Le président du Rassemblement national a dévoilé les grands axes du programme de sa formation politique pour les élections législatives, lors d'une conférence de presse organisée à Paris, ce lundi 24 juin. Jordan Bardella a confirmé qu'il n'envisageait une éventuelle nomination à Matignon qu'à la condition de disposer d'une majorité absolue à l'Assemblée nationale.
Un "programme de redressement" qui a vocation à devenir "l'agenda du futur gouvernement". C'est ainsi que le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, a présenté lors d'une conférence de presse, ce lundi 24 juin à Paris, les principales mesures qu'il entend mettre en place si sa formation politique obtient la majorité absolue à l'issue des élections législatives des 30 juin et 7 juillet.
Alors que depuis le début de la campagne, ses adversaires l'accusent de reculer sur certaines propositions qui étaient jusque-là défendues par le RN, le député européen a une nouvelle fois fait la distinction entre les mesures qu'il juge "urgentes" - à savoir la relance du pouvoir d'achat, la sécurité et l'immigration - et les réformes qui seraient mises en œuvre dans un second temps.
Avant de redire qu'il n'accepterait d'être nommé à Matignon que si les électeurs lui donnent une majorité absolue à l'Assemblée nationale. "Je n'irai pas à Matignon par gloriole personnelle, pour me dire je suis allé quinze jours à Matignon et j'ai été renversé par une motion de censure", a-t-il lancé.
Premier ministre, Jordan Bardella a confirmé qu'il lancerait "un audit des comptes de la nation" afin de "faire la lumière sur les finances publiques et les dérives budgétaires sans précédent du pouvoir sortant". Prônant une forme de "réalisme" face au programme du Nouveau Front Populaire, le président du Rassemblement national propose de baisser la TVA sur "les énergies, le carburant, le fioul, le gaz et l'électricité", via un projet de loi de finances rectificative. Une mesure chiffrée à 7 milliards d'euros en 2024.
Jordan Bardella entend également "négocier rapidement une dérogation aux règles européennes de fixation des prix de l'énergie" même s'il ne souhaite pas "remettre en cause le marché européen" de l'électricité. Le président du RN a aussi réaffirmé qu'il voulait "refaire du nucléaire un élément majeur, fondamental, structurant du mix énergétique" et promet un "moratoire" sur les constructions de chantier éolien.
Le chef de file de la formation de Marine Le Pen promet "le retour de la sécurité partout" en instaurant des "peines minimales" et des "peines planchers" mais aussi en suspendant les allocations familiales "aux parents de mineurs récidivistes". Se présentant comme "un bouclier pour nos compatriotes de confession juive", il a par ailleurs mis en cause les "responsables politiques à gauche et à l'extrême gauche qui, par électoralisme, font le jeu d'un antisémitisme d'atmosphère qui se développe depuis le 7 octobre".
Suppression du droit du sol, rétablissement du délit de séjour irrégulier, éloignement "systématique" des délinquants étrangers : Jordan Bardella a énuméré les mesures qu'il tenterait de mettre en œuvre par voie législative en matière d'immigration. Il a dit son intention de "convaincre" le président de la République de la "nécessité d'organiser un référendum sur la base de l'article 11 [de la Constitution]", afin de "protéger la France d'une submersion migratoire qui n'en est qu'au début du commencement".
Le président du RN a également indiqué que les "postes les plus stratégiques de l’Etat seront réservés aux citoyens français", notamment dans les secteurs de la sécurité et de la défense, justifiant cette mesure afin "de se protéger des tentatives d'ingérence". "Est-ce qu'aujourd'hui on imagine un Franco-Russe travailler au ministère des Armées ?", a demandé le président du Rassemblement national, qui entend interdire aux citoyens binationaux l'accès à des "emplois sensibles".
Après une période de flottement, au moins sur le calendrier, en début de campagne - ce qui a servi d'argument à la coalition présidentielle et au Nouveau Front populaire contre le Rassemblement national et ses intentions réelles ou supposées - Jordan Bardella a présenté ce qu'il souhaite faire en matière de retraites. "A compter de l'automne, les Français qui ont commencé à travailler avant 20 ans et qui justifient de 40 annuités pourront partir à la retraite dès 60 ans" s'est-il engagé, voulant en substance revenir sur la réforme de l'an dernier. S'agissant des autres travailleurs, Jordan Bardella promet "une progressivité" avec "un âge légal [de départ] à 62 ans" et "un nombre d'annuités allant jusqu'à 42 années de cotisation". La mise en œuvre de cette deuxième tranche de réforme serait "déterminée après" l'audit des comptes publics voulu par le président du RN.
