Projet de loi sur le numérique : "oui au pseudonymat, non à l'anonymat", défend Paul Midy

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par Léonard DERMARKARIAN, le Vendredi 6 octobre 2023 à 14:25, mis à jour le Lundi 6 novembre 2023 à 16:05

L'Assemblée nationale a adopté hier soir l'objectif - non-contraignant - de généralisation de l'identité numérique d'ici 2027. Les dispositions, contestées, pour lever l'anonymat sur Internet ont en revanche été abandonnées par le rapporteur général du texte Paul Midy (Renaissance), afin de "ne pas mettre en risque" le vote final du texte.

Faut-il lever l'anonymat sur Internet pour le rendre plus sûr ? Cette question récurrente a une nouvelle fois irrigué les débats en séance publique à l'Assemblée nationale hier soir, autour du projet de loi visant à "sécuriser et réguler l'espace numérique" (SREN).

Le texte, voté en première lecture par le Sénat au début de l'été, comporte notamment un large panel de mesures pour lutter contre l'exposition des mineurs à la pornographie, combattre le cyberharcèlement et la haine en ligne, ainsi que la désinformation et les arnaques via le numérique. 

En adoptant le principe non-contraignant de généralisation de l'identité numérique en ligne et en renonçant à des dispositions pour lever l'anonymat en ligne, les députés ont adopté une position intermédiaire, devant permettre au gouvernement et aux groupes de la majorité (Renaissance, Démocrate, Horizons) d'obtenir le soutien de groupes d'oppositions pour le vote final du texte.

Généralisation de l'identité numérique

Dans la lignée de la digitalisation et de dématérialisation des services de l'Etat opérée depuis le début des années 2010 grâce, notamment, à l'outil "France Connect", le projet de loi SREN a pour ambition de favoriser le déploiement de l'identité numérique pour sécuriser les démarches administratives.

Adopté en commission, l'article 4AC vise un déploiement de l'identité numérique à 80% de la population française en 2027, et 100% en 2030. L'article, adopté et contre lequel ont voté l'ensemble des groupes d'oppositions présents en séance, a cependant été amendé afin de rendre l'objectif non-contraignant à la suite d'inquiétudes émises notamment par le groupe Démocrate souhaitant "ne pas forcer" les Français à adopter l'identité numérique.

Abandon de mesures pour lever l'anonymat en ligne

Au terme de l'adoption de l'article 4AC prévoyant la généralisation de l'identité numérique, le rapporteur général du texte Paul Midy a pris la parole pour annoncer, comme lors de l'examen du texte en commission, le retrait des amendements relatifs à la levée de l'anonymat en ligne - un aspect ayant suscité de nombreuses critiques et soulevé de vifs débats au sein de la majorité.

Oui au pseudonymat, non à l'anonymat. Paul Midy (Renaissance)

Les amendements de Paul Midy pour lever l'anonymat en ligne, placés après l'article 4AC, ont ainsi été retirés au terme de discussions avec des groupes politiques lors d'une suspension de séance, afin de "ne pas mettre en risque" le vote final du texte, selon le rapporteur général du texte.

Plusieurs groupes d'opposition avaient en effet manifesté, depuis l'examen en commission et lors de l'ouverture des débats mercredi après-midi, leur opposition à la levée de l'anonymat, jugée "liberticide" (Rassemblement national) et ouvrant la voie à une "surveillance généralisée" d'Internet (La France insoumise).

Au-delà de ces dispositions fortement débattues, les députés ont adopté le principe d'un référentiel technique de vérification de l'âge pour accéder aux sites pornographiques en ligne et mettre en demeure les sites en cas de non-conformité de ce dernier (articles 1 et 2), ainsi que le principe d'une "information annuelle sur l’apprentissage de la citoyenneté numérique" (article 4 AA). Un amendement du groupe Renaissance transpose, à ce sujet, des mesures du récent plan interministériel de lutte contre le harcèlement à l'école et établit l'obligation d'une attestation de sensibilisation au numérique sur Pix (une plateforme d'éducation au numérique de l’Éducation nationale) pour tous les élèves terminant leur classe de 6ème à compter de septembre 2024.

D'autres amendements ont été adoptés, notamment pour interdire la promotion aux mineurs de plateformes diffusant des contenus à caractère pornographique par des influenceurs, une extension des prérogatives de la plateforme de signalement de contenus suspects ou illicites Pharos.

Après l'examen de dispositions centrées sur la protection des mineurs en ligne, l'examen du texte, prévu jusqu'à vendredi prochain, se poursuivra notamment par l'étude de dispositions relatives à la protection des consommateurs en ligne.