L'Assemblée nationale refuse de modifier la loi sur le non-cumul des mandats

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Jean-Christophe Lagarde, le 17 novembre 2021
par Maxence Kagni, le Mercredi 17 novembre 2021 à 09:50, mis à jour le Mercredi 17 novembre 2021 à 17:38

Les députés ont repoussé mercredi 17 novembre, en commission des lois, une proposition de loi organique "favorisant l'implantation locale des parlementaires" présentée à l'initiative du groupe "UDI et indépendants". Ce texte avait été adopté en octobre par le Sénat. 

L'Assemblée nationale ne veut pas modifier la règle sur le non-cumul des mandats. Les députés de la commission des lois ont repoussé, mercredi 17 novembre, une proposition de loi organique "favorisant l'implantation locale des parlementaires". Le texte, rédigé par le sénateur Hervé Marseille (Union centriste), était défendu au Palais-Bourbon par le président du groupe "UDI et indépendants", Jean-Christophe Lagarde. Son objectif était de revenir "partiellement" sur la loi organique du 14 février 2014 "interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur". 

Adoptée par la majorité socialiste lors du quinquennat de François Hollande, la loi du 14 février 2014 interdit aux parlementaires nationaux et européens de cumuler leur mandat avec, notamment, les fonctions de maire (y compris d'arrondissement, délégué ou d'adjoint au maire), de président ou de vice-président de conseil départemental et de conseil régional. Mais la disposition n'a pas empêché le "renforcement" de "la fracture entre les citoyens et les parlementaires", a estimé mercredi Jean-Christophe Lagarde. Selon lui, cette loi doit donc être "rééquilibrée" de façon "proportionnée". 

L'élu, qui a lui-même cumulé les fonctions de maire de Drancy (Seine-Saint-Denis) et de parlementaire "pendant 17 ans", a donc repris dans la niche parlementaire de son groupe la proposition de loi organique "favorisant l'implantation locale des parlementaires". Adoptée le 12 octobre par le Sénat, elle rétablit dans son article premier la possibilité pour un parlementaire d'être également maire (ou adjoint au maire) d'une commune de moins de 10.000 habitants.

"La responsabilité opérationnelle de services publics locaux, l'échange permanent avec les services de l’État sont irremplaçables pour saisir au mieux les attentes des citoyens", a justifié devant ses collègues Jean-Christophe Lagarde. Selon lui, le mandat de maire donne "une forme de légitimité supplémentaire" : le non-cumul aurait donc "contribué à l'affaiblissement" des parlementaires. "Même si ce n'est pas populaire, il nous appartient d'y réfléchir", a conclu l'élu.

"Machine arrière"

La proposition de loi a reçu le soutien de Pascal Brindeau (UDI et indépendants) et de Philippe Gosselin (Les Républicains), qui a jugé "important de pouvoir enfin réouvrir les débats sur ce sujet". Mais l'initiative a été critiquée par de nombreux députés, à l'instar de Jean-René Cazeneuve (La République en marche), qui a dénoncé un texte qui fait "machine arrière". L'élu a d'ailleurs rappelé que les parlementaires pouvaient cumuler leur mandat national avec un "mandat local non exécutif": "56% des députés ont un mandat local."

Le député LaREM a défendu les effets positifs du non-cumul en matière de "renouvellement de la classe politique", notamment vis-à-vis de son "rajeunissement" et de sa "féminisation". Un argument repris à son compte par Marie-George Buffet (Gauche démocrate et républicaine) : "Je veux bien qu'on ajoute cumul à cumul, mais quand on fait déjà deux journées dans une, si on en ajoute quatre, ça va quand même freiner les femmes." La députée estime par ailleurs que le seuil choisi est inopérant car "les maires des communes de moins de 10.000 habitants sont justement ceux qui ont le moins de disponibilités."

L'ancienne ministre préférerait s'attaquer à la "source des problèmes" : "Nos institutions, qui sont usées, qui ont vieilli". Marie-George Buffet propose par exemple de revenir sur l'inversion du calendrier électoral dont "l'idée est qu'il faut donner une majorité au Président qui a été élu".

Isabelle Florennes (MoDem) a proposé, quant à elle, de travailler sur la "maîtrise par les deux Chambres de leur ordre du jour" tandis que Paul Molac (Libertés et Territoires) a évoqué la possibilité d'instaurer une "minorité de blocage". Défendant l'instauration d'une VIe République, Bastien Lachaud (La France insoumise) a, pour sa part, dénoncé la proposition de loi défendue par Jean-Christophe Lagarde, qui "cache", selon lui, "les pratiques de la Ve République que le peuple déteste le plus".

"Je n'ai pas la naïveté de croire que cette proposition pouvait être adoptée par une majorité en fin de parcours et de législature", leur a répondu Jean-Christophe Lagarde. "Souvent une idée nécessite du temps pour cheminer et l'ambition de ce texte est clairement de faire cheminer le fait que nous sommes allés dans l'excès en 2014 et que des ajustements sont et seront nécessaires", a-t-il expliqué. Le texte sera débattu l'Hémicycle de l'Assemblée nationale lors de la journée d'initiative parlementaire du groupe "UDI et indépendants", vendredi 26 novembre.