La séance s'est terminée dans la confusion à l'Assemblée nationale, mardi 27 mai au soir, juste avant la mise au vote d'amendements qui visaient à supprimer le dispositif "zéro artificialisation nette" des sols (ZAN). Les opposants au ZAN, en surnombre lors de l'examen du projet de loi "de simplification de la vie économique" dans le cadre duquel ils présentaient ces amendements, ont dénoncé des manœuvres "dilatoires" de la gauche destinées à repousser le scrutin au lendemain.
>>> Actualisation de l'article : à la reprise de la séance, ce mercredi 28 mai, les amendements ont été rejetés (voir l'encadré en bas de page).
Au lendemain du rejet à front renversé de la loi agricole "Duplomb", une autre confrontation tactico-politique a eu lieu dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, dans la nuit du mardi 27 à mercredi 28 mai, dans le cadre de l'examen du projet de loi "de simplification de la vie économique". A 23h50, dix minutes avant l'heure de levée de la séance, comme le prévoit le règlement du Palais-Bourbon, les députés ont abordé deux amendements identiques du Rassemblement national et de la Droite républicaine visant à revenir sur le dispositif de "zéro artificialisation nette" des sols (ZAN), cette mesure de la loi Climat et résilience de 2021 qui prévoit d'équilibrer parfaitement "artificialisation" et "renaturation" à l'horizon 2050 afin de parvenir à un solde égal à zéro.
"Une erreur monumentale" issue d'une "loi bureaucratique", a tancé Matthias Renault (RN). Comme lui, Guillaume Lepers (apparenté DR) a fustigé une mesure "ruralicide" pesant sur les maires des communes rurales. "Vous êtes à côté de vos pompes", a lancé le député du Lot-et-Garonne à la gauche de l'hémicycle. Offensifs, mais sachant que la séance touchait à sa fin, les deux élus dont les groupes étaient en surnombre ont visiblement limité la durée de leur prise de parole, afin que la mise au vote de leurs amendements puisse avoir lieu avant minuit. Quelques minutes auparavant, le gouvernement, soutenu par la gauche, avait été mis en échec dans sa volonté de supprimer un alinéa du projet de loi qui assouplissait ce même dispositif ZAN. La faute à une mobilisation assez limitée au sein de certains groupes, alors que les bancs du Rassemblement national, et dans une moindre mesure de la Droite républicaine, étaient au contraire bien garnis.
Conscients de leur potentielle infériorité numérique, les groupes de gauche ont alors effectué quatre rappels au règlement en dix minutes, demandant et obtenant une suspension de séance - de droit - à 23h55. A la reprise des débats, Ian Boucard (DR), premier signataire d'un des amendements, a dénoncé des "tentatives dilatoires" destinées à empêcher le vote, demandant que les députés achèvent l'examen de cette discussion déjà entamée avant de suspendre leurs travaux. Sébastien Chenu (RN) s'est lui aussi saisi du règlement du Palais-Bourbon pour critiquer une "distorsion du règlement intérieur pour des raisons de politique politicienne". "Il y a un accord pour ne pas faire de prolongée", leur a opposé Benjamin Lucas-Lundy (Ecologiste et social).
Le président de séance, Jérémie Iordanoff (Ecologiste et social), a finalement annoncé la levée de la séance, provoquant des protestations outrées sur la droite de l'hémicycle. "Le scrutin public n'a pas été annoncé", a-t-il fait valoir dans le tumulte. A l'issue de la séance, plusieurs élus DR et RN l'ont accusé de "partialité" sur le réseau social X.
Les députés achèveront donc leurs débats sur ces amendements ce mercredi 28 mai dans l'après-midi, juste après la séance de questions au gouvernement. La mobilisation dans les rangs des défenseurs du ZAN pourrait toutefois être bien différente, et renverser le rapport de force.
Les amendements supprimant le ZAN finalement rejetés
Les débats sur la suppression du ZAN ont repris autour de 15 heures, ce mercredi 28 mai. Les deux amendements portés par le Rassemblement national et la Droite républicaine ont finalement été assez largement rejetés à l'issue de la discussion, du fait d'une remobilisation dans les rangs de la gauche et des trois groupes de la coalition présidentielle, par 179 voix contre 127.
"Oui, il y a besoin d'ajuster, parce que la loi n'était sans doute pas faite comme il fallait pour qu'elle puisse s'appliquer. Mais jamais il ne faudra renoncer", a déclaré Marc Fesneau (Les Démocrates).
"Il est important d'émettre un signal de ras-le-bol. J'ai même un élu de chez moi qui parle des ZEM à propos des ZAN, les zones d'emmerdement maximum", a tenté de défendre Philippe Gosselin (Droite républicaine), sans succès.
"Les manœuvres dilatoires opérées par le président de séance hier ont changé le vote de l'Assemblée nationale", a fustigé Ian Boucard (Droite républicaine) à l'issue du scrutin.