Programmation des finances publiques : Le projet de loi fait son retour à l'Assemblée

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par Raphaël Marchal, le Lundi 25 septembre 2023 à 19:55, mis à jour le Mardi 26 septembre 2023 à 09:03

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 est examiné en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale cette semaine. En octobre dernier, le texte avait été rejeté par les oppositions qui avaient alors mis le gouvernement en minorité. Il a été adopté lundi 25 septembre en commission et sera débattu, mercredi soir, dans l'hémicycle. 

La France va-t-elle enfin se doter d'une loi de programmation des finances publiques pour la période 2023-2027 ? Jusqu'à maintenant, le gouvernement et la majorité présidentielle se sont retrouvés dans l'impasse à l'Assemblée nationale, échouant à faire adopter ce texte qui, comme son nom l'indique, fixe le cap budgétaire du pays pour les années à venir et les moyens qui permettront de le suivre. Il prévoit notamment le retour progressif du déficit public sous la barre des 3% du PIB.

En octobre dernier, lors de la première lecture du projet de loi au Palais-Bourbon, les oppositions avaient rejeté le texte de loi, au grand dam de l'exécutif et de sa majorité. Le Sénat avait ensuite adopté une version largement modifiée du projet de loi, ce qui avait abouti à un échec en commission mixte paritaire. C'est donc en nouvelle lecture que le texte a fait son retour devant la commission des finances de l'Assemblée, ce lundi 25 septembre,. 

La question du versement de fonds européens

Devant les élus de la commission, Bruno Le Maire est venu réaffirmer l'importance du projet de loi de programmation, revu et corrigé à l'aune des dernières projections économiques. "La France est le seul pays de la zone euro à n'avoir pas adopté une trajectoire pluriannuelle des finances publiques", a déploré le ministre de l'Économie et des Finances, qui a dit craindre pour la "crédibilité" du pays.

Surtout, il a pointé le risque que certains fonds européens ne soient pas versés si le texte n'était pas adopté. Une enveloppe de près de 19 milliards d'euros au total, étalés sur 2023 et 2024. "Sans loi de programmation des finances publiques, il n'y aura pas de décaissement des aides européennes", a-t-il indiqué.

Une affirmation battue en brèche par certains élus de l'opposition. "Un pré-requis de Bruxelles reste une hypothèse concernant le versement des aides", a objecté le président de la commission, Éric Coquerel (La France insoumise), tandis que Philippe Brun (Socialistes) et Charles de Courson (Liot), ont reproché au gouvernement de faire du "chantage" à l'opposition.

En réponse, le ministre a tenu à "tordre le cou" à ce mot de chantage, le jugeant "inapproprié". "On ne fait pas de chantage devant le Parlement. Chacun prend ses responsabilités." Avant de préciser : "Selon toute vraisemblance, nous ne toucherons pas les fonds européens. [...] Est-ce qu'il y a une certitude ? Non. Mais le risque est trop élevé au vu de la situation de nos finances publiques. Il n'y a pas de chantage, mais un principe de responsabilité." Le rapporteur général du budget, Jean-René Cazeneuve (Renaissance), a lui aussi mis en garde les députés de l'opposition : "Je n'ai pas envie que la commission des finances joue avec l'argent des Français."

Une dernier avertissement de Pierre Moscovici

Pour tenter de convaincre les plus sceptiques, l'exécutif a pu compter sur le renfort de Pierre Moscovici. Ces derniers mois, le président du Haut Conseil des finances publiques n'a cessé de mettre en garde les élus sur les conséquences juridiques de l'absence d'une loi de programmation.

Auditionné ce lundi, juste avant l'examen du texte, l'ancien ministre socialiste de l'Économie a réitéré son message. "Il est indispensable que la France se dote d'une loi de programmation des finances publiques", a-t-il insisté, mettant en avant "des raisons domestiques, nationales, constitutionnelles et politiques".

Vers le premier 49.3 de la saison ?

En cas de refus des oppositions, le gouvernement a un atout à sa disposition. En fonction des intentions qui seront affichées, l'exécutif pourrait, s'il le juge nécessaire, avoir recours à l'article 49.3 de la Constitution lors de l'examen du texte dans l'hémicycle. C'est en grande partie en raison de cette éventualité que le Parlement a été convoqué en session extraordinaire  en cette fin de mois de septembre. L'utilisation de cet outil constitutionnel étant limité à une fois par session - hors textes budgétaires (projet de loi de finances et projet de loi de financement de la Sécurité sociale) - utiliser le 49.3 sur le projet de loi de programmation des finances publiques en session extraordinaire, permettrait au gouvernement de conserver cet atout pour un autre texte au cours de la session ordinaire, qui débutera début octobre.

Pour tout texte financier, "le match est quasiment joué d'avance" car les "oppositions votent contre par principe", a souligné lundi le ministre des Relations avec le Parlement, Franck Riester, au micro de Sud Radio. La Première ministre, Elisabeth Borne, devra-t-elle engager la responsabilité de son gouvernement pour la douzième fois depuis son arrivée à Matignon ? Réponse dans les prochains jours. Après son adoption en commission des finances lundi soir, le projet de loi sera soumis à l'épreuve de l'hémicycle à partir de la séance de 21h30, mercredi 27 septembre.