Crédits immobiliers : une proposition de loi Renaissance pour tenter d'assouplir le taux d’effort maximal de 35%

Actualité
Image
Maison à vendre Wikimedia 25/04/2024
Une maison en vente (© Wikimedia)
par Raphaël Marchal, le Lundi 29 avril 2024 à 17:05, mis à jour le Lundi 29 avril 2024 à 17:35

Une proposition de loi visant à desserrer les conditions d'octroi d'un prêt immobilier, présentée par les députés Renaissance est examinée en première lecture, ce lundi 29 avril, dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Le texte modifie la composition et les règles du Haut Conseil de stabilité financière avec l'intention d'assouplir la règle des 35% de taux d’effort maximal pour obtenir un crédit immobilier.

Comment enrayer la crise du logement ? Alors que de nombreux Français sont peinent à se loger, et plus encore à se loger correctement, le groupe Renaissance veut faciliter l'obtention d'un crédit immobilier par les ménages qui peuvent se le permettre, en jouant sur l'un des paramètres pris en compte lors de l'octroi d'un prêt pour l'acquisition d'un logement. A l'heure actuelle et depuis 2019, il est demandé aux banques et autres organismes prêteurs de respecter un taux d'effort de maximal 35 % - calculé à partir du revenu du ménage qui se porte candidat au crédit.

Ce taux est fixé par le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF), organe méconnu, chargé de veiller à la stabilité financière en France, et donc notamment d'éviter un surendettement des ménages. A travers ses recommandations, le HCSF autorise toutefois les établissements financiers à s'écarter de ce taux de 35 %, dans la limite de 20 % des dossiers tous les 3 mois. Cette autorité administrative prohibe également les crédits dont la durée de remboursement dépasse les 25 ans - à l'exception des projets de construction ou d'achats sur plan.

Le HCSF met en avant une doctrine de l’endettement excessif particulièrement stricte, qui a pour effet d’exclure de l’accession à la propriété certains emprunteurs parfaitement solvables. (Exposé des motifs de la proposition de loi)

Or, estiment les députés du groupe présidé par Sylvain Maillard (Renaissance) dans une proposition de loi examinée, ce lundi 29 avril dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, cette règle des 35 % "participe à la chute massive de la production des crédits à l’habitat hors renégociations", en "empêchant l’accession à la propriété de potentiels emprunteurs parfaitement solvables". Ce texte visant à "compléter les dispositions applicables au Haut Conseil de stabilité financière", porté par Lionel Causse (Renaissance), propose donc, dans sa version initiale, que les établissements prêteurs puissent y déroger, en tenant davantage compte du "reste à vivre" à condition que le crédit proposé ne présente pas de risque excessif pour le ménage. D'autant plus que les banques n'utiliseraient, selon les partisans de la proposition de loi, que trop rarement la marge de manœuvre autorisée par le HCSF. 

Cette volonté d'assouplissement a toutefois été atténuée lors de l'examen du texte en commission en maintenant "l’effectivité des pouvoirs du HCSF, tout en l’invitant à davantage motiver ses décisions et à être plus transparent vis-à-vis du public". Le Haut Conseil de stabilité financière devra également tenir compte des "variations de l’offre et de la demande de crédit" lorsqu'il fixe les conditions permettant aux établissements bancaires de déroger à ses critères. Ces derniers devront être rendus systématiquement publics et seront mis en place pour une durée de trois mois renouvelables - un délai qui pourrait néanmoins encore évoluer lors de l'examen de la proposition de loi dans l'hémicycle. 

"Aujourd’hui, notre pays accepte qu’un foyer puisse mettre 50 % de ses revenus dans un loyer, mais on va lui refuser un taux d’endettement à hauteur de 40 % pour acquérir un bien. Voici des absurdités d’un système très rigide. Le surendettement, il est chez les locataires, pas ailleurs", explique le rapporteur du texte, Lionel Causse, dans une interview publiée ce lundi par Challenges

Vers la nomination d'un député et d'un sénateur au sein du HCSF

Les députés de la majorité se montrent également critiques envers le "pouvoir discrétionnaire" du HCSF, ce qui a pour effet de "soustraire à tout débat public" les évolutions qu'il fixe en matière de conditions d'octroi d'emprunt immobilier. Et ce alors même que "l’accès au crédit immobilier intéresse plusieurs millions de Français".

Pour y remédier, le groupe Renaissance propose de modifier la composition de cet organe, en y intégrant de manière paritaire un député et un sénateur, désignés par la présidence l'Assemblée nationale et celle du Sénat. "La présence d’un député et d’un sénateur au sein même du HCSF permettrait de renforcer les discussions autour des mesures à privilégier et, partant, l’aspect démocratique du processus d’adoption de ces dernières", indique le texte. 

Il faut supprimer ce machin qui ne sert à rien. Jean-Philippe Tanguy (RN) à propos du HCSF

Cette proposition est critiquée par les groupes de gauche qui craignent un risque de surendettement des ménages, les députés du groupe Socialistes y voyant en outre "tentative d’ingérence politique". Le groupe Rassemblement national appelle, quant à lui, à la suppression du HCSF, un "machin inutile à la dérive", estime Jean-Philippe Tanguy (RN)

Actuellement, l'autorité administrative est composée de huit membres, dont cinq siègent en raison de leurs fonctions : le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, qui en est le président, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, le vice-président de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, Jean-Paul Faugère, le président de l'Autorité des marchés financiers, Robert Ophèle, et le président de l'Autorité des normes comptables, Patrick de Cambourg.

Trois personnalités qualifiées sont également nommées par le locataire de Bercy et le président de chacune des deux Chambres du Parlement. Actuellement, siègent Raphaëlle Bellando, professeur de sciences économiques à l’université d’Orléans, Hélène Rey, professeur d’économie à la London Business School, et Marianne Verdier, professeur de sciences économiques à l’université Paris 2 Panthéon Assas.

La proposition de loi sera examinée en première lecture, ce lundi 29 avril dans la soirée, dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, puis devra poursuivre son parcours législatif au Sénat.