À l'initiative d'un groupe de travail sur la désertification médicale composé de 95 autres députés, Guillaume Garot (Socialistes) a présenté, cette semaine, entouré de plusieurs de ses collègues, une proposition de loi transpartisane visant à lutter contre ce phénomène. Pour répondre à une situation qualifiée "d'urgence" le texte propose notamment de réguler l'installation des médecins.
Résultat d'un travail initié en juillet 2022 avec des députés de différents bords politiques, Guillaume Garot (Socialistes) a présenté, mercredi 13 novembre, une proposition de loi pour lutter contre les déserts médicaux. Une première version avait été déposée en janvier 2023, mais a depuis été enrichie, les députés ayant repris le fil de leurs travaux au début de la nouvelle législature, avec de nouveaux venus qui ont été élus lors des législatives anticipées et qui ont rejoint le groupe de travail transpartisan.
Lors de la conférence de presse qui s'est tenue à l'Assemblée nationale, le député socialiste de la Mayenne a indiqué que le nouveau texte serait formellement déposé dans les prochains jours. Et Guillaume Garot de préciser que celui-ci à d'ores et déjà été signé par 237 députés issus du Nouveau Front populaire, du socle gouvernemental et commun, et du groupe Liot.
"Cette diversité politique est à l'image de notre diversité géographique", a fait valoir le député, qui travaille sur la problématique de la désertification médicale depuis plusieurs années. Rappelant que "six millions de Français sont sans médecin traitant", et que "huit millions vivent dans un désert médical", Guillaume Garot à appelé à mettre "un coup d'arrêt" à cette situation d'inégalité croissante.
Si la situation tend à s'améliorer dans certains territoires, il s'agit essentiellement de zones qui n'étaient pas les plus en fragilité en matière de démographie médicale, a indiqué l'initiateur du groupe de travail, soulignant que dans les territoires les plus défavorisés la désertification médicale s'est, au contraire, encore aggravée. "Ce qui est en jeu, c'est notre pacte républicain", a-t-il martelé, évoquant des inégalités géographiques de plus en plus marquées.
Le droit à la santé, l'accès aux soins ne peuvent pas dépendre de notre code postal. Guillaume Garot (Socialistes)
Dénonçant un "scandale d'Etat", Yannick Favennec-Bécot (LIOT) a présenté l'un des outils figurant dans la proposition de loi, à savoir l'indicateur territorial de l'offre de soins (ITOS). Se voulant une cartographie, par bassin de vie, de la répartition de l'offre de soins, cet indicateur "à la fois innovant et exhaustif" serait mis à jour chaque année pour aiguiller les Agences régionales de santé (ARS) dans leurs prises de décisions en matière de dotation médicale.
Le texte vise, en outre, à faciliter l'intégration des PADHUE (praticiens à diplômes hors Union européenne, ndlr), à garantir l'accès à une première année de médecine dans chaque département, ou encore à développer et à consolider les centres de santé, la médecine salariée étant de plus en plus prisée par les soignants.
Mais la mesure phare de la proposition de loi réside dans la régulation de l'installation des médecins, jamais expérimentée en France. Une mesure globalement impopulaire dans le monde médical, car jugée comme remettant en cause le principe même de l'exercice de la médecine libérale, et qui n'a jusqu'à présent pas trouvé grâce aux yeux des gouvernements successifs, y compris celui de Michel Barnier. "La régulation de l'installation de nos médecins est un levier qui doit être mis en œuvre impérativement dans notre pays", estime pourtant Guillaume Garot (Socialistes) au regard de l'urgence de la situation actuelle.
L'article 1 du texte propose ainsi de créer une autorisation d'installation qui serait délivrée par les ARS. "C'est un encadrement de la liberté d'installation, le principe subsiste, il est juste question de l'aménager, de l'encadrer, pour répondre à des préoccupations d'intérêt général", fait valoir le député de la Mayenne.
Hadrien Clouet (La France insoumise) ajoutant que l'intention du législateur est de "laisser la main aux praticiens et professionnels pour s'organiser, et n'intervenir qu'à condition qu'il y ait besoin de se substituer". "Il ne faut pas partir [des besoins] des médecins, mais des patients", a cependant assumé Xavier Breton (Droite républicaine).
Autre mesure de régulation proposée par le texte : limiter à quatre ans, à l'issue des études de médecine, la possibilité d'exercer en tant que remplaçant, alors que l'intermittence est de plus en plus choisie par les praticiens. Selon les chiffres relayés par les députés, 27% des primo-inscrits à l'ordre des médecins choisissent le remplacement, avec une moyenne de 32 semaines d'activité par an.
Guillaume Garot et ses collègues du groupe de travail souhaitent que la proposition de loi puisse être débattue au cours du premier trimestre 2025, lors d'une semaine dont l'ordre du jour dépend de l'Assemblée nationale, ce qui est le cas une semaine par mois. Dans ce cas, il s'agirait du début d'un processus législatif qui pourrait se transformer en bras de fer avec le gouvernement.