Loi climat : vers un affichage environnemental pour mieux sensibiliser les consommateurs

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Un caddie de courses de supermarché
A woman pushes her full shopping kart as she leaves a Carrefour supermarket in Drancy, north east of Paris on April 15, 2020.
BERTRAND GUAY / AFP
par Raphaël Marchal, le Mercredi 10 mars 2021 à 00:23, mis à jour le Mercredi 10 mars 2021 à 11:28

Les députés de la commission spéciale ont adopté, mardi 9 mars, l'article 1er du projet de loi "climat et résilience", qui prévoit la mise en place d'un affichage environnemental sur certains produits et services, à titre expérimental. L'objectif est de guider les choix des consommateurs.

Au lendemain du début de leurs travaux, les députés de la commission spéciale ont achevé mardi soir l'examen de l'article 1er du projet de loi "portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets". Il vise à compléter et renforcer l'affichage environnemental.

Calqué sur le modèle du "nutri-score", ce dispositif doit permettre au consommateur de s'assurer de l'impact environnemental d'un produit. L'affichage environnemental n'est pas une nouveauté : plusieurs expérimentations, parfois d'initiative privée, sont menées en France depuis le Grenelle de l'environnement de 2009. Dernière évolution en date : la loi "relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire" du 10 février 2020 (dite loi Agec) a mis en œuvre une expérimentation de 18 mois, sur la base du volontariat, sauf pour le secteur du textile.

Des expérimentations

C'est sur cette base que le projet de loi "climat et résilience" repose. Le texte vise à compléter la loi Agec, en permettant à un consommateur de connaître précisement l'impact d'un bien ou d'un service en termes d’émissions de gaz à effet de serre, des atteintes à la biodiversité ou encore de consommation en eau, sur "l’ensemble de leur cycle de vie". Selon les secteurs, des expérimentations obligatoires seront lancées par voie réglementaire, d'une durée maximale de cinq ans.

À l'issue de ces expérimentations, dont les résultats seront rendus publics et transmis au Parlement, l'exécutif décidera pour quelles catégories de biens et de services cet affichage environnemental sera rendu obligatoire. À noter que l'affichage environnemental devra également permettre d'identifier les produits ou services ayant l'impact environnemental le plus important dans leur catégorie.

Une méthodologie en question

Lors de l'examen du texte en commission, la rapporteure sur ce sujet, Aurore Bergé (La République en marche), a justifié le caractère expérimental de la mesure afin d'affiner les critères retenus dans le calcul et la méthodologie. La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a pour sa part insisté sur la nécessité de conserver un indicateur "aussi lisible et identifiable que possible, le but étant que le consommateur puisse faire son choix". "Plus on le complexifie, moins cet affichage aura de chances de se réaliser", a complété Aurore Bergé.

Cette ligne explique le rejet de nombreuses propositions de députés de tenir compte de davantage d'éléments dans le calcul de l'impact environnemental d'un produit : critères sociaux, mode de transport, indice de réparabilité... Plus largement, les débats ont mis en lumière la complexité de mise en œuvre de la mesure. François-Michel Lambert (Libertés et territoires) a ainsi pointé, à plusieurs reprises, la nécessité de tenir compte du transport, qui influence forcément l'impact environnemental d'un produit.

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"Je me demande si on n'est pas en train de créer une usine à gaz", s'est interrogé Jean-Marie Sermier (Les Républicains). "Rentrer dans la finesse, c'est moins important. Ce que le consommateur veut, c'est avoir l'image de l'impact global", a rassuré Barbara Pompili. Parmi les élus les plus critiques, Delphine Batho (Génération écologie) a dénoncé un dispositif à la "portée normative faible", imprécis et qui n'engage finalement pas l'exécutif sur la généralisation du dispositif. "Il existe déjà tous les talents pour le mettre en place", a-t-elle ajouté, jugeant la durée de l'expérimentation retenue inutilement longue.

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La spécificité de l'alimentation et du textile

Les députés ont introduit dans le texte une spécificité portant sur le secteur agricole, alimentaire et sylvicole, en adoptant un amendement d'Aurore Bergé. Ainsi, pour les produits concernés, l'affichage environnemental devra prendre en compte davantage de critères, ce que la rapporteure a résumé sous la dénomination d'"externalités environnementales". Il s'agit, par exemple, de l'impact sur la biodiversité d'un produit ou de l'animal dont il est issu, de l'utilisation de produits phytosanitaires ou du stockage de carbone dans le sol. Ces externalités pourront être "positives", et ainsi améliorer le bilan d'un produit.

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Le textile pourrait également être soumis à un traitement particulier, du fait de son poids dans les émissions de gaz à effet de serre. Plusieurs députés, dont Nathalie Sarles (LaREM), ont plaidé pour une entrée en vigueur obligatoire rapide du dispositif, soulignant la "maturité" de la filière. Cette spécificité était déjà prévue par la loi Agec. Barbara Pompili ne s'est pas opposée à prévoir un mécanisme particulier en la matière dans le texte, afin de valider le principe d'une expérimentation courte. Une modification en ce sens pourrait être introduite lors de l'examen en séance publique.