Critique du macronisme : les propos de Bruno Retailleau bousculent le socle gouvernemental

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Bruno Retailleau LCP 08/10/2024
Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, le 8 juillet 2025 (© LCP)
par Maxence Kagni, le Mercredi 23 juillet 2025 à 13:03, mis à jour le Mercredi 23 juillet 2025 à 17:15

Dans une interview donnée à Valeurs actuelles, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau affirme que le macronisme n'est "ni un mouvement ni une idéologie". Une déclaration qui a provoqué la colère du parti présidentiel Renaissance et de plusieurs ministres, dont Elisabeth Borne.

Pour Bruno Retailleau, "le macronisme s'achèvera avec Emmanuel Macron". Le ministre de l'Intérieur a donné, ce mercredi 23 juillet, une interview au magazine Valeurs actuelles. Dans ce long entretien, celui qui a été élu président des Républicains en mai dernier formule une virulente critique du macronisme, qui n'est selon lui "ni un mouvement politique ni une idéologie" car il "repose essentiellement sur un homme".

Bruno Retailleau ajoute qu'il "ne croit pas au 'en même temps"" car celui-ci "alimente l'impuissance". "Ma présence au gouvernement n'est pas une adhésion au macronisme", a encore déclaré le ministre. 

Des ministres répliquent

Des propos qui ont provoqué la colère de plusieurs de ses collègues du gouvernement : "Le macronisme est une idéologie ET un parti politique", a réagi sur X, dès mardi soir, la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, qui demande du "respect mutuel". "Le macronisme ne s'arrêtera pas. Ni aujourd'hui, ni dans deux ans, ni après", a pour sa part écrit Aurore Bergé, la ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes. 

Tenter de diviser le socle commun, c’est affaiblir les remparts contre les extrêmes ! Elisabeth Borne

"Diviser pour diviser ne constitue pas un projet", a également affirmé sur X Agnès Pannier-Runacher. La ministre de la Transition écologique a pris la défense du macronisme, qui constitue selon elle "le choix de l’action face au populisme, du rassemblement face à la division". "C’est ce qui a tenu le pays debout pendant les crises", a-t-elle ajouté. Interrogé mercredi matin sur France inter, le ministre chargé de l'Europe Benjamin Haddad, a estimé qu'il fallait "respecter là d'où on vient, l'histoire de chacun, l'identité de chacun".

Tensions au sein du socle gouvernemental

Plusieurs députés du groupe macroniste Ensemble pour la République (EPR) ont également répondu au ministre de l'Intérieur, illustrant la fragilité du socle gouvernemental, qui rassemble les groupes EPR, Les Démocrates (émanant du MoDem de François Bayrou), Horizons (soutiens d'Edouard Philippe) et Droite républicaine (émanant des Républicains).

"Si Bruno Retailleau est mal à l’aise avec le Président de la République et son mouvement politique, il peut rendre son poste au gouvernement", a réagi sur X le président de la commission des Affaires européennes, Pieyre-Alexandre Anglade. "Une Obligation de Quitter le Gouvernement vous guette Bruno Retailleau", a écrit l'ancien ministre et député de la Manche Stéphane Travert, qui estime que le ministre de l'Intérieur va "s'achever dans l'extrême droite".

"Si la macronie est en train de vivre ses dernières heures, pourquoi passe-t-il autant de temps et d'énergie à taper dessus ?", a encore demandé la députée des Hauts-de-Seine Prisca Thévenot. L'élue a rappelé sur BFMTV que "cela fait plus de 18 ans que les LR n'ont pas gagné une élection au niveau national".

Le parti Renaissance a également réagi sur X : "Ces propos sont, une fois de plus, inacceptables pour un ministre nommé par le président de la République dans un gouvernement de coalition", a écrit le mouvement macroniste, aujourd'hui dirigé par l'ancien Premier ministre Gabriel Attal.

"Respectueux de toutes les formations politiques"

"Il n'y a pas d'offenses vis-à-vis des autres partis avec lesquels nous travaillons", a répondu mercredi matin sur TF1 la porte-parole du gouvernement Sophie Primas, elle-même issue du parti Les Républicains. "Nous sommes dans un cas de figure d'assemblage entre des partis politiques qui veulent faire avancer la France", a-t-elle ajouté, précisant que les membres de la coalition gouvernementale "ne sont pas un grand tout".

A la mi-journée, Sophie Primas a affirmé lors du compte-rendu du conseil des ministres qu'"évidemment, Bruno Retailleau restera au gouvernement".

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Le député Horizons Sylvain Berrios a lui aussi pris la défense de Bruno Retailleau : "Désolé, le socle commun ce n’est pas le macronisme", a expliqué l'élu du Val-de-Marne. "Il faudra se rassembler pour gagner, mais c’est très bien que nous soyons capable d’assumer nos différences", écrit sur X le député. 

Les propos de Bruno Retailleau ont également été commentés par l'opposition : "Si M. Retailleau est ministre de l’Intérieur, c’est parce que les macronistes l’ont décidé", a affirmé mardi soir le député La France insoumise Antoine Léaument. Répondant au tweet d'Elisabeth Borne, le député Rassemblement national Sébastien Chenu a ironisé sur l'"ambiance" au gouvernement avant de suggérer à la ministre de l'Education et à son collègue de l'intérieur de "rendre les clefs".

Le ministre de l'Intérieur a réagi ce mercredi après-midi à la polémique qu'il a lui-même lancée : "Je ne vois pas ce que j'ai pu dire de nouveau que je n'aurais pas dit depuis déjà des mois", a déclaré Bruno Retailleau, en marge d'un déplacement dans le Val-d'Oise. Le ministre a également expliqué qu'il était entré dans un gouvernement d'"utilité publique" pour "éviter le pire", "le chaos à la France" et "la gauche mélenchonisée".