Les députés examinent, ce jeudi 28 novembre, la proposition de loi "d'abrogation de la retraite à 64 ans", défendue par La France insoumise dans le cadre de sa journée d'initiative parlementaire. Les opposants à la réforme de 2023 dénoncent une volonté "d'obstruction" des élus du socle gouvernemental qui fustigent, quant à eux, un texte au caractère "irresponsable".
L'examen de la proposition de loi de La France insoumise visant à abroger le report de l'âge légal de la retraite à 64 ans a débuté, et, comme il fallait s'y attendre, les débats sont électriques. Le texte, adopté la semaine dernière en commission, figure au menu de la "niche parlementaire" de LFI - journée au cours de laquelle le groupe présidé par Mathilde Panot à la main sur l'ordre du jour.
La proposition de loi, qui prévoit de revenir à un âge de départ à la retraite à 62 ans avec 42 années de cotisation, vise selon son rapporteur, Ugo Bernalicis (La France insoumise), à réparer une "injustice démocratique". Les élus LFI estiment en effet que la réforme des retraites de 2023, adoptée par 49.3, a fait l'objet d'un "passage en force". "Ce jour est historique" a, quant à elle déclaré, Mathilde Panot, se félicitant que l'Assemblée nationale ait l'occasion de voter sur le fond de la réforme.
Encore faudrait-il que les députés terminent l'examen de ce texte : quelque 980 amendements ont été déposés, dont une écrasante majorité émane des groupes politiques du socle gouvernemental (l'ex-majorité présidentielle et la droite). Les députés du Nouveau Front populaire ont unanimement dénoncé une volonté "d'obstruction parlementaire", accusation qui a largement nourri les tensions dans l'hémicycle. "Vos amendements sont clownesques", a tancé Hadrien Clouet (LFI), lors d'une intervention provoquant la survenue de rappels au règlement et d'appels au calme de la présidente de séance, Naïma Moutchou (Horizons).
"Il n'y a aucune obstruction, il y a simplement une volonté de débat aujourd'hui", a rétorqué le ministre chargé du Budget, Laurent Saint-Martin. Avant de rappeler que le groupe LFI avait beau jeu de crier au loup, après avoir déposé "19 000 amendements", lors de l'examen de la réforme gouvernementale en 2023. En réponse aux accusations du NFP reprochant au "socle commun" de Michel Barnier des amendements d'empêchement, plusieurs députés, dont Jean-René Cazeneuve (Ensemble pour la République), ont exhumé des amendements fantaisistes présentés à l'époque par la gauche, à l'image de celui d'Ugo Bernalicis portant sur "la conjonction des astres, le marc de café et les entrailles de blaireau".
Au-delà du caractère de la proposition d'abrogation qualifiée d'"irresponsable" et de son coût pour les finances publiques, les ministres présents au banc du gouvernement ont pointé le soutien apporté par le texte par le groupe Socialistes. Et pour cause : le texte LFI abroge également la réforme "Touraine" promulguée en 2014, durant le quinquennat de François Hollande, qui allonge progressivement le nombre de trimestres nécessaires pour obtenir une pension à taux plein. "Le Parti socialiste voudrait détricoter quand ils ont eu le courage et la responsabilité de le faire à l'époque. C'est inouï de posture politique", a fustigé Laurent Saint-Martin.
Arthur Delaporte (Socialistes) a répondu que son groupe défendraient un amendement destiné à sortir la réforme Touraine de la proposition de loi LFI, ainsi qu'il l'avait fait sans succès en commission. En tout état de cause, que cet amendement soit adopté ou pas, les députés PS soutiendront le texte d'abrogation de la retraite à 64 ans, comme l'a indiqué leur chef de file à l'Assemblée, Boris Vallaud.
Quant au élus du Rassemblement national, ils ont confirmé par la voix de Kévin Pfeffer qu'ils joindraient leurs forces à celles du Nouveau Front populaire. Tout en épinglant l'hypocrisie de la gauche, qui n'avait pas fait de même sur le texte que le groupe de Marine Le Pen avait présenté lors de sa propre journée d'initiative parlementaire, le 31 octobre, "au seul prétexte qu'il était porté par le RN".
Les députés poursuivront ce jeudi, après-midi et soir, l'examen de la proposition de loi LFI, sans garantie aucune d'arriver à son terme et de pouvoir voter sur le texte avant la fin des débats à minuit. Si cette proposition était adoptée, il s'agirait d'une victoire politique et symbolique pour les opposants à la réforme de 2023. Le report de l'âge légal de la retraite à 64 ans serait cependant encore loin d'être abrogé. Le gouvernement et le Sénat y étant opposés, l'objectif d'abrogation paraît en effet hors de portée dans la configuration politique nationale actuelle.