La France et plusieurs autres pays vont reconnaître l'Etat de Palestine, ce lundi 22 septembre, à l'ouverture de la grand-messe annuelle de l'ONU à New York, dont la réunion sera dominée par la guerre à Gaza. Cette décision d'Emmanuel Macron a été qualifiée de "faute grave" par Marine Le Pen, alors que l'appel d'Olivier Faure à pavoiser les mairies avec le drapeau palestinien fait également débat.
Comme annoncé cet été par Emmanuel Macron, c'est ce lundi 22 septembre que la France va reconnaître l'Etat de Palestine, lors de l'Assemblée générale de l'ONU à New York. Les Palestiniens "veulent une nation, ils veulent un Etat et nous ne devons pas les pousser vers le Hamas. Si nous ne leur offrons pas de perspective politique et une telle reconnaissance (...), ils seront coincés avec le Hamas comme unique solution", a justifié dimanche le Président français dans l'émission Face the Nation sur CBS. "Si nous voulons isoler le Hamas, le processus de reconnaissance et le plan de paix qui l'accompagne est une précondition", a-t-il ajouté.
Avant même la réunion annuelle de l'ONU, le Royaume-Uni, le Canada, l'Australie et le Portugal ont formellement reconnu dimanche l'Etat palestinien. Et selon la présidence française, plusieurs autres pays comme Andorre, la Belgique, le Luxembourg, Malte, ou encore Saint-Marin devraient rejoindre le mouvement aujourd'hui.
Le Président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qui doit s'exprimer aujourd'hui par vidéo, car privé de visa par les Etats-Unis, a salué les nouvelles reconnaissances comme "un pas important et nécessaire vers la concrétisation d'une paix juste et durable". Egalement très attendu, le discours du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, qui aura lieu vendredi, tout comme celui de Donald Trump, prévu mardi, alors que les Etats-Unis, principal allié d'Israël, se sont clairement opposés à ce processus de reconnaissance, jugeant que l'Autorité palestinienne n'est pas un partenaire crédible pour la paix.
Sur la scène politique française, cette reconnaissance par la France est diversement commentée. "En effectuant cette reconnaissance aujourd’hui, sans aucune condition, c’est le Hamastan et non la Palestine que reconnaît Emmanuel Macron", a fustigé sur X la cheffe de file des députés Rassemblement national, Marine Le Pen, qui y voit "un encouragement terrible pour les terroristes islamistes". C'est "une faute extrêmement grave", selon elle.
"Jamais une solution à deux Etats, qui doit rester un horizon, ne sera possible tant que les barbares du Hamas ne seront pas réduits à néant", a renchéri le président du RN, Jordan Bardella.
Le Parti socialiste, le Parti communiste français et Les Ecologistes ont, eux, participé dimanche à une manifestation à Paris pour prévenir Emmanuel Macron que la reconnaissance par la France de l'Etat de Palestine ne "suffirait pas" à mettre fin au "génocide" à Gaza. "C'est important pour nous de manifester pour dire que cette reconnaissance va dans le bon sens mais qu'elle arrive bien tardivement", a déclaré à la presse le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel. "Il va falloir faire plus", a ajouté le dirigeant communiste, en réclamant notamment que la France "mette sur la table des sanctions économiques contre l'Etat d'Israël".
En France, la question du pavoisement de certaines mairies avec le drapeau palestinien a, en outre, continué à agiter les esprits ce lundi matin. Selon le ministère de l'Intérieur, au moins 52 communes avaient hissé le drapeau à la mi-journée. Et d'autres mairies ont prévu de le faire dans la soirée. En fin de semaine dernière, le ministre du gouvernement démissionnaire, Bruno Retailleau, avait pourtant donné consigne aux préfets d'interdire les pavoisements du drapeau palestinien au nom du "principe de neutralité du service public" et de non ingérence dans la politique étrangère de la France, compétence exclusive de l'Etat, sous peine de poursuite administrative.
La bannière rouge, noire, blanche et verte a été hissée dans plusieurs villes de gauche. "Ce soir, le Président de la République annoncera à l'ONU la reconnaissance de l'Etat de Palestine. Nantes accompagne cette décision historique de la République Française en hissant, pour la journée, le drapeau palestinien", a écrit lundi matin sur X la maire PS de Nantes, Johanna Rolland, alors que le drapeau flotte déjà devant sa mairie.
Le drapeau est également arboré à Stains (Seine-Saint-Denis), où le maire Azzédine Taïbi (ex-PCF) a "procédé à la pose du drapeau palestinien, ainsi que celui du drapeau de l'ONU et de la Paix". Ou à Saint-Denis, en présence du premier secrétaire du Parti socialiste et député, Olivier Faure. "Il ne s'agit pas d'un acte militant de longue durée (...). Nous avons fait le choix de le faire sur un moment, c'est le temps de la reconnaissance de l'Etat de Palestine", a fait valoir auprès de l'AFP le maire de la commune, Mathieu Hanotin (PS).
Il devrait aussi être placé au fronton d'autres mairies de la banlieue parisienne, telles Nanterre, Bagneux, Gennevilliers, Ivry-sur-Seine ou Corbeil-Essonnes. A Malakoff, la maire PCF, Jacqueline Belhomme, avait précédé l'appel et apposé un drapeau palestinien dès vendredi, resté sur le fronton de l'hôtel de ville, malgré une injonction du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur recours du préfet des Hauts-de-Seine.
Sur France 3, le député Philippe Ballard (Rassemblement national) a accusé les municipalités ayant prévu d'arborer le drapeau palestinien de "communautarisme de bas étage". "C'est illégal", a sobrement commenté son collègue Jean-Philippe Tanguy (RN) sur le plateau de France inter.
François-Xavier Bellamy, vice-président des Républicains a aussi demandé dimanche sur BFMTV que les maires qui hissent le drapeau palestinien "soient condamnés".
Tout est parti d'une déclaration du premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, la semaine dernière. Le patron du PS avait appelé les mairies à hisser le drapeau palestinien pour "dire au monde que la France n'est pas seulement le président de la République, que la France est derrière ce geste et que nous voulons effectivement aboutir à une solution à deux Etats". Ce week-end, le député a indiqué avoir écrit à Emmanuel Macron "pour qu’il rappelle à l’ordre son ministre de l’Intérieur démissionnaire afin d’autoriser le fait que les drapeaux palestiniens soient hissés sur les mairies" ce lundi.
Interrogé par l'AFP, l'entourage d'Emmanuel Macron n'a pas souhaité faire de commentaires à ce stade. Invité lundi matin de TF1, le ministre démissionnaire des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a qualifié ces débats de "polémiques futiles". "C'est un jour historique pour la paix et je ne souhaite pas (...) qu'il puisse être instrumentalisé aux fins de polémiques politiciennes, aux fins de nous diviser dans un moment où, plus que jamais, nous avons besoin d'être unis pour être fort", a-t-il déclaré.