Démarchage téléphonique : les députés valident une réduction drastique des appels non consentis

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Démarchage téléphonique Pexels 27/01/2025
Démarchage téléphonique : les députés valident une réduction drastique des appels non consentis (© Pexels / Yan Krukau - image d'illustration)
par Maxence Kagni, le Jeudi 6 mars 2025 à 15:53, mis à jour le Jeudi 6 mars 2025 à 16:40

L'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité, ce jeudi 6 mars, la proposition de loi "pour un démarchage téléphonique consenti", qui vise à interdire la plupart des appels commerciaux non sollicités. Les députés ont toutefois prévu une exception pour les entreprises vendant à domicile des denrées alimentaires. La version votée à l'Assemblée n'étant pas identique à celle du Sénat, le texte va retourner devant les sénateurs.

L'Assemblée nationale unanime pour protéger les Français des appels intempestifs, voire abusifs. Les députés ont adopté, en première lecture, ce jeudi 6 mars, la proposition de loi "pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus" (176 pour).

Le texte, étudié dans le cadre de la journée d'iniatiative parlementaire du groupe Les Démocrates était porté par Pascal Lecamp. Il vise à interdire le démarchage téléphonique non sollicité. "Plus de 90% des Français sont exaspérés par cette pratique, à l'heure où nous recevons en moyenne six appels non désirés par semaine", a expliqué la ministre déléguée chargée du Commerce, Véronique Louwagie, qui a soutenu la proposition de loi.

Dans son article 1er, le texte "interdit de démarcher téléphoniquement", directement ou indirectement, "un consommateur qui n’a pas exprimé préalablement son consentement à faire l’objet de prospections commerciales" par téléphone. "Concrètement, nous ne pourrons plus être appelés par des entreprises qui nous sont parfaitement inconnues", a expliqué Véronique Louwagie

Sans consentement préalable, pas de démarchage. Véronique Louwagie, ministre chargée du Commerce

Dans la version votée à l'Assemblée, le dispositif doit entrer en vigueur le 1er janvier 2026. Les contrevenants seront passibles d'une amende administrative pouvant aller jusqu'à 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale. 

Controverse sur les exceptions

En l'état, la proposition de loi prévoit plusieurs exceptions. Ainsi, l'interdiction ne s'appliquerait pas "lorsque la sollicitation intervient dans le cadre de l’exécution d’un contrat en cours et a un rapport direct avec l’objet de ce contrat". Autre exception : les entreprises vendant à domicile des "denrées alimentaires ou de produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie" ne seront pas concernées par ce nouveau dispositif.

Cette dernière disposition a été ajoutée par les députés pour protéger l'activité d'entreprises comme Thiriet ou Argel. Pour justifier ce choix, Stéphane Rambaud (Rassemblement national) a loué l'activité d'Argel, une "entreprise de proximité" qui "depuis 60 ans livre des produits alimentaires et de première nécessité à 270 000 clients dont une majorité de seniors qui vivent en zone rurale". Or, précise l'élu du Var, 95 % de l'activité de l'entreprise, qui emploie 800 personnes en France, se fait via la prospection téléphonique.

Mélanie Thomin (Socialistes) a, quant à elle, expliqué que les entreprises comme Thiriet ou Argel sont plébiscitées dans des zones où les personnes "d'une certaine génération", peu mobiles, ont une "mauvaise maitrise de l'outil numérique" et ne disposent que d'un téléphone fixe. 

L'exception n'a cependant pas convaincu tous les députés, à l'instar de Delphine Batho (Ecologiste et Social) qui a dénoncé l'instauration d'un "cheval de Troie" qui pourrait profiter à des géants comme Amazon, qui "vend des denrées alimentaires et des croquettes pour chat". Pour sa part, Laurent Croizier (Les Démocrates) a jugé que "beaucoup d'entreprises" risquaient de "s'engouffrer dans cette brèche".

Une initiative sénatoriale

Aujourd'hui, le démarchage téléphonique est interdit pour le secteur de la rénovation énergétique et pour les offres liées au compte personnel de formation (CPF). La proposition, si elle est définitivement adoptée, ajoutera à cette liste le secteur de l'adaptation des logements à la vieillesse et au handicap. Le texte prévoit aussi de ne plus inscrire automatiquement dans les annuaires les numéros de téléphone fixe et alourdit les sanctions en cas d'abus de faiblesse réalisé par téléphone.

La proposition de loi, bien que critiquée par certains pour son insuffisance, a été largement soutenue par les députés. "Il n'est jamais trop tard pour bien faire", a estimé Christophe Naegelen (LIOT), auteur d'une loi sur le même sujet, adoptée en 2020. Saluant un texte qui pourra "apporter un peu de mieux", Delphine Batho (Ecologiste et social) a espéré, comme le rapporteur Pascal Lecamp (Les Démocrates), que le Sénat se saisira "rapidement" du texte voté par les députés. 

D'initiative sénatoriale, la proposition de loi, consensuelle, a déjà été adoptée en première lecture, en novembre dernier, au Palais du Luxembourg. Mais la version votée au Palais-Bourbon n'étant pas identique, le texte doit maintenant retourner devant les sénateurs, afin de poursuivre son parcours législatif.