Violences et inceste : le retrait automatique de l’autorité parentale adopté à l'unanimité

Actualité
Image
Isabelle Santiago (PS) à l'Assemblée, jeudi 9 février 2023
Isabelle Santiago (PS) à l'Assemblée, jeudi 9 février 2023
par Raphaël Marchal, le Vendredi 10 février 2023 à 00:00, mis à jour le Lundi 13 février 2023 à 08:10

Une proposition de loi socialiste visant à lutter contre les violences intrafamiliales a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Le texte, voté en première lecture, prévoit notamment le retrait automatique de l'autorité parentale ou de l'exercice de l'autorité parentale, en cas de condamnation pour violences intrafamiliales, sauf décision contraire et motivée du juge.

"Les violences sur les enfants ont des répercussions très graves, sur leur développement, leur scolarité, leur construction." C'est pour les protéger qu'Isabelle Santiago a présenté une proposition de loi, adoptée à l'unanimité, jeudi 9 février, dans le cadre de la journée d'initiative parlementaire du groupe Socialistes et apparentés. "400 000 enfants vivent dans un foyer où s'exercent des violences intrafamiliales", a également rappelé l'élue socialiste.

Votée en première lecture, la proposition de loi "visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et co-victimes de violences intrafamiliales" prévoit notamment le retrait automatique de l'autorité parentale ou de son exercice en cas de condamnation d'un parent pour inceste sur son enfant, ou pour un crime commis sur l'autre parent, sauf décision contraire spécialement motivée par le juge.

À l'heure actuelle, le dispositif existe déjà, mais il n'est pas automatique, car laissé à l'appréciation du juge. Et insuffisamment utilisé, a déploré Isabelle Santiago. En commission, les députés avaient réintroduit une marge de manœuvre au juge, qui pourra donc s'opposer à ce retrait s'il l'estime nécessaire. Le texte avait été intégralement réécrit, sur la base d'un travail transpartisan, en lien avec la Chancellerie. "L'office du juge doit être préservé. Il en va du respect même de notre État de droit", s'est félicité le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti.

De même, le magistrat pourra décider s'il décrète le retrait de l'exercice de l'autorité parentale - le parent ne peut plus prendre de décisions concernant la vie de son enfant - ou de la titularité de l'autorité parentale - le parent n'est même plus tenu au courant des grandes étapes de la vie de son enfant. Une gradation également saluée par le ministre de la Justice.

En outre, le juge pourra décider de la même sanction dans le cas où un parent est condamné pour un délit commis sur son enfant, ou est complice d'un crime commis sur son enfant ou sur l'autre parent.

Une suspension de plein droit

Autre axe de la proposition de loi : la suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale, dès lors qu'un parent est poursuivi, mis en examen ou condamné, même non défintivement, pour un crime commis sur l’autre parent ou pour un inceste ou un crime commis sur la personne de son enfant. Cette suspension est effective jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales ou jusqu’à la décision du jugement ou de l’arrêt pénal.

Le texte prévoit également un autre cas de suspension de l'exercice de l'autorité parentale, ainsi que des droits de visite et d'hébergement : lorsqu'un parent est poursuivi ou mis en examen pour inceste ou condamné pour violences conjugales ayant entraîné une incapacité totale de travail de 8 jours, lorsque l'enfant a été témoin des faits. "Cet article est une avancée majeure pour nos enfants", s'est félicité le garde des Sceaux.

Le texte aura un avenir assez prompt au Sénat, qui doit désormais l'examiner. Comme l'a annoncé Éric Dupond-Moretti, l'exécutif a décidé de l'inscrire à l'ordre du jour dès le 21 mars. "Un enfant meurt tous les 5 jours de violences intrafamiliales", a pointé le ministre de la Justice, qui a rappelé l'urgence à compléter la législation en vigueur en la matière.

Une seconde proposition de loi luttant contre les violences intrafamiliales adoptée

Un second texte visant à lutter contre les violences intrafamiliales a été adopté à l'unanimité jeudi soir, dans le cadre de la niche du groupe Socialistes. La proposition de loi, examinée dans le cadre de la procédure de législation en commission, vise à favoriser la délivrance des ordonnances de protection et allonger leur durée maximale. Elle a été adoptée sur le gong avec ce processus législatif qui évite un nouvel examen détaillé en séance publique. Pour favoriser son adoption, l'ensemble des groupes a accepté de renoncer aux explications de vote, cinq minutes avant l'extinction de la niche parlementaire socialiste à minuit.