Les députés de la commission des lois ont examiné, mercredi 3 février, le projet de loi "portant report du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique". S’ils se sont accordés sur le mois de juin pour la tenue de ces élections, ils ont apporté quelques modifications au texte amendé par le Sénat.
C'est l'une des nombreuses conséquences de l'épidémie de Covid-19 : la perturbation des échéances électorales, à l'image du précédent des élections municipales de 2020, qui avait conduit au plus long entre-deux-tours de l'histoire.
Le projet de loi portant report des élections régionales et départementales a été soumis à l'approbation des sénateurs la semaine dernière. S'ils l'ont adopté en première lecture, ils ont élaboré des articles additionnels au texte gouvernemental, fixant notamment une date butoir de second tour au 20 juin 2021, et à mars 2028 le terme du mandat des prochains conseillers régionaux et départementaux. Si le rapporteur pour la commission des lois, Rémy Rebeyrotte (La République en marche), s'est prononcé en faveur de cette dernière disposition, il s'est dit défavorable à inscrire une date butoir dans la loi pour le second tour, arguant qu'il s'agissait d'une initiative relevant du champ de compétence réglementaire.
Chargé fin octobre de plancher sur les modalités d'organisation des élections régionales et départementales, qui auraient dû se tenir en mars, Jean-Louis Debré avait rendu le 13 novembre dernier un rapport préconisant le report de ces deux scrutins à juin 2021. Cette disposition a donc d'ores-et-déjà été votée par le Sénat, et fait l'objet d'un relatif consensus parmi les députés, moyennant "quelques adaptations afin de garantir la bonne tenue de la campagne électorale" et un rapport sur la situation sanitaire réalisé par le Conseil scientifique prévu pour le 1er avril, "qui ne vaut pas clause de revoyure automatique", a tenu à préciser Rémy Rebeyrotte.
Si les députés se sont accordés sur la tenue de ces élections en juin, faisant leur la remarque de Jean-Louis Debré, qui avait pointé lors de son audition le risque de "confiner la démocratie", ils n'ont pour autant pas négligé les contraintes de la situation sanitaire. Bastien Lachaud (La France insoumise), a ainsi fait remarquer qu'au regard de la prorogation de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 1er juin prochain, les candidats ne disposeraient, dans le meilleur des cas, que d'une semaine ou deux de campagne dans des conditions dites normales. Il a aussi redouté la mise en place, de fait, d'une "prime aux sortants".
Une crainte partagée par la députée Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés), qui a évoqué le risque de déséquilibre entre sortants et primo-candidats, "la crise sanitaire ne permettant pas une campagne normale et sereine." "Les présidents de région sortants ont la force de frappe de leurs collectivités, en termes de com', en termes de moyens, en termes de valorisation de l’action régionale", a également fait remarquer le député Sébastien Jumel (Gauche démocrate et Républicaine).
Outre le calendrier, le projet de loi se propose de faciliter le recours aux procurations. Il s'agira ainsi de dématérialiser une partie des démarches et de maintenir le système de double-procuration tant que la crise durera. En revanche, les députés se sont prononcés contre l'anticipation de leur déterritorialisation, prévue à ce stade au 1er janvier 2022. Marietta Karamanli a regretté que la question du vote par correspondance n'ait pas été abordée, alors que le contexte sanitaire pourrait dissuader un certain nombre d'électeurs de se rendre aux urnes.
Sacha Houlié (LaREM), a par ailleurs fait valoir une position dissonante par rapport à celle de son groupe et de la majorité des députés présents. "On peut s'arc-bouter sur la fixation de dates (...) il ne faudra pas venir se plaindre ensuite d'une participation erratique", a déclaré le député de la Vienne quant aux conséquences de la situation sanitaire sur le chiffre de l'abstention.
Sur le contexte sanitaire justement, les députés ont défini l'usage qui devrait être fait du rapport du Conseil scientifique afin d'adapter si nécessaire les conditions du scrutin et non de lui demander de se prononcer sur la tenue, ou pas, des élections.
Les députés ont par ailleurs supprimé l'article 6 proposé par le Sénat, relatif à l’organisation d’une campagne électorale sur les chaînes publiques, France 2 et France 3. Rémy Rebeyrotte a ainsi considéré qu'il n'était "pas réaliste, ni même souhaitable d’imposer aux chaînes de service public de diffuser, voire de contrôler la production de clips de campagne". "Oui à une communication institutionnelle sur ce que sont les conseils généraux régionaux, les assemblées de Corse, de Guyane, de Martinique, oui pour rappeler la date du scrutin et ses modalités, oui pour des campagnes qui visent à inciter les électeurs à venir aux urnes, oui pour des débats", a-t-il cependant ajouté.
"Reste un grand flou", a estimé Matthieu Orphelin (non inscrit), quant à la propension réelle de l'exécutif à ce que les élections régionales et départementales se tiennent effectivement en juin. Un doute auquel le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a cependant déjà tenté de mettre fin en répondant à une question lors de la séance des questions au gouvernement le 26 janvier. Ce jour-là, le locataire de la place Beauvau a affirmé que "la volonté du gouvernement [était] de tenir ces élections au mois de juin.