Mayotte : La situation de l'île peut devenir "explosive", alerte Estelle Youssouffa

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Laurent Marcangeli (Horizons) et Estelle Youssouffa (Liot) à l'Assemblée nationale, mercredi 31 mai 2023
Laurent Marcangeli (Horizons) et Estelle Youssouffa (Liot) à l'Assemblée nationale, mercredi 31 mai 2023
par Raphaël Marchal, le Mercredi 31 mai 2023 à 16:47, mis à jour le Jeudi 1 juin 2023 à 10:12

La députée de Mayotte Estelle Youssouffa (Liot) a appelé à la fin de "l'hypocrisie" envers les Comores pour juguler l'immigration irrégulière à Mayotte. Si des "actes forts ne sont pas posés", la situation pourrait devenir "explosive", a-t-elle alerté lors de la présentation, avec Laurent Marcangeli (Horizons), d'un rapport d'information sur les enjeux migratoires.

Depuis des mois, elle alerte sur la situation à Mayotte. Ce mercredi 31 mai, lors de la remise du rapport de la mission d'information sur les enjeux migratoires aux frontières Sud de l’Union européenne et dans l’océan Indien, Estelle Youssouffa (Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires) a réitéré ses avertissements au sujet de l'île, qui subit les "effets dramatiques" de l'immigration irrégulière en provenance des Comores. Explosion de la démographie, système scolaire débordé, structures médicales embolisées, criminalité galopante, déforestation, constructions illégales, manque d'eau potable...

"Dans l'hypothèse du maintien des flux migratoires, la situation deviendra explosive", a assuré la députée devant la commission des affaires étrangères, s'appuyant sur un rapport conduit par six ministères sur l'état de Mayotte. Estelle Youssouffa a directement mis en cause la stratégie actuelle, qui consiste à intercepter les nombreux candidats à la traversée depuis les Comores, distantes de seulement 70 kilomètres. "Seule une fraction des kwassa-kwassa est interceptée, et les personnes éloignée reviennent quasi-systématiquement, parfois quelques heures après."

Des recommandations pour Mayotte

Pour tenter d'empêcher la dégradation de la situation mahoraise, la mission d'information, menée avec le président du groupe Horizons, Laurent Marcangeli, préconise plusieurs pistes de réflexion. Parmi elles, l'application à l'île de la circulaire dite "Taubira", qui vise à répartir les mineurs isolés étrangers (environ 6.000 jeunes migrants), principalement comoriens, sur l'ensemble du territoire français.

Le rapport de la mission d'information propose également de mettre en place l'aide médicale de l'État à Mayotte. Ce dispositif permet aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d'un accès aux soins, sous conditions. Mais il n'est pas applicable dans un seul territoire français : Mayotte. "Son absence a pour effet de saturer le seul hôpital de Mayotte", a déploré Estelle Youssouffa, rappelant la pénurie de soignants qui touche le département. "Il est indigne de laisser perdurer une concurrence indigne entre les étrangers en situation irrégulière et les Français."

Autre proposition : mettre fin aux restrictions territoriales qui touchent l'île. À l'heure actuelle, les étrangers en situation régulière à Mayotte doivent en effet demander un visa pour se rendre dans un autre département français ou dans l'espace Schengen. "Ces restrictions ont pour effet de fixer indéfiniment la population migrante dans notre île", a estimé la députée mahoraise. "L'État ne se donne pas les moyens d'arrêter l'immigration comorienne à Mayotte, mais n'assume pas pour autant d'en répartir la charge au reste du pays."

"L'hypocrisie" de la coopération avec les Comores 

L'élue mahoraise est également revenue sur les relations avec les Comores, au centre de l'opération Wuambushu lancée par les forces de l'ordre française à Mayotte depuis la fin du mois d'avril. Alors que cette opération a pour but d'expulser des étrangers en situation irrégulière et de détruire des bidonvilles, Moroni (capitale fédérale de l'union des Comores, ndlr) avait demandé au gouvernement français d'y renoncer, menaçant de s'opposer aux expulsions vers son territoire.

Pour Estelle Youssouffa, cette situation a mis fin à des années "d'hypocrisie de coopération avec les Comores". Et la députée de fustiger le Président comorien, Azali Assoumani, le jugeant coupable "d'ingérence" en refusant d'appliquer l'accord franco-comorien de lutte contre l'immigration clandestine. "Il faut sortir de la naïveté", a-t-elle tranché, appelant à couper le robinet des aides au développement promises dans l'accord de coopération.