Alors que deux propositions de loi, l'une issue du groupe Renaissance, l'autre de La France insoumise, prévoient d'inscrire le droit à l'IVG dans la Constitution, Marine Le Pen a déposé un amendement visant à sanctuariser la loi Veil dans la Loi fondamentale. La présidente du groupe Rassemblement national et ses députés refusaient jusque-là de constitutionnaliser l'IVG, considérant qu'il n'était pas en danger en France.
Constitutionnaliser "le droit actuel en vigueur", inscrit dans le Code de la Santé publique, plutôt que le droit à l'IVG, c'est ce que propose Marine Le Pen, à quelques jours de l'examen dans l'hémicycle d'une proposition de loi LFI "visant à protéger et à garantir le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception", et d'un autre texte porté par Renaissance pour "garantir le droit à l’interruption volontaire de grossesse".
Dans un communiqué de presse publié mardi 22 novembre, la présidente du groupe Rassemblement national à l'Assemblée indique qu'avec sa proposition c'est "l’équilibre actuel" de la législation sur l'interruption volontaire de grossesse qui serait gravé dans le marbre de la Constitution, c'est-à-dire le droit dans ses conditions du moment, assorti d'un délai de recours fixé à 14 semaines, auquel Marine Le Pen était pourtant opposée lors de l'examen de la loi Gaillot, et d'une clause de conscience spécifique réservée au personnel soignant.
"Ces dispositions ne seraient plus modifiables, dans un sens ou un autre, que par une réforme constitutionnelle, qui devra, pour Marine Le Pen, passer par un référendum", souligne le communiqué du groupe RN. Une manière donc, d'inscrire l'IVG dans la Constitution, mais aussi d'y introduire la clause de conscience spécifique, souvent critiquée par les féministes en ce qu'elle s'avère redondante avec la clause de conscience générale, ainsi qu'une limite définitive fixée à 14 semaines pour ce qui est du délai de recours.
La proposition du Rassemblement national recoupe en partie les critiques formulées par la droite lors des examens respectifs en commission de la proposition de loi de La France insoumise et de celle portée par Renaissance. Le 9 novembre dernier, Virginie Duby-Muller (Les Républicains) avait ainsi évoqué le risque, au travers de la formulation jugée trop vague de l'article unique de la proposition de loi Renaissance, d'inscrire dans la Constitution un droit à l'avortement sans condition, et "jusqu'à la fin du terme". "La question c'est pour ou contre l'IVG inconditionnel", avait renchéri son collègue Xavier Breton.
Mardi 22 novembre, le président du groupe LR, Olivier Marleix, a pour sa part dénoncé un "mauvais plagiat", (...) d'un amendement du groupe LR déposé 8 jours avant", qui proposait d'inscrire dans la Constitution "les principes fondamentaux de la loi du 17 janvier 1975", soit, selon le groupe d'opposition, "le droit de la femme à demander l'interruption volontaire de grossesse" et "le respect de tout être humain dès le commencement de la vie".
À noter que lors du point presse hebdomadaire de son groupe, Mathilde Panot, qui porte la proposition de loi visant à constitutionnaliser le droit à l'IVG et à la contraception, a déploré "l'obstruction antidémocratique" sur les textes de la niche parlementaire LFI, avec en particulier le dépôt de "230 amendements sur l'IVG".
Concernant l'amendement spécifique du Rassemblement national, le président de la commission des lois à l'Assemblée, Sacha Houlié (Renaissance), a critiqué, lundi soir sur le plateau de LCP, "un tour de passe-passe", et "une grande hypocrisie" de la part du Rassemblement national qui chercherait avec cette proposition à cacher ses ambiguïtés sur l'IVG. Il a notamment rappelé les prises de position anti-choix de plusieurs de ses membres, dont celles de la députée du Var, Laure Lavalette.
Le Rassemblement national a déposé, lundi 21 novembre, son amendement sur la proposition de loi qui sera débattue jeudi 24 novembre dans le cadre de la journée d'initiative parlementaire réservée au groupe LFI, et le défendra à nouveau lors de l'examen du texte de la majorité dans l'hémicycle, le 28 novembre.