Budget 2024 : début d'examen en commission marqué par de premiers revers pour le gouvernement

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par Soizic BONVARLET, le Mardi 10 octobre 2023 à 21:27, mis à jour le Lundi 16 octobre 2023 à 16:31

Après l'audition des ministres Bruno Le Maire et Thomas Cazenave le 27 septembre, la commission des finances de l'Assemblée nationale a amorcé l'examen des articles du projet de loi de finances pour 2024, mardi 10 octobre en fin de journée. Alors que l'article liminaire du texte a été rejeté, les députés ont adopté des amendements contre l'avis du rapporteur général proposant une indexation différenciée de l’impôt sur le revenu et l'instauration d'un impôt universel.

C'est un examen qui s'annonce déjà semé d'embûches pour le gouvernement, qui ne dispose que d'une majorité relative à l'Assemblée nationale. Un handicap particulièrement important lorsqu'il s'agit du budget de l'Etat puisque voter "pour" ou "contre" marque traditionnellement l'appartenance à la majorité ou à l'opposition.

Illustration dès le début de l'examen de la partie recettes du projet de loi de finances pour 2024, en commission, mardi 10 octobre en fin de journée : les oppositions ont retoqué l'article liminaire, avant de voter en faveur d'amendements contre l'avis du rapporteur général, Jean-René Cazeneuve (Renaissance).

Le président de la commission des finances, Eric Coquerel (La France insoumise) avait dans son propos introductif indiqué que 3024 amendements avaient été déposés en commission, et que 2400 avaient été retenus après être passés au crible de la recevabilité, contre 1172 l’an dernier, soit un peu plus du double.

L'article liminaire rejeté

Comme l'an passé, les députés ont repoussé l'article liminaire du projet de loi de finances, qui illustre sous la forme d'un tableau de synthèse l'évolution des soldes structurel et effectifs de l'ensemble des administrations publiques. Ces prévisions indiquent notamment que le déficit public en 2024 diminuerait par rapport à 2023 pour s’établir à 4,4 % du PIB.

"Je suis quand même assez surpris que votent ensemble des gens qui ont un avis divergent sur ces trajectoires", a déclaré Jean-René Cazeneuve suite au rejet de l'article, Rassemblement national, les groupes de la Nupes et Les Républicains ayant voté de concert.

Des amendements de "justice fiscale" approuvés

Et les choses se compliquent encore un peu plus lorsque des députés de la majorité veulent eux-mêmes amender le budget préparé par le gouvernement... Ainsi, Pascal Lecamp (Démocrate) a présenté un amendement qu'il a qualifié de "justice fiscale", afin de substituer à une indexation sur l’inflation "linéaire", une indexation "différenciée" de l’impôt sur le revenu. Qualifiant le dispositif de "petit coup de pouce pour les classes moyennes", le député dont le groupe fait partie de la majorité présidentielle a proposé de "surindexer la première tranche à 5,6%, de conserver une indexation sur l’inflation pour la deuxième, et de ne pas indexer du tout les deux autres", ciblant ainsi l'effort budgétaire de soutien de l’Etat en direction des contribuables les plus modestes et des classes moyennes, au détriment des plus hauts revenus.

Si la mesure a séduit la Nupes, Eric Coquerel allant jusqu'à qualifier l'amendement d'"excellent", elle a également convaincu Les Républicains. Dans son exposé, Pascal Lecamp avait tenu à souligner que le dispositif représentait "environ 100 millions d’euros en moins de dépenses budgétaires".

Autre amendement adopté contre l'avis du rapporteur général, cette fois présenté par Eric Coquerel, celui instaurant un "impôt universel", inspiré par le rapport de la mission d'information sur le même sujet conduite par le député de La France insoumise avec le président du groupe démocrate, Jean-Paul Matteï, en 2019. Le président de la commission des finances, soutenu par son ancien co-rapporteur, a expliqué que la mesure proposée permettait de "ne cibler que nos concitoyens qui, a priori, ne partent très certainement à l'étranger que pour des raisons d'évasion et d'optimisation fiscales", et ne concernerait "que les pays qui font une fiscalité privilégiée inférieure à la France de 50%".

Un avant-goût des débats qui auront lieu dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale à partir du mardi 17 octobre. Plus tôt dans la journée de mardi, lors d'une conférence de presse, le président du groupe Renaissance, Sylvain Maillard, avait défendu un budget "protecteur" et "responsable", entre lutte contre l'inflation et redressement des finances publiques. Mais à l'évidence, comme l'an dernier, l'examen du projet de loi de finances ne sera pas un long fleuve tranquille pour le gouvernement.