L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) préconise dans un rapport, rendu public mardi 6 juillet, de mettre en place des campagnes de vaccination dans le cadre scolaire à partir de l’automne 2021.
Vacciner, vacciner et encore vacciner. Alors que l'hypothèse d'une quatrième vague épidémique prend chaque jour un peu plus d'épaisseur, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) présente mardi un nouveau rapport sur la lutte contre l'épidémie de Covid-19. Si le gouvernement envisage de rendre obligatoire la vaccination chez les soignants, l'Opecst, lui, propose de l'accélérer chez les adolescents en organisant une campagne vaccinale dans le cadre scolaire à l'automne 2021.
Composé de 18 députés et de 18 sénateurs, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) a pour mission "d’informer le Parlement des conséquences des choix de caractère scientifique et technologique afin, notamment, d’éclairer ses décisions". Après un premier rapport sur la Covid-19 rendu le 15 décembre 2020, l'Opecst formule de nouvelles recommandations dans un document rédigé par les députés Jean-François Eliaou (La République en marche) et Gérard Leseul (Socialistes) et par les sénatrices Florence Lassarade (Les Républicains) et Sonia de La Provôté (Union centriste).
Dans leur rapport, les parlementaires proposent d'"encourager la vaccination des adultes", notamment des personnes les "plus à risque". Mais ils souhaitent surtout favoriser et accélérer la vaccination des mineurs, ouverte pour eux dès l'âge de 12 ans. Le but : atteindre l'immunité collective. Car, notent les parlementaires, "du fait de l'émergence de nouveaux variants", la part de la population devant être vaccinée pour atteindre cet objectif "est passée d'environ 60% à 70%".
Il apparaît difficile d'atteindre le taux cible grâce à la seule vaccination de la population adulte. Extrait du rapport de l'Opecst
L'Office propose donc de "mettre en place des campagnes de vaccination contre la Covid-19 dans le cadre scolaire à partir de l’automne 2021". Une manière de permettre à "toutes les catégories sociales" d'en bénéficier. Des "campagnes d'information adaptées à la population mineure" devront également être instaurées.
Interrogé par LCP, Gérard Leseul le reconnaît toutefois : "On sent bien qu'il y a un sujet d'acceptablité", explique l'élu qui réclame de la "pédagogie" et "une communication forte de la part du gouvernement", "sans culpabiliser", afin de "rassurer les parents". Le député va même plus loin que la proposition formulée dans le rapport de l'Opecst : "Très rapidement, la question des enfants de moins de douze ans va se poser."
"Les adolescents sont moins susceptibles de faire des formes graves de la Covid-19 et le bénéfice direct de la vaccination est donc plus faible pour eux que pour les adultes", reconnaissent par ailleurs les parlementaires dans leur rapport : ils prônent donc un "suivi strict de la pharmacovigilance" afin que "tout effet secondaire" soit "étudié avec rigueur". L'Opecst propose également de systématiser les dépistages sérologiques lorsque les adolescents réalisent leur première dose, afin de leur éviter une seconde dose s'ils ont déjà été atteints par la Covid-19 dans le passé.
Au-delà de la question de la vaccination, les parlementaires misent sur la relance de l'utilisation des autotests. Cette stratégie devrait, selon eux, être mise en oeuvre rapidement afin que "les industriels puissent honorer les commandes" et que son déploiement ait lieu à la rentrée prochaine, aussi bien à l'école, à l'université, qu'en entreprise.
Selon l'Opecst, le recours à ces autotests permettrait d'éviter les "clusters" dans les entreprises où les salariés sont peu vaccinés. Il permettrait aussi de réduire la diffusion du virus dans les écoles, alors que le recours à la vaccination promet d'être moins important chez les adolescents puisque pour eux, "le bénéfice individuel attendu" de la vaccination est "plus faible".
"Dans le milieu scolaire, dans le milieu professionnel, dans tous les endroits où l'on se croise, il faut développer les autotests", argumente Gérard Leseul. Selon lui, le dispositif permettra, dans un premier temps, de détecter les personnes malades. Il permettra aussi de coupler, dans certains centres, écoles ou collèges les résultats négatifs à des propositions de vaccination.
