La structure, qui chapeautera France télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'Ina, doit "donner à l'audiovisuel public un outil à la hauteur" des enjeux contemporains. L'opposition, qui dénonce une "centralisation", évoque une "rationalisation budgétaire".
La commission des affaires culturelles et de l'éducation a adopté jeudi, en début de soirée, le projet de loi "relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique".
Le texte, qui a notamment pour objet d'"intégrer" Netflix au modèle culturel français, crée également la "holding" France Médias, qui réunira France télévisions, Radio France, France Médias Monde (RFI, France 24) et l'Ina.
Devant les députés, le ministre de la Culture Franck Riester a défendu la réforme, qui vise à "créer un groupe public" et à "doter l'audiovisuel public d'un outil à la hauteur de son importance pour notre pays". "La holding est le moyen pour mettre en oeuvre [cet objectif]", a-t-il précisé.
Face à la "révolution numérique", l'audiovisuel public doit "avoir une vision globale de l'organisation de ses métiers, la radio, la télé, l'internet, en France et à l'étranger", a continué le ministre.
"La plupart des groupes publics européens sont organisés comme ça", a argumenté Franck Riester, prenant aussi en exemple certains groupes privés, comme M6/RTL.
Concrètement, la loi crée "la société-mère France Médias" : celle-ci sera chargée de "veiller à la cohérence et à la complémentarité des offres de programmes de France télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'Ina".
Le PDG de France Médias sera le président des conseils d'administrations des quatre autres groupes. Il sera nommé sur proposition du conseil d'administration de France Médias par décret du président de la République, après avis conforme de l'Arcom (le super régulateur né de la fusion du CSA et de l'Hadopi) et avis simple des commissions parlementaires compétentes.
Le PDG de France Médias aura un rôle déterminant dans la nomination des directeurs généraux des quatre groupes publics qui composeront la holding. La loi prévoit par ailleurs la présence d'un "commissaire du Gouvernement désigné" auprès de France Médias mais aussi de France télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'Ina.
De nouvelles règles critiquées par la députée communiste Marie-George Buffet, qui a évoqué son "impression d'une centralisation extraordinaire" et son "doute sur la diversité éditoriale" des groupes publics centralisés dans la holding France Médias.
Alexis Corbière (LFI) a, lui aussi, rappelé son "attachement à l'indépendance de chacune des sociétés" et assuré craindre une "mise au pas éditoriale". Le député a même défendu un amendement proposant de renommer la holding "ORTF 2.0"
Franck Riester leur a répondu, précisant que "la responsabilité éditoriale sera bien dans les mains des directeurs généraux des filiales du groupe public", c'est-à-dire dans les mains des patrons de France télévisions, Radio France ou encore France Médias Monde.
L'élue Libertés et Territoires Frédérique Dumas a pour sa part assuré que "la création d'une holding ne peut pas avoir pour seule justification la rationalisation budgétaire".
La députée explique que France télévisions doit faire face, depuis 2018, à des "coupes budgétaires très importantes" : "On habille ces décisions à travers une holding", a regretté Frédérique Dumas.
"Ne me dites pas, on va faire, avec moins de moyens, aussi bien voire, mieux. Personne n'y croit, c'est la difficulté", a abondé Alexis Corbière.
"On n'est pas dans un objectif de rationalisation", a réagi Franck Riester. Mais le ministre a prévenu : "On ne va pas se priver d'avoir des synergies créées, d'avoir des économies d'échelle obtenues, bien sûr."
Il a réaffirmé sa volonté de "préserver un financement dédié à l'audiovisuel". L'actuelle redevance est adossée à la taxe d'habitation, "qui en 2023 n'existera plus", a rappelé Franck Riester : "Dans le projet de loi de finances 2023, il conviendra de prévoir le remplacement de [la redevance]."
Le ministre a également promis que la disparition de France 4 ne reviendrait pas à "supprimer à la télévision linéaire les contenus jeunesse ou d'animation". D'ici avril, un "pacte de visibilité jeunesse et animation" devrait être conclu, à l'instar du "pacte de visibilité des outre-mer" qui doit pallier la disparition de France Ô. Il reviendra donc aux autres chaînes du service public de diffuser des programmes pour les enfants.
Les députés ont, par ailleurs, adopté une série d'amendements ajoutant dans la loi de nouvelles missions de service public aux sociétés de l'audiovisuel public, comme le divertissement, la diffusion de compétitions sportives féminines ou encore une contribution à la construction de la "conscience écologique".
La commission des affaires culturelles et de l'éducation a aussi voté un assouplissement de l'interdiction de la publicité en soirée sur France télévisions : celle-ci sera autorisée pour une liste "d’événements sportifs d'importance mondiale" qui sera fixée par décret.