Commission d'enquête sur le contrôle par l'Etat des violences à l'école : "L'objectif, protéger les enfants et éviter d'autres Bétharram"

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Fatiha Keloua Hachi, Paul Vannier et Violette Spillebout, le 12 mars 2025.
Fatiha Keloua Hachi, Paul Vannier et Violette Spillebout, le 12 mars 2025.
par Anne-Charlotte Dusseaulx, le Mercredi 12 mars 2025 à 18:23, mis à jour le Mercredi 12 mars 2025 à 18:37

La commission des affaires culturelles et de l'éducation, dotée des pouvoirs d'une commission d'enquête sur "les modalités du contrôle par l'Etat et de la prévention des violences dans les établissements scolaires publics et privés", débutera ses auditions la semaine prochaine et veut notamment entendre François Bayrou au cours de ses travaux qui se termineront en juin. 

"C'est absolument exceptionnel, ce n'est jamais arrivé". Pour la première fois, la commission des affaires culturelles et de l'éducation s'est dotée des prérogatives d'une commission d'enquête. Une possibilité aussi utilisée, récemment, par la commission des finances pour enquêter sur le dérapage du déficit public. "Nous allons pleinement nous en saisir", a déclaré Fatiha Keloua Hachi (Socialistes), qui préside la commission des affaires culturelles, ce mercredi 12 mars, lors de la présentation du périmètre des travaux à venir.

"Notre objectif est d'empêcher d'autres Bétharram, d'empêcher que des enfants soient victimes de violences physiques, psychologiques, sexuelles" dans des établissements scolaires "quel que soit leur statut", public, privé sous contrat ou privé hors contrat, a indiqué le co-rapporteur de la commission d'enquête, Paul Vannier (La France insoumise). 

"On ne peut pas s'habituer à ce qu'on lit, (...) à la violence qui n'est pas admissible et qui a détruit des vies. Nous savons que nous avons un rôle important", a complété l'autre co-rapporteure Violette Spillebout (Ensemble pour la République). Derrière Notre-Dame de Bétharram, cet établissement catholique situé dans les Pyrénées-Atlantiques qui fait la une de l'actualité ces dernières semaines, "il y a d'autres écoles qui ont le même système avec une omerta entretenue par un silence complice, volontairement ou non, d'un certain nombre d'institutions", a déclaré l'élue du Nord, citant l'histoire du village pour enfants de Riaumont, à Liévin (Pas-de-Calais). "En partant de Bétharram, nous allons élargir la focale", a renchéri Paul Vannier.

Les auditions débuteront le 20 mars

Cette commission d'enquête se déroulera en trois temps : d'abord l'écoute des victimes, puis l'audition des administrations de l'Etat, des institutions religieuses, de chercheurs, et enfin l'audition de responsables politiques, ministres actuels et passés. 

C'est Alain Esquerre, à l'origine du collectif des victimes de Bétharram, qui sera le premier auditionné, jeudi 20 mars. "C'est très important symboliquement qu'il débute les auditions", estime Paul Vannier et "très important" de partir des témoignages des victimes, juge Violette Spillebout. Egalement auditionnés ce jour, d'autres collectifs de victimes, la commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Civise) et Jean-Marc Sauvé, qui a présidé la commission sur les abus sexuels dans l'Eglise.

Ils ne peuvent s'y soustraire. Bien sûr que François Bayrou et Elisabeth Borne seront auditionnés. Fatiha Keloua Hachi (Socialistes), présidente de la commission

La commission entend aussi poser la question des responsabilités politiques, notamment concernant Bétharram. "Nous auditionnerons François Bayrou qui comme ministre de l'Education nationale entre 1993 et 1997, mais aussi comme président du Conseil départemental [des Pyrénées-Atlantiques] pourra probablement éclairer nos travaux", a rapidement indiqué Paul Vannier, pour qui "Bayrou savait" ce qu'il se passait dans cet établissement.

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Outre le Premier ministre, l'actuelle ministre de l'Education nationale, Elisabeth Borne, sera également entendue. L'un comme l'autre pourraient-ils refuser ces convocations ? "Ils ne peuvent s'y soustraire. Bien sûr que François Bayrou et Elisabeth Borne seront auditionnés", a indiqué Fatiha Keloua Hachi.

Toutes les auditions seront publiques, sauf en cas d'auditions de mineurs ou si une victime fait la demande d'un huis clos. 

Des conclusions attendues fin juin

Les conclusions des travaux de la commission seront rendus à la fin du mois de juin, ont annoncé mercredi la présidente et les deux co-rapporteurs. "Il y a beaucoup à faire dans un temps bref", a reconnu Paul Vannier, affirmant que leur "détermination est totale" face à ce "défi". Parmi les principaux points à investiguer : la manière dont sont contrôlés les établissements, notamment ceux privés sous contrat. "On ne cherche pas à identifier des agresseurs, (...) mais à diagnostiquer des défaillances dans le contrôle à Bétharram et ailleurs", a précisé le député insoumis, tout en notant que "la question des internats va être une grande question". La commission d'enquête n'ayant pas vocation - et pas le droit - de se substituer à la justice - a rappelé  Fatiha Keloua Hachi.

Cette commission d'enquête va forcément avoir des conséquences. Violette Spillebout, co-rapporteure

"Nous n'avons pas de freins" a souligné Violette Spillebout, pour qui "cette commission d'enquête va forcément avoir des conséquences". Les députés jugeront, au terme de leurs travaux, s'ils jugent nécessaire de déposer une proposition de loi pour "corriger des dysfonctionnements" dans les modalités de contrôle de l'Etat.