité de "respecter les équilibres" du projet de loi bioéthique avant son examen en deuxième lecture à l'Assemblée. En clair, il s'agissait de revenir au texte issu de la première lecture.

S'il a été entendu sur le don d'ovocyte au sein d'un couple de femmes et sur la PMA post mortem, deux dispositifs supprimés en séance, comme le souhaitait le gouvernement, il ne l'a pas été sur la levée de l'anonymat des donneurs de gamètes dont le don est antérieur à la loi. 

Levée de l'anonymat des donneurs de l'ancien régime

Les personnes ayant donné leurs gamètes avant l'adoption du projet de loi de bioéthique actuel l'ont fait sous le régime de l'anonymat. Les enfants qui en sont issus ne peuvent donc pas accéder à leurs origines. 

Pour tenter de remédier à cette inégalité, le gouvernement souhaitait que les anciens donneurs se manifestent, "à leur initiative", pour indiquer qu'ils donnaient leur accord pour révéler leur identité ou des données non identifiables

Adrien Taquet a rappelé que le gouvernement prévoit de mettre en place une "vaste campagne pour proposer à tous ceux qui ont fait des dons avant la présente loi, de se faire connaître, s'ils le souhaitent, afin de permettre un accès à leurs données non identifiantes et/ou à leur identité". 

Le texte issu de la commission spéciale prévoyait plutôt que l'on rappelle les donneurs lorsque l'enfant issu de leur don chercherait à connaître ses origines. Ils pourraient alors donner leur accord à la levée de leur anonymat comme s'y opposer.

 

Le ministre a dénoncé une méthode "intrusive".

Il est important que la puissance publique respecte la parole donnée à ces donneurs à l'époque. Adrien Taquet, Secrétaire d'État chargé de l'Enfance et des Familles

"Il n'y a pas d'obligation pour le donneur de revenir sur l'anonymat. On lui laisse le choix", a expliqué la rapporteure Coralie Dubost (La République en marche). 

Désaccords au sein de la majorité

Finalement, les députés ont rejeté l'amendement du gouvernement. La version du texte issue de la commission et défendue par la rapporteure a donc été maintenue. Elle a été soutenue par des députés issus de toutes les composantes de la majorité.

C'est une reconnaissance énorme pour les enfants nés avant cette loi. Géraldine Bannier, députée "Modem" de la Mayenne

Plus tôt, contre l'avis du gouvernement, les députés ont adopté un amendement des députés socialistes qui prévoit que les informations concernant le donneur pourraient être livrées aux parents qui souhaitent accompagner leur enfant dans sa recherche d'identité.

Face à ces désaccords, Patrick Hetzel (Les Républicains) a raillé une "majorité empêtrée dans quelque chose d'incroyable". 

Votre majorité est dans une dérive totale, et nous en avons ici une formidable illustration. Patrick Hetzel, député "Les Républicains" du Bas-Rhin

L'article 3 du projet de loi bioéthique qui prévoit la levée de l'anonymat des donneurs de gamètes a été adopté en deuxième lecture par les députés.