Assemblée nationale : 17 futurs ex-ministres élus députés, mais encore bloqués au gouvernement

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Gabriel Attal et Gérald Darmanin
Gabriel Attal et Gérald Darmanin
par Raphaël Marchal, le Mercredi 10 juillet 2024 à 14:50, mis à jour le Jeudi 11 juillet 2024 à 14:20

Dix-sept ministres ont été élus ou réélus à l'Assemblée nationale, lors des législatives anticipées. Mais Emmanuel Macron ayant, à ce stade, refusé la démission de Gabriel Attal et de son gouvernement, ils sont à la fois ministres en sursis et pas encore pleinement députés, ce qui les empêche pour l'instant de jouer pleinement leur rôle dans la nouvelle Assemblée. 

C'est une situation complexe, qui pourrait peser dans la mise en place de la nouvelle Assemblée nationale et de ses instances. Pas moins de 17 ministres ont été élus - et, pour la plupart, réélus - lors des élections législatives anticipées. Parmi eux figurent notamment le Premier ministre, Gabriel Attal, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, ou encore la porte-parole du gouvernement, Prisca Thévenot.

Les fonctions de membre du gouvernement sont incompatibles avec l'exercice de tout mandat parlementaire. Article 23 de la Constitution

Ce succès politique les place toutefois dans l'embarras, alors que les instances qui permettent à l'Assemblée nationale de fonctionner (présidence du Palais-Bourbon, Bureau de l'institution, commissions permanentes), ainsi que les groupes politiques, se mettront en place à partir du 18 juillet et que les discussions ont déjà commencé en coulisses. 

Ministres affaiblis...

Comme le prévoit la Constitution, il est en effet impossible de cumuler une fonction ministérielle et un mandat parlementaire. Le président de la République ayant, à ce stade, refusé la démission de Gabriel Attal et de son gouvernement, les ministres-députés sont... à la fois ministres en sursis et pas encore pleinement députés, ce qui les empêche pour l'instant de jouer un rôle dans la nouvelle Assemblée. 

Côté gouvernement, ils peuvent exercer leurs fonctions sur le plan juridique, mais avec une marge de manœuvre limitée sur le plan politique, puisque la coalition présidentielle ne dispose plus d'une majorité, même relative, au Palais-Bourbon. 

...Et députés impuissants

Le refus de la démission de Gabriel Attal par Emmanuel Macron a un autre impact : tant que le gouvernement n'est pas démissionnaire, les ministres élus députés - compte tenu du régime d'incompatibilité entre la fonction et le mandat (article LO153 du code électoral) - ne peuvent participer à aucun scrutin à l'Assemblée, de même qu'ils ne peuvent briguer aucun poste au sein de ses instances

Or, l'élection à la présidence de l'Assemblée nationale aura lieu la semaine prochaine, jeudi 18 juillet. Puis suivront, la composition du Bureau de l'institution et la mise en place des commissions permanentes (lois, finances, etc.). 

le député membre du gouvernement ne peut prendre part à aucun scrutin et ne peut percevoir aucune indemnité en tant que parlementaire. L'incompatibilité ne prend pas effet si le gouvernement est démissionnaire avant l'expiration dudit délai. Article LO153 du code électoral

Outre l'impossibilité pour les ministres-députés de jouer un rôle au Palais-Bourbon en l'état actuel de leur situation, celle-ci - si elle se prolonge - risque de priver la coalition présidentielle de 17 voix lors de cette période stratégique dans une Assemblée divisée en trois blocs et dans laquelle chaque voix comptera. Ce n'est en effet qu'à l'expiration d'un délai d'un mois après les législatives, c'est-à-dire le 8 août, que les ministres qui seraient encore membres du gouvernement seront remplacés par leurs suppléants en tant que députés. 

La donne changera cependant si, d'ici-là, le Premier ministre présente à nouveau la démission de son gouvernement et qu'elle est acceptée par Emmanuel Macron. Dans ce cas, les ministres ne seraient plus chargés que d'expédier les affaires courantes et l'incompatibilité serait levée

Parallèlement aux instances du Palais-Bourbon, les groupes politiques ont jusqu'au 18 juillet, à 18 heures, pour finaliser la liste des leurs députés et élire leurs présidents respectifs. Certains présidents, qui l'étaient déjà sous la précédente législature ont déjà été reconduits : Mathilde Panot (La France insoumise) et Laurent Marcangeli (Horizons) mardi 9 juillet, ainsi que Marine Le Pen (Rassemblement national) ce mercredi 10 juillet. Pour d'autres groupes, les noms de membres du gouvernement circulent : Gabriel Attal et Gérald Darmanin pour prendre la tête de tout ou partie des députés Renaissance, ou encore Marc Fesneau pour être le chef de file des députés MoDem. En la matière, rien ne les empêche de se positionner et de participer aux discussions, voire aux décisions internes. Sans savoir cependant s'ils seront, ou pas, libérés de l'incompatibilité liée à leurs fonctions ministérielles et donc en capacité d'exercer la présidence d'un groupe dès la semaine prochaine.