PLFSS : la dépendance au cœur des débats, un nouveau congé "proche aidant" adopté

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Brigitte Bourguignon
par Soizic BONVARLETAriel Guez, le Vendredi 22 octobre 2021 à 17:08, mis à jour le Samedi 23 octobre 2021 à 00:37

Dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022, les députés ont voté, vendredi 22 octobre, un amendement en faveur d'un congé dédié aux proches aidants, élargi et mieux rémunéré par rapport au dispositif existant. Le principe d'un tarif plancher a également été adopté pour les aides à domicile.

Alors que le vieillissement de la population représente un défi majeur, actuel et grandissant, les députés se sont longuement penchés, lors de la deuxième journée d'examen du PLFSS dans l'Hémicycle, sur la question de la perte d'autonomie. Plusieurs leviers ont été adoptés, afin de mieux accompagner les personnes en situation de handicap, qu'il soit lié au grand âge ou à une pathologie, en agissant notamment sur des dispositifs incitatifs pour ceux qui les accompagnent.

Un congé "proche aidant" élargi et mieux indemnisé

Un amendement gouvernemental, relayé par plusieurs amendements similaires de la majorité, a été adopté à l'unanimité pour améliorer les conditions du congé de proche aidant. Ce dernier, dont l'accès est conditionné à un lien familial ou étroit avec la personne aidée, dont la perte d'autonomie doit relever "d'une particulière gravité", a été jugé peu incitatif par le gouvernement, qui a donc souhaité le réformer.

C'est ainsi que le critère de "particulière gravité" ne figurera plus parmi les conditions d'accès à ce congé, afin d’élargir l’assiette des bénéficiaires. Il pourra concerner tous les aidants des personnes nécessitant une aide régulière de la part d’un proche, en particulier les personnes âgées bénéficiaires de l’allocation personnalisée d'autonomie (APA), ainsi que des personnes invalides ou bénéficiaires de pensions d’accident du travail et de maladie professionnelle, qui ne peuvent accomplir seuls certains actes de la vie quotidienne.

Entrée en vigueur le 30 septembre 2020, l’allocation journalière du proche aidant (AJPA) indemnise les personnes ayant recours à ce congé et interrompant leur activité professionnelle pour s’occuper d’un proche. L'amendement gouvernemental propose de revaloriser cette allocation au niveau du SMIC. D'un montant actuel de 43 euros par jour pour un aidant qui est en couple, 52 euros pour une personne seule, l'allocation sera donc portée à 58 euros net.

Paul Christophe (Agir ensemble), a salué la reprise par le gouvernement d'une mesure qu'il préconisait dans son propre amendement, quand Monique Iborra (La République en marche), s'est félicitée de la "très belle unanimité de notre maison commune". Thibault Bazin (Les Républicains), tout en jugeant que la mesure allait "dans le bon sens", s'est inquiété de son impact financier, faisant valoir que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) était déjà "déficitaire". La ministre déléguée en charge de l'Autonomie a évalué le coût du dispositif à "40 millions".

La mesure a également été saluée par la gauche de l'Hémicycle, en la personne du communiste Pierre Dharréville. "Je suis d'autant plus satisfait que si j'avais moi-même déposé cet amendement, je pense qu'il n'aurait pas passé l'article 40, mais cela étant dit, c'est une bonne chose", a-t-il ainsi déclaré, faisant référence au critère d'irrecevabilité qui empêche un parlementaire de proposer une mesure qui aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique. 

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Services d'aide à domicile : l'Assemblée adopte un tarif plancher national de 22 euros par heure de prestation

Plus tôt dans la journée, les députés ont voté à l'unanimité l'article 30 du PLFSS, permettant l'instauration d'un tarif plancher national de 22 euros par heure de prestation pour les services d'aide à domicile. Une mesure saluée par l'ensemble des parlementaires, même si certains d'entre eux ne sont pas totalement convaincus, à l'image de François Ruffin (La France insoumise) qui estime que le discours de Brigitte Bourguignon, la ministre chargée du dossier, est "un catalogue de bonnes intentions." "Évidemment, qu'on est pour, mais moins de 100€ par auxiliaire de vie sociale et par an ! Il y a un fossé entre vos ambitions gigantesques et les moyens que vous mettez en place", a lancé le député. Boris Vallaud (Socialistes), a souligné que les 22 euros étaient inférieurs au coût réel, inscrit dans l'étude d'impact transmis au Parlement, de 24 euros. Un amendement, présenté par les insoumis, proposait que le montant soit discuté avec les organisations représentatives des auxiliaires de vie sociale. Il a été rejeté. 

La ministre a fait voter un amendement qui permet de mettre en place une dotation  complémentaire permettant "la coordination et la continuité des interventions d’aide, d’accompagnement et de soins sur le territoire d’intervention du service auprès de la personne accompagnée." "La montée en charge progressive représente un investissement de l’État vis-à-vis des services à domicile d’environ 500 millions d’euros supplémentaire par an d’ici à 2025 et continuera d’évoluer avec les évolutions démographiques et l’inflation jusqu’à environ 800 M€ d’ici 2030" a notamment expliqué Brigitte Bourguignon. 

Refus d'une demi-journée de deuil pour les AVS en cas de décès d'un de leurs bénéficiaires. 

Signé par Bruno Bonnell (LaREM) et François Ruffin (LFI), un amendement visait à permettre aux aides à domicile de bénéficier d'une demi-journée de deuil en cas de décès d'un de leurs bénéficiaires. La rapporteure, Caroline Janvier (LaREM), s'y est opposée. Au grand dam de Bruno Bonnell. "Je pense qu'il y a des conditions qu'on doit fixer au niveau national. L'imposer (...) me semblerait un geste [favorable]", a défendu l'élu. "Je ne juge pas de votre humanité, mais refuser pour des motifs technos juridiques d'inscrire le fait d'avoir [le droit à une demi-journée de deuil]..." a abondé François Ruffin. "Ce n'est pas à nous de le faire !" a répondu Agnès Firmin le Bodo (Agir ensemble), expliquant que c'est au niveau de l'employeur que cette décision devait être prise. L'Hémicycle est allé dans son sens en rejetant la mesure. 

Outre cette mesure, une série d'amendements, signée par des élus de tous bords et défendue par François Ruffin, visait à introduire plusieurs mesures : inciter les départements à mettre en place l'organisation du travail en "tournée" pour les aides à domicile ; mettre en place une formation qualifiante en début de carrière pour les aides à domicile ; mettre en place un tutorat pour les aides à domicile ; mettre en place un médiateur départemental… Ils ont tous été rejetés. De quoi provoquer la colère du député de La France insoumise, qui a dit avoir le sentiment d'être "renvoyé au 19ème siècle" : 

Toutefois, un amendement a été adopté avec une large majorité : contrairement à ce qui était prévu initialement, le montant du tarif plancher sera actualisé chaque année.