Blocage des prix : l'examen d'une proposition de loi LFI prend des allures de campagne présidentielle

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La France insoumise proposait d'instaurer un blocage du prix de fruits et légumes lors d'une "crise sociale"
La France insoumise proposait d'instaurer un blocage du prix de fruits et légumes lors d'une "crise sociale" (RICCARDO MILANI / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP)
par Raphaël Marchal, le Jeudi 13 janvier 2022 à 15:35, mis à jour le Jeudi 13 janvier 2022 à 16:56

Une proposition de loi LFI instaurant un dispositif de blocage des prix des produits de première nécessité lors des "crises sociales" a été rejetée par l'Assemblée nationale. L'examen du texte a toutefois été l'occasion de confronter des éléments de programme en vue des échéances électorales de 2022, tandis que la majorité présidentielle a défendu son bilan économique.

"On me reproche de faire campagne électorale ; eh bien oui, ce n'est pas une honte de faire campagne électorale, qui plus est à l'Assemblée nationale qui est le coeur de la démocratie de ce pays." C'est un Jean-Luc Mélenchon assumant sa position de candidat déclaré à l'élection présidentielle qui est venu défendre sa proposition de loi visant à instaurer un blocage du prix de certains produits, jeudi 13 janvier, au cours de la journée d'initiative parlementaire du groupe "La France insoumise". 

Au cours des deux heures d'examen, les discussions ont débordé du cadre stricto sensu du texte pour prendre des allures de débat électoraliste, à trois mois du premier tour de l'élection présidentielle et dans un contexte de forte inflation et de tensions sur le marché de l'énergie. Premier orateur à s'exprimer, le candidat de LFI à l'élection présidentielle a ouvert le bal, dénonçant une hausse de la pauvreté sous le quinquennat d'Emmanuel Macron. "Vous refusez l'idée qu'il y ait une urgence sociale", a-t-il clamé, précisant que quelque 8 millions de Français pouvaient prétendre à l'aide alimentaire et témoignant de "l'extrême désarroi de milieux sociaux confrontés à la flambée des prix".

Autour de la défense du texte — qui propose donc de bloquer temporairement le prix de l'énergie et de cinq fruits et légumes de saison lors d'une "crise sociale" — le camp des insoumis a pu faire état de plusieurs éléments de son programme, au-delà de critiquer le bilan de la majorité sortante. C'est notamment le cas de l'augmentation du Smic à 1 400 euros nets, qui permettrait à de nombreux Français concernés de "vivre, plus que de tenter de survivre", et entraînerait mécaniquement une hausse des salaires proches de la rétribution minimale.

La défense de la majorité

En réponse aux attaques du groupe LFI, Agnès Pannier-Runacher a défendu le bilan économique du gouvernement. Baisse historique du nombre de chômeurs dans un contexte de crise, bouclier tarifaire mis en place pour répondre à la hausse des coûts de l'énergie, création d'un million d'emplois supplémentaires, défiscalisation des heures supplémentaires... Pour la ministre déléguée chargée de l'Industrie, la politique menée depuis près de cinq ans a eu des "résultats évidents". Certaines mesures ont en outre eu pour effet d'augmenter le revenu des personnes modestes qui travaillent, s'est-elle félicitée, de façon à répondre aux critiques consistant à qualifier Emmanuel Macron de "Président des riches".

Pour la ministre déléguée, les propositions insoumises auraient un effet contraire à celui promis par Jean-Luc Mélenchon, poussant à la délocalisation et appauvrissant les Français. Agnès Pannier-Runacher a également dénoncé la "démagogie" de La France insoumise : "Un jour, on parle du salaire des agriculteurs, le lendemain, on propose de bloquer le prix des fruits et légumes !"

Pas en reste, Guillaume Kasbarian (LaREM) a fustigé les mesures proposées par Jean-Luc Mélenchon, les rapprochant de celles mises en place au Venezuela. "Files d'attente monstrueuses dans les supermarchés", "marché noir prospère", "réaction en chaîne explosive" ; pour l'élu d'Eure-et-Loire, le blocage des prix ne peut décemment pas répondre à l'inflation et à ses conséquences.

Une TVA sociale

Plutôt que de revenir sur les mesures de la proposition de loi, Thierry Benoît (UDI et indépendants) a pour sa part souhaité "rouvrir le débat" sur la TVA sociale, sujet qu'il souhaite voir abordé durant la campagne présidentielle. "La TVA sociale permettrait de mettre en isolement les produits de première nécessité identifiés lors du premier confinement", a défendu le député.

Pâtes, riz, beurre, œufs, pain, lait... Autant de denrées qui pourraient être concernées. "La première recette du budget de l’État, c'est la TVA, avec plus de 129 milliards d'euros ; l'impôt sur le revenu 'plafonne' lui à 75 milliards d'euros", a rappelé Thierry Benoît. Selon lui, la crise sanitaire a eu pour effet de "fausser la concurrence", tandis que certains acteurs du marché "spéculent", entraînant une "action néfaste".

Malgré le "soutien symbolique" du groupe Socialistes et l'appui des députés communistes, aucun article de la proposition de loi n'a été adopté. Celle-ci a de facto été écartée par l'Assemblée nationale. Le débat sur le pouvoir d'achat des Français et sur l'inflation, lui, devrait revenir au cours des semaines menant à l'élection présidentielle.