Pouvoir d'achat : Les députés ouvrent la voie à un avancement du calendrier des négociations commerciales

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Olivia Grégoire LCP 03/10/2023
La ministre déléguée chargée du Commerce, Olivia Grégoire, mardi 3 octobre 2023 (© LCP)
par Raphaël Marchal, le Mercredi 4 octobre 2023 à 05:55

Les députés de la commission des affaires économiques ont validé, mardi 3 octobre, l'avancement de la date butoir des négociations entre fournisseurs et distributeurs pour 2024, afin de répercuter au plus vite la baisse du prix des matières premières dans les rayons des supermarchés. Le texte a été décrié par les oppositions pour son manque d'ambition.

Le projet de loi "portant mesures d'urgence pour lutter contre l’inflation concernant les produits de grande consommation" a franchi une première étape, mardi 3 octobre dans la soirée. Le texte a été adopté par les députés de la commission des affaires économiques, sans changement majeur par rapport à la version gouvernementale, si ce n'est son titre.

Devant les élus, la ministre déléguée chargée du Commerce, Olivia Grégoire, a vanté les objectifs d'un texte qui, en avançant de six semaines la date butoir des négociations annuelles entre les fournisseurs et les distributeurs, doit permettre de répercuter les baisses de prix constatées et/ou attendues des matières premières et de l'énergie sur les étiquettes et les tickets de caisses. La date retenue à ce stade est ainsi fixée au 15 janvier 2024, et non au 1er mars.

"Par le passé, l'annualité a été efficace pour limiter les effets de l'inflation", a pointé Olivia Grégoire. Mais cette même annualité porte une responsabilité dans l'inflation persistante des produits de première nécessité, a jugé la ministre, qui a mis en avant la baisse des prix du blé dur, du carton et du papier. "Certaines matières premières augmentent, mais ce sont les arbres qui cachent la forêt des baisses", a-t-elle indiqué.

Une "mesurette", "une blague", "honte"

Dire que les oppositions n'ont pas fait preuve d'enthousiasme au moment d'évoquer le texte de l'exécutif serait un euphémisme. "C'est une mesurette", qui ne s'attaque pas aux "marges exorbitantes des fournisseurs et des distributeurs", a critiqué Nicolas Meizonnet (Rassemblement national). "J'ai presque honte de négocier, de grappiller ces quelques semaines", a commenté Julien Dive (Les Républicains).

"C'est une blague. On se croirait dans un nouvel épisode de 'Bruno demande'", a renchéri Mathilde Hignet (La France insoumise), en référence à la stratégie du ministre de l'Economie demandant aux entreprises qui le peuvent de faire des efforts pour soulager les Français face à l'inflation. Cette "mesurette" n'est "pas du tout à la hauteur des enjeux", a soufflé Dominique Potier (Socialistes). "Vous êtes spectateurs du marché", a cinglé Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine).

Même au sein de la majorité, quelques voix ont fait part de leurs inquiétudes. "Ça ne mange pas de pain, mais sincèrement, ce n'est pas ça qui va sauver la question de l'inflation" a, par exemple, estimé Thierry Benoît (Horizons), qui a regretté que "l'ambassadeur de la grande distribution", Michel-Edouard Leclerc, se permette de "balader" les politiques. "Si à la fin, on a des baisses, c'est qu'on aura saigné nos paysans et nos PME, et si on a des hausses, on aura voté un texte allant contre le consommateur", a appuyé son collègue Richard Ramos (Démocrate), "très inquiet".

Des ajustements à venir en séance

Si les pharmacies ont été clairement exemptées du dispositif, plusieurs débats concernant le périmètre du projet de loi ont été renvoyés à l'examen en séance. C'est le cas du seuil retenu - à l'heure actuelle, seuls les plus grands fournisseurs sont concernés par l'avancement du calendrier. Mais cette limite fait craindre une distorsion de concurrence avec les petites et moyennes entreprises, qui négocient traditionnellement avant les géants du secteur.

Même chose concernant la date butoir de l'envoi des conditions générales de vente par le fournisseur au distributeur, que la rapporteur Alexis Izard (Renaissance) souhaitait ramener au 15 novembre 2024. Pas fermée à ces évolutions, Olivia Grégoire a appelé à un travail supplémentaire d'ici à l'hémicycle. La ministre a fait la même réponse aux Républicains qui proposaient d'exonérer la filière laitière du dispositif. Elle a néanmoins rappelé qu'il serait dangereux d'introduire une rupture d'égalité dans le texte.

Enfin, Alexis Izard, ainsi que le président de la commission, Guillaume Kasbarian (Renaissance), ont appelé à avoir un débat, à plus long terme, sur le cadre de négociations annuelles, jugé trop rigide. Cette discussion n'a cependant pas vocation à se faire dans le cadre de ce projet de loi, qui sera examiné lundi prochain, 9 octobre, dans l'hémicycle.