Contrôle parental sur Internet : l'Assemblée adopte la proposition de loi

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par Ariel Guez, le Mardi 18 janvier 2022 à 19:31, mis à jour le Mardi 18 janvier 2022 à 21:47

Les députés ont voté à l'unanimité, en première lecture, la proposition de loi "visant à encourager l’usage du contrôle parental" et qui oblige les fabricants de smartphones et ordinateurs à installer un système de contrôle parental et à proposer à l’utilisateur son activation lors de la première mise en service de l’appareil.

C'est une proposition de loi issue de la majorité présidentielle et votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale mardi 18 janvier. Comme en commission des affaires culturelles début janvier, les députés ont en effet adopté par 82 voies contre 0 la proposition de loi "visant à encourager l’usage du contrôle parental sur certains équipements et services vendus en France et permettant d’accéder à Internet." Lors de la discussion générale sur le texte, le rapporteur de la proposition de loi, Bruno Studer, s'est réjouit des avancées liées à ce texte : "Nul parent ne pourra plus échapper à un message lui demandant s'il souhaite activer le contrôle parental."

Car les équipements permettant d'accéder à Internet devront désormais obligatoirement comporter un logiciel de contrôle parental. "L’activation de ce dispositif est proposée à l’utilisateur lors de la première mise en service de l’équipement", précise l'article 1er du texte de loi. Le contrôle parental est déjà largement répandu auprès des moteurs de recherche (le SafeSearch de Google filtre les contenus à caractère sexuel explicites) ou les applications (Netflix propose par exemple automatiquement, lors de chaque inscription, un compte "jeunesse" où ne sont pas proposés les films et les séries tv qui ne correspondraient pas à un jeune public - thèmes difficiles, images violentes, etc). Mais peu de parents s'en saisissent : seulement 44% ont procédé au paramétrage du smartphone de leur enfant, et 38% y ont installé un logiciel de contrôle parental, selon une enquête de médiamétrie. Des chiffres dont s'est ému dans l'hémicycle le secrétaire d'Etat en charge de l'Enfance, Adrien Taquet: 

Pour beaucoup de parents, l'installation d'un tel dispositif ne va pas de soi.

"Il ne s'agit pas d'empiéter sur le droit à vie privée des enfants, ni de basculer dans une surveillance permanente, mais bien d'inciter les parents à utiliser les dispositifs de contrôle parental, et au fur et à mesure que l'enfant grandit, passer du contrôle parental à un dialogue familial", explique Bruno Studer, reconnaissant toutefois qu'il ne faut "pas être naïfs.

"Il ne faut pas être naïfs sur les compétences technologiques de nos enfants, ni sur la précocité de leur exposition à certaines images. Reste qu'il nous revient de les protéger. Il faut se donner les moyens de rendre la rencontre avec de telles images accidentelle", estime le député La République en marche.

Un décret précisera les "fonctionnalités minimales" du dispositif

Si le texte va au bout de son parcours législatif, les parents pourront donc choisir d'activer ou non ce dispositif installé par défaut, lors de la première mise en service de l'appareil. Ordinateurs, smartphones, tablettes, télévisions, montres connectées, consoles de jeu vidéo seraient concernés, mais pas les box des opérateurs télécoms et la domotique. Les "fonctionnalités minimales" et "caractéristiques techniques" de ce contrôle parental, ainsi que "les moyens mis en œuvre par le fabricant pour faciliter l’utilisation de ce dispositif", seront précisées par décret : elles pourraient évoluer en fonction des avancées technologiques. Mais il devra être simple à manipuler.

Un amendement de La France insoumise, défendu par Muriel Ressiguier, a été adopté à l'unanimité pour préciser le cadre de ce décret : il devra être pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). "C'est une très bonne idée de solliciter l'avis de la CNIL. En raison d'un certain nombre de craintes, il est juste de saisir cette autorité indépendante. C'est une précision utile", a approuvé Bruno Studer, tout comme Cédric O, secrétaire d’État chargé du Numérique, qui a donné un avis favorable.

Pour les appareils reconditionnés, les reconditionneurs seront soumis à une obligation d’informer l’utilisateur de l’existence de dispositifs de contrôle parental. Enfin, si jamais un constructeur ne respecte pas la loi, le gouvernement pourra interdire la mise sur le marché ou ordonner le retrait ou le rappel des produits non-conformes. 


Ce contrôle parental ne sera pas automatique. À l'occasion du trentième anniversaire de la Convention internationale des droits de l'enfant, en novembre 2019 Emmanuel Macron souhaitait que le contrôle parental soit obligatoire. Dénonçant les "stéréotypes" et "la brutalité" des images pornographiques auxquelles les jeunes ont accès de plus en plus tôt, il avait appelé les opérateurs à mettre en place un contrôle parental obligatoire. Mais la construction du texte n'a pas permis de reprendre cette obligation, en raison d'obstacles juridiques. "J'ai entamé un travail de longue haleine dans la continuité de l'impulsion donnée par le président de la République. Mais au fur et à mesure des échanges et des auditions, nous sommes parvenus à proposer cette loi", a expliqué Bruno Studer dans l'Hémicycle.