Consultation citoyenne sur le "cannabis récréatif" : sa légalisation plébiscitée

Actualité
Image
AFP
par Ariel Guez, le Lundi 1 mars 2021 à 19:21, mis à jour le Mardi 2 mars 2021 à 11:51

Plus de 80% des citoyens qui ont participé à la consultation en ligne organisée par l'Assemblée nationale se sont prononcés en faveur de la légalisation du cannabis récréatif. "On sait désormais que la légalisation du cannabis n’est plus un tabou en France", a réagit Caroline Janvier (LaREM), la députée chargée de ce sujet au sein de la mission d'information sur la réglementation et l’impact des différents usages du cannabis. 

Une très large majorité (80,8%) des 253 194 personnes qui ont participé à la consultation citoyenne sur le cannabis dit "récréatif" ont plébiscité sa légalisation dans un cadre régi par la loi. Cette consultation, lancée en début d'année sur le site de l'Assemblée nationale doit servir "à éclairer la mission d'information" sur les usages du cannabis et alimentera les propositions qui seront  formulées par les députés. "On sait désormais que la légalisation du cannabis n’est plus un tabou en France et que nos concitoyens font le constat de l’inefficacité de la législation actuelle en la matière", a souligné dans un communiqué relevé par l'AFP Caroline Janvier (La République en marche), la rapporteure du volet "récréatif" de la mission parlementaire. 

La législation en vigueur largement jugée inefficace

A peine 2.000 personnes (soit 0,82% des participants à la consultation) se prononcent en effet en faveur du maintien de la législation en vigueur. Surtout, plus de neuf personnes sur dix (92,09%) ne pensent pas que le dispositif actuel permette de lutter efficacement contre les trafics. Si 13,8% se déclarent favorables à une dépénalisation, ils ne sont que 4,6% à plaider pour un renforcement des sanctions et seulement 0,8% pour le maintien du cadre légal en vigueur. 

Ce "constat d'inefficacité" sera présent dans le volet "récréatif" des travaux de la mission d'information qui sera rendu mi-avril, indique à LCP Caroline Janvier. Plusieurs propositions seront faites, explique-t-elle, mais chacune sera adaptée à différents objectifs politiques.  "Si notre objectif premier, c'est la santé publique, on ne met pas en place les mêmes modèles et on n'utilise pas les mêmes leviers que si c'est la sécurité et l'assèchement des trafics", explique la députée du Loiret. 

Les participants à la consultation citoyenne ont leur avis sur la question : 62,4% imaginent une commercialisation du cannabis dans des boutiques spécialisées, 24,2% en vente régulée sur le modèle de l'alcool, 8,6% dans les bureaux de tabac et 3,8% en vente libre.  Les répondants sont, par ailleurs, dans leur très grande majorité favorables (86%) à ce que l'Etat permette aux particuliers de cultiver eux-mêmes des plants de cannabis dans des limites fixées par la loi. 

Vers un référendum ?

Quel sera l'avenir du rapport et des propositions qui seront formulées ? Le rapporteur général de la mission d'information, Jean-Baptiste Moreau (LaREM) va jusqu'à imaginer un éventuel référendum. "Il faudra lancer une vraie consultation populaire et pourquoi pas un référendum",  estimé dimanche sur Franceinfo le député de la Creuse. "Aujourd'hui, on fait face à une interdiction, mais à une consommation record, donc la situation n’est pas tenable", a ajouté le député, qui s'est dit favorable à une légalisation du cannabis. "On a une économie parallèle très conséquente qui s'est constituée et qui finance d'autres réseaux, trafics d'armes et autres".

Dans la classe politique, qui est pour ? qui est contre ? 

Les députés LaREM favorables à la légalisation du cannabis comme Jean-Baptiste Moreau et Caroline Janvier le savent : tant que le sujet sera aussi clivant dans les partis politiques, il sera difficile de légiférer. Du côté de l'exécutif, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, qui a fait de la lutte contre le trafic de stupéfiants une priorité, s'est d'ailleurs dit opposé, en septembre, à la légalisation du cannabis

"Il y a un travail à faire au sein de LaREM sur le plan des idées, mais c'est aussi plus large", reconnaît Caroline Janvier.  "Les drogues, c'est un sujet sensible sur lequel il faut créer un consensus. Il faut convaincre que légalisation ne veut pas dire banalisation et qu'une telle mesure permettrait à l'Etat de reprendre le contrôle", explique-t-elle. La députée du Loiret espère donc que le débat aura lieu lors de l'élection présidentielle en 2022, et "qu'il y aura un volet cannabis dans le programme d'Emmanuel Macron". 

Il faut convaincre que légalisation ne veut pas dire banalisation 

A gauche, Jean-Luc Mélenchon (LFI), est favorable à la légalisation. C'est aussi le cas de Yannick Jadot (EELV) qui a signé en 2019 une tribune dans l'Obs à ce sujet avec 69 autres personnalités. En  2017, le candidat socialiste à la présidentielle, Benoît Hamon, était aussi pour la légalisation du cannabis

A droite, Xavier Bertrand s'est positionné contre la dépénalisation en 2011. Mais l'idée semble faire son bout de chemin chez certains élus Les Républicains. Plusieurs sont désormais ouvertement favorable à la légalisation. “Pourquoi pas”, répond ainsi désormais Rachida Dati, qui a longtemps été opposé à une évolution de la législation. 

Pour le Rassemblement nationale, Marine Le Pen reste opposé à une dépénalisation ou une légalisation. 

 


Achevée dimanche avec un total de 253.194 contributions, cette consultation en ligne est un succès dont l'Assemblée nationale se félicite. "Il s’agit donc de la deuxième consultation la plus plébiscitée dans l’histoire des consultations en ligne de l’Assemblée", ont souligné lundi les services du Palais Bourbon.  Un peu plus de 30% des répondants à cette consultation citoyenne ont déclaré ne jamais avoir consommé de cannabis. 38,3% affirment en consommer occasionnellement, 17% régulièrement et 13,9% disent avoir une consommation quotidienne de ce produit stupéfiant.

En 2019, la consultation sur le changement d'heure hiver/été avait atteint plus de deux millions de participations.