Débits de boisson en zone rurale : les députés adoptent, en l'encadrant, la proposition de loi de Guillaume Kasbarian

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Guillaume Kasbarian, le 10 mars 2025.
Guillaume Kasbarian, le 10 mars 2025. LCP
par Maxence Kagni, le Lundi 10 mars 2025 à 20:40, mis à jour le Lundi 10 mars 2025 à 21:15

Les députés ont adopté, en première lecture, une version modifiée de la proposition de loi "visant à simplifier l’ouverture des débits de boisson en zone rurale" portée par Guillaume Kasbarian (Ensemble pour la République). Le texte permet de faciliter l'obtention d'une licence IV dans les communes de moins de 3 500 habitants.

Guillaume Kasbarian veut redynamiser les petites communes rurales en leur permettant de rouvrir facilement des bistrots. Le député Ensemble pour la République d'Eure-et-Loir, ex-ministre de la Fonction publique et de la Simplification de l'action publique du gouvernement Barnier, a défendu dans l'hémicycle du Palais-Bourbon, ce lundi 10 mars, la proposition de loi visant à "simplifier l’ouverture des débits de boisson en zone rurale" qu'il a déposée avec ses collègues du parti présidentiel.

A la tribune de l'Assemblée nationale, l'élu a fait l'éloge de la fonction sociale des cafés, des "lieux de vie et de partage", estimant que "chaque Français doit y avoir accès, où qu'il vive". Guillaume Kasbarian a également souligné le caractère économique "essentiel" des débits de boisson, partie intégrante de "l'art de vivre à la française".

Le proposition, largement adoptée par l'Assemblée ce lundi (174 pour, 2 contre), prévoit de faciliter l'obtention d'une "licence IV" - la licence qui permet de vendre tous types d'alcools - pour l'ouverture de débits de boisson dans les communes des moins de 3 500 habitants. Les députés ont toutefois restreint les ambitions initiales du rapporteur, Guillaume Kasbarian, qui a salué une "belle avancée" tout en reconnaissant que le texte allait "créer un peu plus de complexité que ce [qu'il imaginait] au départ".

Déclin des bistrots

Avec cette proposition de loi, qui va maintenant devoir poursuivre son parcours législatif au Sénat, Guillaume Kasbarian entend enrayer le déclin "alarmant" des débits de boissons en France, qui sont passés de près de 200 000 il y a 50 ans, à moins de 35 000 en 2020. Il a notamment rappelé que deux communes sur trois sont aujourd'hui dépourvues de commerce. "Le constat est particulièrement inquiétant pour nos territoires ruraux", a commenté la ministre déléguée chargée du Commerce, Véronique Louwagie, qui a soutenu l'initiative du député Ensemble pour la République.

Plusieurs élus de gauche ont profité des débats pour évoquer la nécessité, selon eux, de redonner des moyens aux zones rurales, au-delà de la proposition de loi de Guillaume Kasbarian. "Pour revitaliser les petites communes, commencez par y ramener le service public", a ainsi déclaré Hadrien Clouet (La France insoumise).

Prendre un verre au comptoir d'un café ne doit pas devenir un privilège urbain. Guillaume Kasbarian (Ensemble pour la République)

La licence IV, ou licence de plein exercice, permet de vendre tous types d'alcools, sans limitation de titrage. Mais la loi actuelle, jugée "ancienne et obsolète" par Guillaume Kasbarian, "interdit par principe l'ouverture de nouveaux débits de boisson de 4e catégorie". 

Ainsi, un établissement souhaitant vendre de l'alcool à ses clients doit, après autorisation du préfet, acquérir une licence auprès d'un autre établissement du département, ou du département limitrophe, qui souhaite se séparer de la sienne. Résultat, les licences IV sont relativement rares et leur prix très élevé : "Ouvrir un café en zone rurale relève souvent du parcours du combattant", a donc souligné Guillaume Kasbarian

Un texte modifié

Guillaume Kasbarian proposait initialement de "pérenniser" une expérimentation de trois ans qui avait été mise en oeuvre en 2019 : le dispositif permettait l'obtention d'une licence IV dans toute commune de 3 500 habitants ne comptant aucun établissement de 4e catégorie par simple "déclaration auprès du maire".

Les députés ont souhaité donner plus de pouvoir au maire, en prévoyant que cette création de licence IV devra être autorisée par l'édile. Un autre amendement restrictif, de François Gernigon (Horizons), a été adopté : ces licences IV nouvellement créées ne pourront pas être transférées, c'est-à-dire vendues, à des établissements installés en dehors de la commune d'implantation.

Cette limitation de transfert avait été largement demandée par les députés, qui évoquaient un risque de "spéculation". Mais ce vote a mécontenté Guillaume Kasbarian, qui a regretté la création de "deux régimes différents" entre les propriétaires d'une licence IV traditionnelle et les détenteurs d'une licence IV rurale, strictement réservée au territoire de la commune. "Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?", a demandé le rapporteur. La ministre déléguée chargée du Commerce, Véronique Louwagie, a quant à elle plaidé, sans succès, pour une limitation du transfert à l'intercommunalité. 

L'Assemblée a également voté un amendement de Yannick Monnet (Gauche démocrate et républicaine), qui aura un impact sur toutes les licences IV, qu'elles aient été nouvellement créées ou non : le transfert d'une licence d'un établissement à un autre devra être autorisé par le maire de la commune d'implantation. Un choix lui aussi déploré par Guillaume Kasbarian, qui y voit "des contraintes supplémentaires pour les débits existants", et par Véronique Louwagie, qui avait prévenu que la disposition risquait de "dévaloriser les licences IV achetées dans les conditions de droit commun".

Les députés ne se sont toutefois pas contentés de restreindre le texte : ils ont prévu une nouvelle possibilité de création de licence, en adoptant un amendement d'Erwan Balanant (Les Démocrates). Ainsi, les conseils municipaux des communes de moins de 3 500 habitants qui disposent déjà d'un établissement de 4e catégorie, "notamment en périphérie", pourront délivrer une deuxième licence IV a un autre établissement afin de dynamiser les "centres-bourgs".