Alors qu'Auchan a annoncé en fin d'année dernière un plan social menaçant 2.400 emplois en France, et ArcelorMittal la fermeture des sites de Reims et de Denain, qui emploient 135 personnes, les dirigeants des deux groupes ont été auditionnés par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, ce mercredi 22 janvier. Ces derniers les ont d'une même voix sommé de se justifier, alors que leurs entreprises bénéficient de plusieurs dispositifs d'aides publiques.
Entre déclin du "modèle de l'hypermarché" et "crise profonde" de l’aciérie industrielle, les dirigeants d'Auchan et d'ArcelorMittal ont tenté d'expliquer aux députés de la commission des affaires économiques leur incapacité partielle à enrayer la perte d'emplois dans leurs secteurs respectifs, dressant un tableau sombre de la situation.
"Nous travaillons à proposer des solutions [de reclassement] dans toutes les autres enseignes" du groupe Mulliez, a tenté de rassurer le président d’Auchan France, Guillaume Darrasse, alors que la présidente de la commission des affaires économiques, Aurélie Trouvé (La France insoumise) venait de souligner l'ampleur du plan social en cours avec pas moins de 2.400 postes supprimés. L'AFM (Association familiale Mulliez) est, outre Auchan, propriétaire de Decathlon, Leroy Merlin, Jules ou encore Kiabi.
Evoquant une "perte nette" de 350 millions d'euros en 2023, dont 236 millions pour les activités françaises de l'enseigne qu'il dirige, Guillaume Darrasse en a pointé la cause dans la fin du "modèle hypermarché", lié notamment à la concurrence des discounter et des plateformes d'achats en ligne, et à l'évolution des modes de vie.
Indiquant que sa marque s'attelait à retravailler sur son modèle d’hypermarché, en proposant plus de produits frais et une offre de textile "responsable à des prix accessibles", il a indiqué que cette mue induisait inévitablement une réduction des surfaces de vente. "Nous avons décidé de fermer des sites sur lesquels nous n’avons pas de perspective de redressement", a-t-il aussi ajouté.
Interrogé par des députés, tous bords confondus, sur les aides publiques dont a bénéficié Auchan, et qui auraient dû selon eux être garantes d'une politique d'emploi stable, Guillaume Darasse a fait valoir qu'en dépit du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et de la baisse de certaines cotisations sociales, "au même moment, la TASCOM (taxe sur les surfaces commerciales, ndlr) [avait] été augmentée". Il a, par ailleurs, argué que la grande distribution avait constitué "un régulateur d’inflation".
Evoquant les "mesures d’accompagnement" que son groupe tente de mettre en œuvre au travers de la recherche de repreneurs et de la possibilité de reclassements, le patron d'Auchan a indiqué que lors du dernier plan social qu'il avait dû mettre en place, sur 1582 emplois menacés, "seuls 83 licenciements secs" avaient été dénombrés.
Le président d’ArcelorMittal France, Alain Le Grix de la Salle, n'a pas été plus rassurant sur les perspectives de son secteur, évoquant une "crise profonde" de l’aciérie industrielle dans l’Europe entière. Crise qu'il a en partie expliquée par un phénomène structurel de surcapacités mondiales, le protectionnisme américain, l'explosion des coûts de l’énergie, ou encore la chute de la demande, en France particulièrement. Il a aussi qualifié la situation de l’acier en Europe d'"extrêmement critique".
Alors que Frédéric Weber (Rassemblement national) lui demandait s'il pouvait s'engager à ce qu'"aucune usine d'ArcelorMittal en France ne soit fermée en cette année 2025", Alain Le Grix de la Salle lui a répondu que "les sites, quels qu'ils soient, sont tous à risque aujourd'hui en Europe, et donc en France". "Je ne peux pas aujourd'hui, prendre le moindre engagement", a-t-il aussi ajouté.