La présidente du groupe LFI Mathilde Panot a défendu sans succès, mercredi matin en commission, une proposition de loi "visant à restaurer l’État de droit par l’abrogation des régimes d’exception créés pendant la crise sanitaire". Les débats sont entrés en résonance avec les derniers propos d'Emmanuel Macron au sujet des Français non vaccinés.
En finir avec le passe sanitaire et surtout, empêcher l'instauration du passe vaccinal. La présidente du groupe "La France insoumise" à l'Assemblée nationale Mathilde Panot a présenté mercredi matin, en commission des lois, la proposition de loi "visant à restaurer l’État de droit par l’abrogation des régimes d’exception créés pendant la crise sanitaire".
Le texte, étudié à l'occasion de la journée d'initiative parlementaire de LFI, propose de supprimer le régime de l'état d'urgence sanitaire : activé plusieurs fois depuis le début de la pandémie, il donne notamment la possibilité à l'exécutif d'instaurer des confinements et des couvre-feux. La France insoumise veut également abroger le "régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire", actuellement en vigueur jusqu'au 31 juillet 2022.
Mathilde Panot veut, en outre, en finir avec les passes, qui sont selon elle "une obligation vaccinale déguisée". "Je dois dire ma fierté de faire partie du camp des réfractaires, qui réunit la Défenseure des droits, l'Organisation mondiale de la santé, qui appelle à convaincre plutôt que de contraindre, la Cnil, qui a demandé en vain le bilan sanitaire des instruments liberticides mis en œuvre par le gouvernement, et même à certain égards le conseil scientifique, qui appelle à un changement de cap dans la stratégie de lutte contre le virus", a expliqué la députée.
Selon elle, le passe sanitaire a fait preuve de son inefficacité : "Les contaminations au variant Omicron s'élèvent à 300.000 cas par jour." "Le vaccin permet de lutter contre les formes graves", a concédé la présidente du groupe LFI, "mais nous savons aussi que nous pouvons contracter le virus et le transmettre même avec trois doses".
Depuis sept mois, vous imposez à la population un dispositif sans fondement scientifique, sans évaluation aucune. Mathilde Panot
L'élue a défendu plusieurs "alternatives" à la politique du gouvernement : "Restauration d'un service public hospitalier gratuit et de qualité", "tests gratuits", "généralisation des purificateurs d'air", "instauration du roulement pour le travail, les transports et les écoles", "levée des brevets sur les vaccins" ou "encore distribution gratuite des masques FFP2".
La proposition de loi des députés de La France insoumise intervient dans un contexte parlementaire tendu : lundi soir et mardi soir, l'Assemblée nationale a interrompu prématurément l'examen du projet "renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire", qui doit instaurer en France un passe vaccinal. Le premier soir, l'opposition a voulu marquer son refus d'étudier le texte au pas de course et en pleine nuit.
Mardi soir, elle a vivement protesté contre les propos d'Emmanuel Macron, tenus lors d'un entretien avec les lecteurs du Parisien : "Les non-vaccinés, j'ai très envie de les emmerder", a notamment expliqué le chef de l'État. Une intervention médiatique qui a rendu impossible la tenue d'un débat serein, les députés enchaînant les rappels au règlement et les interruptions de séance : "Je ne peux pas cautionner un texte qui a pour objectif d'emmerder les Français", a par exemple déclaré Christian Jacob, le président du parti Les Républicains.
L'examen en commission de la proposition de loi LFI a donc fait office de troisième acte, avant la reprise des débats dans l'hémicycle sur le projet de loi du gouvernement, qui est prévue mercredi après-midi. "Notre ambition n'est pas d'emmerder les Français contrairement au président de la République, ni de transiger avec le souci de la santé publique", a commenté devant ses collègues Mathilde Panot.
L'élue a dénoncé des "propos indignes" qui ont pour but de "créer un ennemi de toutes pièces" : "Qui pensez-vous convaincre, quand un Président stigmatise et insulte de la sorte une partie de nos concitoyens ?", a demandé Mathilde Panot, qui soupçonne le gouvernement de vouloir "évacuer soigneusement sa responsabilité dans le chaos".
La majorité a profité de l'occasion pour défendre l'action du gouvernement. Guillaume Gouffier-Cha (La République en marche) a longuement énuméré les différentes mesures prises durant la crise, insistant sur le "contrôle du Parlement". "Depuis le début de l'épidémie, plus de 55 heures ont été consacrées à ces travaux en commission et plus de 135 heures en séance publique, sans compter les débats en cours", a rappelé l'élu.
"Les régimes de l'état d'urgence sanitaire et de gestion de la sortie de crise sanitaire ont permis depuis mars 2020 de protéger la santé des Français", a affirmé Guillaume Gouffier-Cha, dénonçant la "dangerosité" de la proposition de loi de La France insoumise. "L'esprit de responsabilité doit primer sur les vaines querelles politiciennes", a conclu le député LaREM. "Oui, embêter les non-vaccinés, c'est les sauver", a quant à elle affirmé Caroline Abadie (La République en marche).
"A l'heure où les menaces à l'encontre de députés prolifèrent sous l'effet de désinformations, du scepticisme et de l'antiparlementarisme ambiants, il est particulièrement irresponsable d'affirmer que les mesures que nous avons adoptées violent l’État de droit", a ajouté Erwan Balanant (MoDem), rappelant que "l'Assemblée nationale a été consultée à douze reprises".
Raphaël Schellenberger (Les Républicains) a pour sa part mis en cause cette proposition de loi qui, selon lui, "contribue de la politisation de la crise sanitaire" et "sert les intentions du président Emmanuel Macron, candidat à sa succession". "Nous ne sommes pas opposés aux outils de gestion de la crise, mais nous avons toujours demandé à ce que ces outils soient contrôlés au plus près possible par la représentation nationale", a ajouté le député LR. Une position identique à celle de Cécile Untermaier (Socialistes) : "C'est plus la façon dont est utilisé l'outil, que l'outil que vous voudriez supprimer, que nous devons interroger ensemble", a analysé la députée PS.
Les députés de la commission des lois ont largement rejeté le texte de La France insoumise. Il sera néanmoins étudié en séance publique, le 13 janvier.