Armées : une loi de programmation "de rénovation et de transformation", défend Sébastien Lecornu

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par Léonard DERMARKARIAN, le Mercredi 5 avril 2023 à 16:13, mis à jour le Vendredi 2 juin 2023 à 15:12

Au lendemain de la présentation du projet de loi de programmation militaire en Conseil des ministres, le ministre des Armées Sébastien Lecornu a présenté la LPM 2024-2030, mercredi 5 avril, devant la commission de la défense de l'Assemblée nationale. Le texte sera examiné en commission, puis dans l'hémicycle, le mois prochain. 

L'avenir de la Défense et des Armées françaises, troisième poste budgétaire de l’État, prend forme. Suite aux annonces d'Emmanuel Macron qui avait dévoilé, en janvier dernier, les grandes orientations et l'enveloppe globale de la loi programmation militaire pour les années 2024 à 2030, le projet de loi a été présenté, mardi 4 avril, en Conseil des Ministres. Dans la foulée, ce mercredi, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a été auditionné par la commission de la défense de l'Assemblée nationale. 

Exigence constitutionnelle précisée à l'article 34 de la Constitution, la loi de programmation militaire (LPM) est un texte législatif prévoyant les dépenses militaires françaises de façon pluriannuelle. 

Si la LPM 2019-2025, actuellement en vigueur, prévoyait 295 milliards d'euros de dépenses (correctement exécutées selon la Cour des comptes), la nouvelle LPM 2024-2030, disponible ici, prévoit 413 milliards d'euros de dépenses pour les Armées françaises sur la période 2024-2030. Dans les prochaines années, le budget annuel de la Défense devrait augmenter de 3 milliards par an jusqu'en 2027, puis de 4 milliards par an par la suite.

"Rénovation et transformation" des Armées

Auditionné par les députés de la commission de la défense, Sébastien Lecornu a défendu une "loi de programmation militaire de rénovation et de transformation".

Quasiment un quart (97,8 milliards d'euros) de la LPM 2024-2030 est consacré aux ressources humaines des Armées - un "défi essentiel pour les années à venir", de l'avis du ministre. C'est aussi l'analyse du rédacteur en chef de la Revue Défense nationale, Jérôme Pellistrandi (voir ici). La LPM prévoit également des investissements conséquents en matière d'infrastructures (16 milliards d'euros), en matière de maintien des conditions opérationnelles et en matière de stocks de munitions, alors qu'une récente mission parlementaire "flash" appelait à leur "reconstitution" en raison de leur "dégradation préoccupante".

Plusieurs postes de dépenses consacrent enfin les évolutions structurelles de des Armées françaises, comme la construction du porte-avions de nouvelle génération (PANG) à partir de 2025/2026 (10 milliards d'euros), ainsi que le développement des capacités en matière de drones (5 milliards d'euros, +300% par rapport à la LPM actuelle) et des capacités cyber (4 milliards d'euros).

Alors que la question des moyens budgétaires de l’État est une préoccupation constante, Sébastien Lecornu a souligné que cette LPM constituait un "effort important demandé à la Nation."

Selon le ministre des Armées, le budget prévu pour la nouvelle LPM est d'autant plus nécessaire que le ministère des Armées a, au fil du temps, été "polytraumatisé par les diminutions de crédits et les promesses de correction qui ne sont jamais intervenues", menant à une dégradation des ressources humaines, techniques et opérationnelles. Le rehaussement budgétaire mené depuis les dernières LPM et par celle en préparation représenterait une hausse de 115% en treize ans des moyens dévolus aux Armées françaises et ferait passer le budget de la Défense de 32 milliards d'euros en 2017 à 69 milliards d'euros en 2030.

Efforts budgétaires et SNU en débat

Pour autant, certains députés jugent encore insuffisant l'effort affiché par le gouvernement. Ainsi, Jean-Louis Thiériot (Les Républicains) a salué une "augmentation de budget, [...] mais pas corrélativement une augmentation de masse", tandis que Caroline Colombier (Rassemblement national) a estimé que la LPM était "déjà compromise par l'inflation."

Les critiques se sont également concentrées sur les "marches" de la LPM, image employée pour décrire la répartition des efforts sur les différentes années d'exercice budgétaire. Si la nouvelle LPM prévoit des dépenses historiques, une partie de l'effort budgétaire sera effectué après l'élection présidentielle de 2027. Plusieurs députés ont fait part de leurs craintes de voir en conséquence les montants annoncés ne pas être réalisés. En réponse, le ministre des Armées a appelé à innover dans le suivi budgétaire de la loi de programmation, appelant notamment à une "grande revoyure avant l’élection présidentielle de 2027."

Les échanges entre les députés et le ministre, rythmés par une trentaine de questions-réponses, ont permis d'aborder différents sujets : réserve des Armées, exportations d'armes, transition écologique, réindustrialisation, citoyenneté. Alors que L'Opinion a indiqué mardi que l'idée de généraliser le Service national universel (SNU) à court-terme ne serait pas concrétisée, plusieurs élus ont souhaité avoir des éclaircissements sur le sujet. Le ministre des Armées, se qualifiant de "militant du SNU [...] afin de prendre le meilleur de l'école et des Armées", a défendu son absence dans le texte, notamment pour des raisons de cohérence budgétaire et de "lisibilité démocratique".

Un examen du texte à l'Assemblée en mai

Après cette audition marquant le coup d'envoi des débats sur la LPM par le Parlement, le président de la commission de la défense et des forces armées, Thomas Gassilloud (Renaissance), ainsi que le rapporteur du texte, Jean-Michel Jacques (Renaissance), ont tenu une conférence de presse au cours de laquelle ils ont salué un "projet de loi positif", selon les mots du rapporteur.

Thomas Gassilloud a annoncé "une bonne vingtaine d'auditions" avec les acteurs du secteur pour préparer l'étude du texte. Les états-majors des quatre Armées (Air, Terre, Marine, cyber) seront notamment invités, tout comme des représentants de la Direction générale de l'Armement (DGA) ou des acteurs de la Base industrielle et technologique de défense (BITD).

Selon nos informations, la LPM sera examinée à partir du 9 mai en commission, puis à partir du 22 mai dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. L'exécutif envisageant la date symbolique du 14 juillet pour la promulgation de la loi, lorsque celle-ci aura été adopté par le Parlement.