Les députés ont adopté, mercredi 7 mai au soir, la proposition de loi visant à "lutter contre les déserts médicaux, d’initiative transpartisane", portée par Guillaume Garot (Socialistes). Le texte, qui prévoit de réguler l'installation des médecins, va maintenant être transmis au Sénat.
L'Assemblée nationale donne son feu vert à la régulation de l'installation des médecins. Les députés ont adopté, mercredi 7 mai au soir, la proposition de loi visant à "lutter contre les déserts médicaux, d’initiative transpartisane" (99 pour, 9 contre, 10 abstentions). "Nous avons remis un peu de République dans notre organisation collective", a salué l'initiateur du texte, le député socialiste Guillaume Garot.
La proposition de loi crée une autorisation préalable à l'installation pour les médecins, qui sera délivrée par les agences régionales de santé (ARS) après un avis rendu par le conseil départemental de l'ordre compétent. Cette autorisation sera délivrée de droit dans les zones où l'offre médicale est insuffisante. En revanche, dans les zones sur-dotées, celle-ci ne sera délivrée qu'à la condition qu'un autre praticien cesse son activité, pour un départ en retraite par exemple. "Notre santé ne peut pas dépendre de notre code postal", a souligné Guillaume Garot à l'issue du scrutin.
La mesure avait été validée au début du mois d'avril par les députés, qui n'avaient pas pu terminer l'examen du texte en raison de l'embouteillage du calendrier parlementaire. Ce mercredi, l'Assemblée repris ses travaux sur le sujet, en adoptant les autres dispositions de la proposition de loi. Outre la régulation, celle-ci prévoit une formation de première année en études de médecine dans chaque département, supprime la majoration des tarifs à l'encontre des patients qui n'ont pas pu trouver de médecin traitant en raison d'une offre de soins insuffisante et rétablit la permanence des soins pour "l'ensemble des médecins libéraux et salariés".
Plusieurs députés ont fait part de leur satisfaction d'avoir adopté la proposition de loi : "Nous allons enfin contribuer à réduire dans notre pays l'inacceptable inégalité territoriale d'accès aux soins", s'est réjouit Yannick Favennec-Bécot (LIOT). "On sera fiers demain sur nos circonscriptions d'aller dire qu'au moins on a essayé", a quant à lui salué Joël Aviragnet (Socialistes).
Le ministre chargé de la Santé et de l'Accès aux soins, Yannick Neuder a "salué le travail du Parlement" tout en réaffirmant son opposition à la régulation de l'installation des médecins. Pour lui, la lutte contre les déserts médicaux sera efficace dès lors que l'on "formera plus de médecins".
Défendant le "pacte de lutte contre les déserts médicaux" récemment présenté par le Premier ministre, François Bayrou,Yannick Neuder a rappelé sa volonté de supprimer le numerus apertus, mais aussi de "rapatrier les étudiants français qui sont partis étudier à l'étranger". Le ministre a mis en avant le "principe solidarité territoriale" qu'entend instaurer le gouvernement, dès septembre prochain, en incitant les médecins à consacrer jusqu'à deux jours par mois aux territoires les plus dépourvus d'offre médicale.
Tout comme le ministre, certains députés, minoritaires, ont signifié leur opposition au texte : "Cette proposition de loi sera inefficace, réguler la pénurie ne sert à rien", a estimé Stéphanie Rist (Ensemble pour la République). "Elle ne fera qu'aggraver le déclin de la médecine libérale", a aussi dénoncé Cyrille Isaac-Sibille (Les Démocrates).
A l'issue des débats, la plupart des groupes ont majoritairement voté en faveur texte (détail à consulter ici). Les députés Ensemble pour la République présents se sont cependant partagés à égalité entre "pour" et "contre". Aucun élu Union des droites pour la République n'a pris part au scrutin. Et le Rassemblement national s'est abstenu "en espérant que les sénateurs, dans leur grande sagesse, supprimeront l'article 1 [qui régule l'installation des médecins]", a expliqué Claire Marais-Beuil (RN).
La proposition de loi doit en effet continuer son cheminement législatif au Palais du Luxembourg. Mais le texte de Guillaume Garot (Socialistes) pourrait pâtir de la concurrence d'une autre initiative portée par le sénateur Philippe Mouiller (Les Républicains). Sa proposition de loi visant à "améliorer l'accès aux soins dans les territoires" se rapproche davantage de la philosophie prônée par François Bayrou et bénéficiera de la procédure accélérée engagée par le gouvernement. Le texte, qui sera examiné dans l'hémicycle du Sénat à partir du 12 mai, pourrait donc prendre de vitesse celui qui a été voté à l'Assemblée nationale.