La commission d'enquête visant à prévenir les effets de la crise du Covid-19 sur la jeunesse a entendu des représentants des partenaires sociaux et des associations afin de réfléchir aux moyens de limiter l'impact de la crise sanitaire sur l'emploi des jeunes. Le constat est plutôt sombre : formation, apprentissage, insertion sur le marché du travail, tous les domaines sont impactés par la pandémie.
Les 16-25 ans feront-ils partie de la génération sacrifiée sur l'autel de la lutte contre le Covid-19 ? Les perspectives de l'insertion sur le marché du travail de cette catégorie de la population ne sont guère reluisantes. Entendue jeudi 12 Novembre par les députés de la commission d'enquête visant à "mesurer et prévenir les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse", Inès Mimim, secrétaire nationale de la CFDT, a alerté sur la hausse "très brutale" du chômage des jeunes en cette fin d'année. Une situation que le reconfinement menace encore d'aggraver. "On prévoyait déjà 26 à 27 % de chômage des jeunes fin 2020", contre 19,6 % à la même période en 2019, a-t-elle expliqué. "On risque de dépasser ce chiffre."
Un constat largement partagé. Représentants de syndicats, d'organisations patronales, d'associations : toutes les personnes auditionnées par les députés de la commission ont témoigné des effets délétères des mesures de confinement sur l'entrée des jeunes sur le marché du travail, qu'il s'agisse de la formation, des contrats d'apprentissages, ou des petits boulots en parallèle des études. Le principal risque, ont souligné les intervenants, étant de perdre de vue des jeunes en difficulté, sans les orienter efficacement, dans un contexte où les conséquences de la crise pourraient affecter leur vie sur plusieurs années.
Nous sommes particulièrement inquiets pour l'intégration des jeunes [en apprentissage], car ils sont encore en période d'essai Marie Dupuis-Courtes, vice-présidente de la CPME
Ce tableau étant brossé, les acteurs du milieu ont toutefois salué les efforts de l'exécutif pour limiter les effets de la crise sanitaire, portés notamment au sein du plan "un jeune, une solution". Ce dernier, doté de 6,5 milliards d'euros, prévoit des allégements de charges pour les entreprises qui recrutent un jeune ainsi que des aides pour le recrutement d'alternants. Les participants à la table ronde ont majoritairement plaidé pour davantage de souplesse et d'agilité, au niveau des entreprises comme des centres de formation d'apprentis.
Ils ont également proposé des pistes de réflexion supplémentaires pour mieux aider les jeunes, notant que la crise pouvait avoir des effets accélérateurs. Inès Mimin (CFDT) a proposé que les jeunes puissent bénéficier des minimas sociaux (lesquels sont aujourd'hui uniquement versés aux personnes de plus de 25 ans). Elle a également plaidé pour le déploiement d'une application destinée à mieux informer les jeunes des dispositifs disponibles.
Maxime Dumont, représentant de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), a pour sa part évoqué l'ouverture de l'apprentissage dès la 3ème, afin de mieux orienter les collégiens vers une voie qui peut encore parfois souffrir, selon lui, d'une image négative. Il a par ailleurs regretté qu'il n'y ait pas de contrepartie négociée dans le cadre des aides du plan en faveur de l'emploi des jeunes.
Si elle a reconnu que la priorité des PME n'était pas d'embaucher mais de "survivre", la présidente de la commission éducation–formation du Medef, Marie Christine Oghly, a pour sa part insisté sur le fait que les entreprises n'étaient pas suffisamment informées des aides qui leur étaient apportées.
Plus surprenant, plusieurs personnalités auditionnées ont également mis en garde contre la fracture numérique qui touche une partie des jeunes, compliquant l'enseignement à distance. La crise sanitaire a mis en lumière un illectronisme qui n'allait pas de soi chez les 16-25 ans. "Ce n'est pas parce que les adolescents possèdent un smartphone qu'ils savent se servir des outils informatiques", a témoigné Philippe Lehericey, secrétaire général adjoint de la CFTC-Enseignement public et recherche. Il a notamment demandé la mise en oeuvre d'un plan informatique "digne de ce nom" dans les établissements scolaires.
Cette fracture numérique peut également s'expliquer par des difficultés financières. Pour cette raison, Marie Dupuis-Courtes, vice-présidente de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), a plaidé pour que l'acquisition d'un ordinateur soit intégré au financement de l'apprentissage, cet outil étant devenu nécessaire pour la formation.
Autant de réflexions qui devraient nourrir les conclusions de la commission. Celle-ci auditionnera jeudi 19 novembre Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la Jeunesse et de l'Engagement.