Fast-fashion : une proposition de loi pour "réduire l’impact environnemental de l’industrie textile" adoptée en commission

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"L'industrie du textile représente 10% des émissions de gaz à effet de serre", Anne-Cécile Violland. LCP
"L'industrie du textile représente 10% des émissions de gaz à effet de serre", Anne-Cécile Violland. LCP
par Adèle Daumas, le Jeudi 7 mars 2024 à 20:40, mis à jour le Jeudi 14 mars 2024 à 18:11

La proposition de loi visant à "réduire l'impact environnemental de l'industrie textile", et plus particulièrement celui de la "fast-fashion" (ou mode éphémère), portée par Anne-Cécile Violland (Horizons) a été adoptée en commission, ce jeudi 7 mars. Elle sera examinée dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, jeudi 14 mars, lors de la journée d'initiative parlementaire du groupe Horizons.

"L'industrie du textile représente 10% des émissions de gaz à effet de serre, bien plus que l'aérien et le maritime réunis", a souligné Anne-Cécile Violland (Horizons), rapporteure de la proposition de loi visant à "réduire l'impact environnemental de l'industrie textile", lors de son examen au sein de la commission du développement durable. Précisant que ce pourcentage pourrait monter à "26% en 2050 si les tendances actuelles de consommation se poursuivent"

Contrarier la tendance actuelle de surconsommation de vêtements, aussi appelée "fast-fashion", c'est donc l'objectif de ce texte présenté par le groupe Horizons, présidé par Laurent Marcangeli, à l'occasion de sa journée d'initiative parlementaire, qui aura lieu jeudi 14 mars dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale.

Lutter contre la pollution générée par la "fast-fashion"

Avec plus de "plus de 7 200 nouveaux modèles de vêtements par jour" la marque de prêt-à-porter chinoise Shein propose "900 fois plus de produits qu’une enseigne française traditionnelle", explique l'exposé des motifs de cette proposition de loi. Et le succès de ce modèle économique ne se dément pas : le chiffre d'affaires de l'entreprise a progressé "de 900% en seulement trois ans". 

La "fast-fashion", dite aussi "mode éphémère" ou "mode jetable", dont les enseignes sont en pleine montée en puissance, se caractérise par la sortie continue de nouveaux modèles de vêtements à bas coûts. Participant à faire de l'industrie de la mode la troisième la plus polluante au monde.

En effet, "le polyester, la matière première la plus produite, nécessite pour sa fabrication annuelle 70 millions de barils de pétrole", a indiqué Anne-Cécile Violland, "tandis que le coton, première alternative végétale aux fibres synthétiques, est la culture la plus consommatrice de pesticides au monde, mobilisant plus de 10% des volumes étendus". Sans compter les "teintures" qui mobilisent "des substances toxiques qui finissent dans les milieux aquatiques" et les "microfibres de plastiques" relâchées à chaque lavage par les vêtements composés de matières synthétiques, représentant chaque année plus de "24 milliards de bouteilles plastiques".

Sensibiliser le consommateur, instaurer des pénalités et interdire la publicité

Le texte propose d'agir sur trois leviers : 

  • L'article premier vise à définir la pratique commerciale de la mode éphémère à partir de "seuils" fixés par "décret". Il impose aux personnes et entreprises qui commercialisent des articles de "fast-fashion" à sensibiliser les consommateurs sur l'"impact environnemental" de cette industrie et sur "les possibilités de réemploi et de réparation des vêtements et accessoires".
  • Le deuxième article propose la mise en place d'"un système de primes et de pénalités" pour les entreprises du textile, qui pourraient se répercuter sur les prix, afin d'inciter à consommer des produits plus "durables" et assurer "une concurrence plus équitable", selon Anne-Cécile Violland. Le texte prévoit une "montée en puissance" de ces pénalités, qui seront directement réinjectées dans la filière via un éco-organisme, lequel financera ainsi "la gestion de la collecte, du tri et du traitement des produits usagés" ou encore le versement de "primes aux entreprises engagées dans des démarches d’éco‑conception".
  • Le troisième et dernier article suggère d'interdire toute forme de publicité pour tout ce qui relève de la mode éphémère, alors que leur omniprésence sur les réseaux sociaux et le relais des influenceurs a fait le succès de ces marques. 

Anne-Cécile Violland a également souligné l'"impact social de la production textile à bas prix, souvent lointaine et délocalisée", régulièrement mise en cause pour des "violations des droits humains, travail forcé, travail des enfants", notamment à l'égard des Ouïghours. Cet aspect n'a toutefois pas été intégré à la proposition de loi : "ce texte ne peut traiter de l'ensemble des problématiques du secteur, compte tenu de l'angle environnemental retenu et des contraintes juridiques qui s'imposent", a justifié la députée de Haute-Savoie.

Une proposition de la majorité saluée par les oppositions

Alors que le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, avait déjà annoncé que le gouvernement soutiendrait le texte, ce dernier a également trouvé un écho favorable auprès de l'ensemble des groupes politiques lors de son examen en commission. 

Antoine Villedieu (Rassemblement national) a déclaré soutenir "toute initiative qui pourrait inciter et non contraindre nos concitoyens à une meilleure consommation" et encourager une "industrie plus locale, plus vertueuse" face au "consumérisme exacerbé". Antoine Vermorel-Marques (Les Républicains) a salué une proposition "qui dépasse les sensibilités politiques", tandis qu'Alma Dufour (La France insoumise) s'est réjouie d'une "proposition de loi plus que bienvenue" face à une "industrie textile" qui constitue "ce que la mondialisation a fait de pire."

Toutefois, si l'ensemble des groupes politiques a exprimé son désir de voter cette proposition de loi lorsqu'elle sera examinée dans l'hémicycle, à droite comme à gauche, les députés souhaitent amender le texte : fixer les seuils dans la loi plutôt que par décret, inscrire la réduction des importations de "fast-fashion" (ces articles étant quasi exclusivement produits à l'étranger), renforcer le système de bonus/malus au profit du made in France ou encore établir le seuil minimal des pénalités qui peuvent s'appliquer. 

La rapporteure du texte, Anne-Cécile Violland, s'est engagée à former un groupe de travail, afin que des accords puissent être trouvés sur ces différents points d'ici à l'examen de la proposition de loi en première lecture, jeudi prochain, 14 mars.