Un salarié sur deux au chômage partiel, des secteurs entiers mis sur pause... La ministre du Travail a été auditionnée, mercredi, par la mission d'information de l'Assemblée nationale, sur la crise épidémique et ses conséquences. Muriel Pénicaud a décrit le fonctionnement actuel du monde du travail et les mesures prises par le gouvernement, sans pouvoir garantir que le pic de chômage partiel était atteint.
Éviter les licenciements à tout prix. C'est l'objectif que s'est fixé le gouvernement depuis le début de la crise sanitaire. Même si, de l'aveu même de Muriel Pénicaud, il sera difficile à tenir : "Il ne serait pas lucide de penser que nous n'aurons pas de demandeurs d'emploi en plus", a-t-elle reconnu mercredi à l'Assemblée nationale.
La ministre du Travail a décrit un monde du travail divisé en trois : la moitié des salariés est en chômage partiel (ou "activité partielle" en droit), un quart est présent physiquement au travail et un dernier quart se trouve en télétravail.
Chômage partiel: "10,2 millions de salariés français du secteur privé sont concernés par une demande activité partielle, c'est plus d'un salarié sur deux du privé. Cela représente 821 000 entreprises c'est-à-dire 6 entreprises sur 10", explique @murielpenicaud. #COVID19 #DirectAN pic.twitter.com/1P7wnM5JFD
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Le chiffre impressionnant de plus de 10 millions de salariés en chômage partiel pourrait n'être que provisoire et augmenter encore, même si la ministre espère que le déconfinement pourra permettre d'amorcer "rapidement la décrue" à partir du 11 mai.
Muriel Pénicaud dénombre plusieurs pans de l'économie "quasiment à l'arrêt", dont les commerces non alimentaires, la construction, l'hôtellerie et la restauration. Rares sont par exemple les chantiers encore en fonctionnement dans le pays :
Les secteurs les plus touchés ? Les commerces non alimentaires, la construction et l'hébergement-restauration. "93% des salariés de la construction sont en activité partielle. Le secteur est presque à l'arrêt", décrit @murielpenicaud #DirectAN #COVID19 pic.twitter.com/MyhzvUpzuM
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Interrogée par Éric Ciotti (LR), la ministre n'a pas confirmé l'hypothèse qui circule d'une réouverture des bars et restaurant le 15 juin. La possibilité d'une réouverture "région par région" est à l'étude.
À l'inverse, plusieurs secteurs sont en tension comme l'agriculture et l'industrie agro-alimentaire. Face à la suggestion de plusieurs députés de recourir d'urgence aux travailleurs détachés, la ministre a mis un frein à cette solution :
Travail détaché dans l'agriculture : "Il est très compliqué d'imaginer qu'à grande échelle on puisse prendre un risque épidémique en rouvrant de façon unilatérale, du côté français, des frontières qui sont extrêmement limitées", déclare @murielpenicaud. #DirectAN #COVID19 pic.twitter.com/TyUAWfIcqb
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De même, la possibilité de faire travailler davantage les salariés au-delà des 35 heures en vigueur, ouverte par la loi d'urgence sanitaire dans certaines secteurs, doit être vue comme un "ultime recours".
Alors que la réforme de l'assurance-chômage a été repoussée à plus tard, le gouvernement a décidé de faire un geste en faveur des chômeurs en fin de droits, des intermittents et des saisonniers afin de prolonger le versement de leurs indemnités.
De même, face au caractère exceptionnelle de la crise sanitaire, des démissionnaires sont également indemnisés.
Promesses d'embauche non honorées à cause du confinement : les personnes qui ont démissionné de leur précédent poste sont "prises en charge par l'assurance-chômage alors qu'en temps normal elles ne l'auraient pas été", explique @murielpenicaud. #DirectAN #COVID19 pic.twitter.com/GW1dLsaKP0
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La ministre veut croire que le temps du confinement peut aussi être mis à profit pour se former à distance, y compris à des "métiers techniques". Plus de 150 formations rémunérées sont ainsi disponibles auprès de Pôle emploi.
Mathilde Panot (La France insoumise) et Pierre Dharréville (PCF) sont montés au créneau sur la question des inspecteurs du travail, qui n'auraient pas toujours ni les moyens ni le soutien de leur hiérarchie pour protéger correctement les salariés à l'heure des gestes barrière :
.@MathildePanot : "La mission d'un inspecteur du travail est de protéger les salariés pas d'assurer la poursuite à tout prix de l'activité économique."
> @pdharreville "proteste contre la mise à pied d'Anthony Smith", inspecteur du travail de la Marne.#DirectAN #COVID19 pic.twitter.com/yc7jFRNPSj
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La ministre a récusé toute intervention du ministère ou de son administration pour limiter les contrôles et a détaillé le cas d'un inspecteur du travail de la Marne suspendu pour "plusieurs faits considérés comme fautifs" :
Inspection du travail : "Vous ne pouvez pas reprocher à la direction générale du travail de vouloir protéger les inspecteurs", répond @murielpenicaud.
> "Jamais le ministère n'a interdit ou n'interdira des interventions"#DirectAN #COVID19 pic.twitter.com/m59R8ig5Bp
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Elle a également précisé les conditions pour faire reconnaître le coronavirus comme maladie professionnelle, avec une automaticité pour les soignants et des évaluations au cas par cas pour les autres.
Muriel Pénicaud a enfin évoqué la nécessité, une fois le déconfinement entamé, de "faire évoluer les organisations du travail". La ministre a avancé l'hypothèse de mettre en oeuvre dans les entreprises des "horaires décalés" afin d'éviter que les salariés ne se croisent et pour désengorger les transports en commun aux heures de pointe.