Les parlementaires de l'Opecst affirment également qu'il sera nécessaire de surveiller de près l'émergence de nouveaux variants en "maintenant une politique ambitieuse de séquençage sur des échantillons sélectionnés aléatoirement".
Le rapport se penche également sur la question des effets durables du coronavirus : "Le Covid long est une réalité", écrivent les parlementaires, qui ajoutent que "ses symptômes, multiples et variables, ne résultent pas de l'imagination des patients". L'Opecst propose donc d'assouplir les critères de reconnaissance du Covid long comme maladie professionnelle, mais aussi d'inscrire cette maladie dans la liste des affectations longue durée exonérantes. Les parlementaires évoquent aussi la nécessité d'"accélerer et financer les recherches sur les causes du Covid long".
L'Opecst juge par ailleurs nécessaire "d'améliorer l'organisation de notre système de recherche médicale". Pour cela, plusieurs pistes sont avancées : "Encourager et financer la recherche fondamentale", "développer la recherche d'antiviraux" ou encore "faire évoluer le système d’évaluation des chercheurs pour réduire l’importance des indicateurs quantitatifs".
Au niveau international, les parlementaires proposent de mettre en oeuvre une "politique ambitieuse" de don de doses à destination des pays qui n'ont pas accès au vaccin.
La circulation du virus sur le sol des pays les moins développés fait peser le risque de voir apparaître de nouvelles mutations contre lesquelles les vaccins existants seraient inefficaces. Extrait du rapport de l'Opecst
Ils actent, en outre, des "désaccords sur l'utilité et la légitimé de 'lever les brevets' pour parvenir à un accès équitable de tous les pays aux vaccins". L'Office note que s'il est "possible légalement de contraindre à la levée des brevets, il n'existe aucun moyen d'astreindre les laboratoires de procéder à un transfert de technologie".
C'est pour cette raison que le rapport évoque la possibilité de recourir à des "licences volontaires" : avec cette méthode, les laboratoires vendent à d'autres sociétés le droit de fabriquer leur vaccin. Néanmoins ce processus "peut s'avérer à la fois long et complexe". L'Opecst propose également de favoriser l'usage des "licences obligatoires", un mécanisme prévu par l'OMC et qui permet de forcer la main aux laboratoires récalcitrants. Il s'agit pour un gouvernement, en cas "d'urgence nationale", d'habiliter une entreprise à commercialiser un médicament breveté. "La portée et la durée de cette licence sont strictement limitées et le titulaire du brevet doit recevoir une 'rémunération adéquate' à titre de compensation", précise le rapport.
Ces recommandations de l'Opecst s'ajoutent aux interrogations de l'exécutif, qui souhaite accélérer la vaccination en France, quitte à la rendre obligatoire pour certaines catégories de la population.
Le 1er juillet, le Premier ministre Jean Castex a adressé une lettre aux présidents des groupes parlementaires dans laquelle il évoque une "véritable course contre la montre qui s'engage pour augmenter la couverture vaccinale de la population de notre pays". Le chef du gouvernement veut "convaincre chaque Français, y compris les plus jeunes d'entre-eux, de la nécessité de se vacciner". Dans sa missive, Jean Castex évoque surtout la possibilité de rendre obligatoire la vaccination chez les "populations soignantes".
Il nous reviendra en effet de prendre nos responsabilités. Lettre de Jean Castex
Le Premier ministre a aussi demandé aux présidents des groupes parlementaires s'ils estimaient judicieux "d'étendre plus largement" cette obligation. De son côté, le Haut commissaire au Plan, François Bayrou, interrogé sur RTL dimanche 4 juillet, a déclaré avoir "toujours pensé que ça finirait par la décision collective de rendre la vaccination obligatoire" pour tous les Français. Une hypothèse cependant écartée deux jours plus tôt par le ministre de la Santé, Olivier Véran.