Pendant une quarantaine de minutes, François Bayrou a exposé ce mardi 15 avril "le diagnostic" des difficultés rencontrées par la France sur le plan budgétaire. Les orientations à venir seront proposées d'ici au 14 juillet par le gouvernement. "C'est de la survie de notre pays qu'il s'agit", a assuré le Premier ministre, qui souhaite "une prise de conscience de nos concitoyens".
Après un "comité d'alerte" sur les finances publiques, qui a réuni plusieurs membres du gouvernement, des parlementaires, des représentants d'organismes de sécurité sociale ou encore syndicaux, François Bayrou a pris la parole ce mardi 15 avril. "Il est des rendez-vous cruciaux [...], des heures de vérité décisives et celle-ci en est une", a débuté le Premier ministre peu après 11 heures. "La France joue sa crédibilité", a-t-il ajouté, poursuivant sur la situation internationale depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, puis "le renversement d'alliances" avec l'élection de Donald Trump et sa "guerre commerciale".
Pour justifier son intervention du jour, François Bayrou a expliqué que "seule une prise de conscience de nos concitoyens, la confrontation les yeux ouverts avec la vérité de notre situation, peut soutenir une action déterminée" et permettre de faire face à "la montagne de difficultés que notre pays doit affronter". "Nous devons mesurer la gravité de la situation, en écartant la peur et la tentation du découragement", a déclaré le locataire de Matignon, en évoquant un "temps de constat".
La politique de réindustrialisation doit devenir une obsession pour notre nation. François bayrou
Dans la foulée, s'appuyant sur de multiples graphiques et courbes, il a listé les difficultés auxquelles est actuellement confrontée la France. "Nous n'avons pas assez de ressources car notre pays ne produit pas assez", a déclaré François Bayrou, derrière un pupitre floqué de l'inscription "La vérité permet d'agir". A ses yeux, "la politique de retour de la production et de réindustrialisation [...] doit devenir une obsession pour notre nation", a ajouté le Premier ministre.
"Si notre production par habitant était dans la même gamme que celle de nos voisins européens, nous n'aurions pas de déficit budgétaire", a-t-il encore déclaré, déplorant aussi "un taux d'emploi plus faible" chez les jeunes et les seniors. Avant de résumer : "Nous ne produisons pas assez et nous ne travaillons pas assez."
Autre constat, la France est "le pays du monde qui dépense le plus d'argent public". "Or, l'excès de dépenses publiques ne fait pas le bonheur des peuples" et les Français "n'en ont pas pour leur argent", a ajouté le Premier ministre.
Face à ce diagnostic, François Bayrou a écarté ce qu'il estime être "deux solutions de facilité", à savoir une augmentation des prélèvements et un recours à l'emprunt, alors que le pays est déjà "au bord d'une situation de surendettement". "La facilité du surendettement est inacceptable, nous ne pourrons pas en supporter durablement la charge", a-t-il justifié, refusant de la léguer aux générations futures.
Sans rentrer dans le détail des mesures à venir, le Premier ministre a listé "quatre orientations" de l'action de son gouvernement, les "quatre voies d'ascension" himalayennes, a-t-il lancé, filant la métaphore choisie en janvier dernier lors de sa déclaration de politique générale devant le Parlement. Ainsi, en priorité, François Bayrou a évoqué "notre indépendance en matière de sécurité et de défense". "Cette question de la sécurité collective est un défi", a-t-il assuré, en annonçant "un effort supplémentaire de 3 milliards d'euros l'année prochaine".
Au refus du surendettement, deuxième de ses priorités, le chef du gouvernement ajoute "la refondation de l'action publique". Après l'inscription, noir sur blanc, des différentes missions et budgets des administrations, l'heure sera à l'évaluation. Les documents "des missions de l'Etat" seront transmis "pour appréciation aux commissions parlementaires", a-t-il indiqué.
Quatrième orientation : "la vitalité économique" de la France, qui passe, pour le Premier ministre, par "l'innovation", par "la simplification" et par "la formation aux métiers d’avenir".
Au terme d'une allocution d'une quarantaine de minutes, François Bayrou a donné un calendrier. Si en temps normal, les choses se mettent en place au mois de septembre, avant l'examen des budgets au Parlement à l'automne, "nous avons décidé d'aller plus vite, de prendre les devants", a-t-il déclaré. Ainsi, "toutes les contributions, suggestions, consultations" seront rassemblées dans les trois mois à venir. "Notre but est que ces grands choix soient proposés avant le 14 juillet", a indiqué le Premier ministre.
Assurant avoir une "conscience aigüe de la difficulté" qui se dresse devant lui, ce dernier a estimé qu'il "serait lâche et irresponsable de fermer les yeux, de pousser la poussière sous le tapis". "C'est de la survie de notre pays qu'il s'agit", a conclu François Bayrou, avant de laisser place à des prises de parole individuelles des ministres concernés.
Réduire la dépense publique de 6% d'ici 2029
"Nous voulons réduire de 6% notre dépense publique en cinq ans", sans recourir à "la tronçonneuse", a indiqué la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, après la prise de parole de François Bayrou.
Parmi les pistes évoquées, la fusion ou la suppression de certains opérateurs publics, une action contre "la très grande dérive" des arrêts maladie, la révision du mécanisme des achats publics afin de faire baisser les prix ou "la gratuité qui déresponsabilise" en matière de services publics.
"C'est autour de ces principes que nous construirons le budget" pour 2026, a poursuivi Amélie de Montchalin.