Pour financer son programme, Jordan Bardella envisage "des pistes d'économies à court, moyen et long terme" avec des suppressions de niches fiscales, la baisse de la contribution française au budget de l'Union européenne, ainsi qu'une hausse de la contribution des énergéticiens ou encore des "économies liées à l'immigration".
En matière de pouvoir d'achat, il propose d'exonérer de cotisations patronales, pendant cinq ans, les augmentations de salaires à hauteur de 10% maximum, jusqu'à trois fois le Smic. Parmi les autres mesures égrenées : l'instauration d'une part fiscale pleine pour le deuxième enfant, la suppression des impôts sur les héritages directs pour les familles modestes et les classes moyennes, ou encore la suppression de l'impôt sur le revenu pour les médecins et infirmiers en retraite qui reviendraient travailler.
d’exonérer de cotisations patronales les augmentations de salaires à hauteur de 10% maximum "pendant 5 ans".
Sur le plan économique, le Rassemblement national veut, en outre, lancer des "états généraux de la simplification" dès l'automne, déclarer une "pause réglementaire dans les surtranspositions européennes", "alléger les dispositions de la loi ZAN", "supprimer les contraintes posées par le DPE sur la location ou la vente de biens immobiliers" et créer un fonds souverain. Jordan Bardella a aussi annoncé sa volonté de supprimer les agences régionales de santé et promet de lutter contre "les fraudes fiscales et sociales".
Concernant l'agriculture, le président du RN a évoqué un "grand plan 'manger français' avec pour objectif d'atteindre 80% de produits français dans les cantines scolaires à l'horizon 2027". Si le Rassemblement national obtient le pouvoir, il promet également "d'interdire les importations de produits agricoles qui ne répondant pas aux standards appliqués en France" et "d'introduire un principe de responsabilité directe des distributeurs qui mettent en vente des produits non conformes à nos normes nationales".
Qualifiant le "redressement de l'école" de "chantier central", Jordan Bardella a souligné l'importance de la "maîtrise des savoirs fondamentaux" dès l'école primaire. Et il a dit son intention de "remplacer le collège unique par un collège modulaire" qui "permettra d'orienter plus tôt et plus efficacement". Il s'agirait ainsi de revenir sur la loi Haby de 1975, qui avait supprimé la distinction entre les collèges d'enseignement général et technique.
"J'entends, par ailleurs, faire de l'école un asile inviolable" a-t-il indiqué, plaidant en faveur d'une "protection fonctionnelle" à destination des membres de la communauté éducative qui auraient porté plainte pour violences, menaces ou injures. "Nous le devons aux milliers de professeurs intimidés, sous pression ou agressés chaque jour. Nous le devons également à Dominique Bernard et à Samuel Paty", a aussi déclaré Jordan Bardella.
Le vouvoiement des enseignants sera obligatoire, et l'expérimentation du port de l'uniforme sera poursuivie. Jordan Bardella
Prônant un "big bang de l'autorité", Jordan Bardella a fait part de sa volonté que "dès la rentrée, les téléphones portables [soient] interdits dans les établissements scolaires, dont les lycées", afin de faire des lieux éducatifs des "zones de sobriété numérique". Il a également évoqué des "centres spécialisés pour les élèves perturbateurs ou harceleurs (...) pour protéger à la fois les autres élèves et les enseignants" et "la suspension des allocations familiales et des bourses scolaires en cas de perturbations graves et répétées au sein des établissements scolaires". Une mesure à l'image de celle instaurée par la loi Ciotti de 2010 visant à lutter contre l'absentéisme scolaire, qui avait été abrogée lors du quinquennat de François Hollande.
Interrogé sur la guerre en Ukraine, Jordan Bardella a qualifié de "ligne rouge", "l'envoi de troupes sur le sol ukrainien", et considéré que la fourniture de matériels, en particulier de missiles longue portée, risquaient de favoriser une "co-belligérance de la France" et une "escalade" dans l'affrontement avec la Russie qu'il ne souhaite pas, tout en qualifiant le pays dirigé par Vladimir Poutine de "menace". "Je serai extrêmement vigilant aux tentatives d'ingérence de la Russie", a-t-il aussi assuré.
A propos du conflit israélo-palestinien, si Jordan Bardella a indiqué que "la solution à deux Etats", avait été historiquement soutenue par sa famille politique, il a considéré que cette option avait été "rendue caduque dans l'immédiat". "Reconnaître un Etat palestinien au moment où nous nous parlons, ce serait reconnaître le terrorisme", a-t-il estimé en référence aux attentats perpétrés par le Hamas le 7 octobre dernier.