Plein emploi : la réforme du RSA au centre de toutes les attentions

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Olivier Dussopt à l'Assemblée nationale, le 25 septembre 2023. LCP
Olivier Dussopt à l'Assemblée nationale, le 25 septembre 2023 (© LCP)
par Maxence Kagni, le Lundi 25 septembre 2023 à 21:30, mis à jour le Mardi 26 septembre 2023 à 10:05

Les députés ont débuté, lundi 25 septembre, l'examen en séance publique du projet de loi "pour le plein emploi", qui contient notamment un volet sur la garde des enfants de moins de trois ans et l'insertion des travailleurs en situation de handicap. Mais c'est la réforme du revenu de solidarité active (RSA), critiquée par la Nupes et défendue par Les Républicains, qui concentre toutes les attentions.

Pour le ministre du Travail, Olivier Dussopt, il s'agit d'un véritable "projet de société". L'opposition de gauche, elle, y voit un "nouveau texte de guerre sociale". Ce lundi 25 septembre, les députés ont débuté l'examen dans l'hémicycle du projet de loi "pour le plein emploi". Ce texte, adopté en juillet par le Sénat, prévoit notamment la transformation de "Pôle emploi" en "France travail". Il prévoit aussi une réforme du revenu de solidarité active (RSA) qui fait particulièrement débat.  

A la tribune de l'Assemblée nationale, Olivier Dussopt a défendu un texte dont le but est de "mettre un terme au fatalisme ambiant" en "réformant le service public de l'emploi". Vantant le bilan de la majorité en matière de baisse du chômage, le ministre du Travail, du Plein emploi et de l'Insertion, a martelé sa "conviction" : "Personne n'est inemployable." Le gouvernement souhaite donc réformer le revenu de solidarité active : "60% des allocataires sont toujours inscrits au RSA plus de cinq ans après leur première inscription", a expliqué Olivier Dussopt. "La République n'est pas quitte de son devoir de solidarité quand elle a versé 607 euros par mois à quelqu'un", a-t-il encore indiqué. 

Le texte prévoit une inscription automatique auprès du nouvel opérateur France travail pour tous les demandeurs d'emploi. De plus, ces demandeurs d'emploi signeront un "contrat d'engagement réciproque" qui, explique Olivier Dussopt, devra tenir compte de la "situation personnelle" des demandeurs d'emploi. Ces contrats pourront contenir, s'agissant en particulier des allocataires du RSA, une obligation de suivre "jusqu'à 15 à 20 heures hebdomadaires d'activités consacrées [au] parcours" du demandeur d'emploi. "Il ne s'agit ni de travail gratuit, ni de bénévolat obligatoire, mais bien d'activités d'insertion et de formation pour permettre le retour à l'emploi", a souligné le ministre. 

Plus nous aurons d'allocataires concernés par ces 15 à 20 heures, mieux ce sera. Olivier Dussopt

Le projet de loi "rénove" également le régime de sanctions des allocataires du RSA. En cas de non-respect des obligations de leur contrat d'engagement, ceux-ci pourront faire l'objet d'une suspension du versement de leurs allocations, "sans interrompre [leur] accompagnement". Une fois les engagements à nouveau respectés, les sommes dues pourront être reversées rétroactivement, dans une limite de trois mois d'allocations. Si l'allocataire continue de ne pas respecter ses obligations, alors il sera radié du RSA, "comme c'est déjà le cas aujourd'hui, comme c'est le cas depuis 1988", a précisé Olivier Dussopt.

"Parade nuptiale"

C'est ce dispositif qui a fait l'objet de toutes les attentions lundi après-midi, lors de la discussion générale sur le texte. "A quel moment vous êtes-vous dit qu'on aidait les gens en les plongeant dans la misère ?", a demandé Hadrien Clouet (La France insoumise). Le député a dénoncé un dispositif qui revient à "terroriser" les plus précaires et à "bloquer 15 heures de recherche d'emploi pour faire des ateliers gommettes ou des tests de personnalité".

D'autres députés de la Nupes ont critiqué le texte, à l'instar de Pierre Dharréville (Gauche démocrate et républicaine) qui a appelé à ne "pas lutter contre les chômeurs et les chômeuses", tandis qu'Arthur Delaporte (Socialistes) a dénoncé un texte "mal ficelé, bâclé" et "sans étude d'impact". Sophie Taillé-Polian (Ecologiste) a, pour sa part, évoqué un "projet de rationalisation des moyens". Du côté opposé de l'hémicycle, tout en estimant qu'il y avait une "nécessité absolue de légiférer sur le sujet" du chômage et de l'insertion, Victor Catteau (Rassemblement national), a cependant dénoncé un "camouflet qui vise une nouvelle fois à opprimer un peu plus nos concitoyens les moins fortunés".

Benjamin Saint-Huile (Liot) a, quant à lui, manié l'ironie en évoquant la "parade nuptiale" de la majorité vis-à-vis des députés Les Républicains : "Vous êtes condamnés à trouver avec eux une solution pour que ce texte soit voté", a-t-il estimé. Si elle veut obtenir le soutien des élus LR, la majorité devra "rompre avec cette idée que le RSA pourrait être versé (...) sans aucune contrepartie", a d'ailleurs indiqué Philippe Juvin (Les Républicains). "Le RSA, c'est l'argent des Français", a déclaré le député, qui estime que seules les personnes handicapées et les parents isolés devraient être totalement dispensés des heures d'activités obligatoires. Le groupe présidé par Olivier Marleix ne s'opposera toutefois pas à la modulation du nombre d'heures en fonction des parcours personnels, à condition que celui-ci ne puisse "jamais [être égal] à zéro".

Garde d'enfants et handicap

Le texte désigne, par ailleurs, les communes "autorités organisatrices de l’accueil du jeune enfant". Celles-ci devront, en lien avec les départements, "recenser les besoins", "accompagner les familles" mais aussi, pour les communes de plus de 3500 habitants, "planifier, au vu du recensement des besoins, le développement des modes d’accueil". Une disposition qui a pour but, selon la ministre des Solidarités et des Familles, Aurore Bergé, de venir en aide aux "160 000 personnes, et en gros 160 000 femmes, qui renoncent à l'insertion professionnelle" faute de solution de garde d'enfants. Le député Rassemblement national Jocelyn Dessigny a critiqué la mesure, qui risque selon lui de "mettre en difficulté les communes" en leur "attribuant de force une compétence supplémentaire".

Le projet de loi dispose également d'un volet sur le travail des personnes en situation de handicap : "France travail sera la porte d'entrée unique pour tous les Français en situation de handicap ou non", a précisé la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, Fadila Khattabi. "L'orientation en milieu ordinaire sera de droit et exercer son métier dans un établissement et service d'aide par le travail (Esat) sera un choix", a précisé la ministre, qui veut également "aligner les droits des travailleurs en Esat sur ceux des salariés". Le texte est inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale jusqu'en milieu de semaine prochaine. Il fera l'objet d'un vote solennel le mardi 10 octobre.