Le projet de loi de "vigilance sanitaire" a été adopté, vendredi 15 octobre, par les députés de la commission des lois. Le texte vise notamment à donner la possibilité au gouvernement de recourir au passe sanitaire jusqu'au 31 juillet 2022. Contre l'avis du rapporteur et avec le soutien de l'opposition, les députés ont cependant limité, au-delà du 15 novembre, l'usage du passe sanitaire aux départements où le taux d'incidence sera supérieur à 50.
"Éviter à tout prix un nouveau départ épidémique." C'est l'objectif affiché du nouveau projet de loi de gestion de la crise sanitaire, alors que le ministre de la Santé, Olivier Véran, reconnaît que la situation est aujourd'hui loin d'être "alarmante". Venu défendre ce vendredi le projet de loi "portant diverses dispositions de vigilance sanitaire" devant la commission des lois de l'Assemblée nationale, le ministre des Solidarités et de la Santé s'est félicité de l'efficacité des outils mis progressivement en place depuis quelques mois : campagne vaccinale, régimes juridiques d'exception et usage du passe sanitaire.
Concrètement, le texte repousse l'échéance de la fin de la "période transitoire" de sortie de l'état d'urgence sanitaire dans l'hexagone, initialement prévue dans un mois, jusqu'au 31 juillet 2022. Il permet également de recourir au passe sanitaire jusqu'à cette date, si la situation l'exige. Son usage pourrait cependant être réduit à compter du 15 novembre "si les conditions épidémiques le permettent", a précisé le ministre.
Les députés ont d'ailleurs adopté, contre l'avis du rapporteur Jean-Pierre Pont (La République en marche), un amendement qui restreindrait le recours au passe sanitaire à partir de la mi-novembre, à condition que ce vote soit confirmé jusqu'à l'adoption définitive du projet de loi. Cet amendement, rédigé par Pacôme Rupin (LaREM), prévoit que le passe ne pourra être mis en œuvre que dans les départements où le taux d'incidence est "supérieur ou égal à 50 sur une durée continue d'au moins sept jours". Le maintien de la disposition lors de l'examen du texte dans l'Hémicycle, les 19 et 20 octobre, est cependant incertaine.
Quelques minutes plus tôt, l'élu avait vivement dénoncé le maintien du passe sanitaire : "Nous sommes en train de créer une accoutumance coupable au passe", avait déclaré Pacôme Rupin. Selon lui, cet outil constitue une "discrimination vis-à-vis de tout ceux qui n'ont pas l'état de santé requis par les pouvoirs publics".
Les députés ont par ailleurs avancé au 15 février 2022 la date à laquelle le gouvernement devra avoir remis un rapport sur les mesures prises en application du projet de loi. Ce document, qui devra préciser l'impact des mesures prises sur plusieurs indicateurs comme le taux de vaccination ou le taux d'incidence, pourra faire l'objet "d'un débat en commission ou en séance publique". Un second rapport devra être remis avant le 15 mai 2022.
Lors de la discussion générale, la date butoir choisie par l'exécutif a été vivement dénoncée par plusieurs députés de l'opposition. "Vous pensez vraiment que nous allons vous donner un blanc-seing pendant huit mois, sans aucun moyen de contrôle sur des mesures attentatoires aux libertés ?", s'est exclamé Antoine Savignat (LR). Le député a plaidé pour la suppression de l'état d'urgence sanitaire, actuellement appliqué dans certaines zones ultramarines, et que le projet de loi rendrait également applicable jusqu'au 31 juillet 2022.
Lamia El Aaraje (PS) a elle aussi fait part de son étonnement sur la durée de l'extension des outils prévus pour lutter contre le Covid-19, affichant son opposition au texte. Michel Zumkeller (UDI et Indépendants) a eu un raisonnement similaire, notamment en vue des échéances électorales. En cas d'élection d'un candidat "extrémiste", ce dernier disposerait directement de mesures exorbitantes de droit commun, a-t-il alerté. "Le passe sanitaire est une menace pour les libertés publiques", a pour sa part dénoncé Jean-Hugues Ratenon (LFI).
A contrario, Sophie Mette (MoDem) a tenté de désamorcer la polémique autour du passe, tout sauf une "arme liberticide", selon elle. "C'est le seul moyen de retrouver notre liberté", a abondé Pierre-Yves Bournazel (Agir ensemble).
Le projet de loi doit aussi permettre de lutter contre la fraude au passe sanitaire, en réprimant la transmission d’un passe. Le fait de proposer, de fabriquer et d'utiliser un faux sera, selon le texte, passible de 5 ans de prison et de 75 000 euros d'amende. Une fois votée, la loi permettra en outre à l'Assurance maladie de contrôler les certificats de contre-indication à la vaccination.
Au 14 octobre, 114 procédures pour fraude au passe sanitaire avaient été ouvertes, a annoncé Olivier Véran. Quelque 35 634 faux passes ont été recensés. En outre, 3 600 clients ont été verbalisés pour non-présentation du sésame dans les établissements où il est requis.