Après avoir été votés à l'Assemblée nationale le 27 mai dernier, les deux textes sur la fin de vie - relatifs aux soins palliatifs et à l'instauration d'une aide à mourir -, pourraient être examinés dans l'hémicycle du Sénat à partir du 13 ou du 20 octobre. C'est en tout cas ce que veut croire l'artisan du texte, Olivier Falorni (Les Démocrates), pour lequel seule une "crise politique" générant une "situation de blocage absolu" pourrait entraver ce calendrier.
La réforme sur la fin de vie risque-t-elle de faire partie des dommages collatéraux de l'instabilité politique ? Les deux textes, sur les soins palliatifs d'une part et l'instauration d'une aide à mourir d'autre part, devaient être examinés en séance publique au Sénat à partir du 7 octobre, un accord ayant été conclu cet été entre les deux présidents de chambres, Yaël Braun-Pivet (Ensemble pour la République) et Gérard Larcher (Les Républicains). Mais la chute du gouvernement Bayrou étant passée par là, il n'existe désormais plus de certitude quant à la date de leur coup d'envoi.
Dans l'attente de la nomination d'un gouvernement, la fixation de l'ordre du jour du Parlement est en effet en suspens. "Sous réserve de la nomination d’un gouvernement (...), le scénario envisageable pourrait être un examen en commission le 7 ou le 8 octobre et en séance le 13 ou le 20", a cependant fait savoir le président de la commission des affaires sociales, Philippe Mouiller (Les Républicains), à nos confrères de Public Sénat. Un calendrier qui pour l'instant reste au conditionnel.
Contacté par LCP, l'auteur de la proposition de loi visant à instaurer une aide à mourir, Olivier Falorni (Les Démocrates), n'imagine pas que le texte puisse être sacrifié sur l'autel de l'instabilité politique. D'autant que s'il est respecté, le calendrier budgétaire - très encadré par la Constitution - ne devrait pas empêcher la suite du parcours des propositions de loi sur la fin de vie.
Selon l'article 39 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), le projet de loi de finances (PLF) doit être déposé à l’Assemblée nationale au plus tard le 13 octobre, afin de permettre son examen en bonne et due forme par le Parlement et son adoption dans les temps avant son entrée en vigueur dès le 1er janvier de l'année prochaine. La présentation du budget de l'Etat en Conseil des ministres, en amont de son arrivée au Palais-Bourbon, nécessitant en toute hypothèse la nomination d'un gouvernement, Olivier Falorni estime que le respect du calendrier budgétaire devrait par la même occasion permettre le respect, à quelques jours près, du calendrier sur la fin de vie.
Initialement, le vote solennel au Sénat sur les deux textes relatifs à la fin de vie était prévu le 21 octobre, à l'issue d'une semaine d'examen. A ce stade, le débat sur la fin de vie semble encore pouvoir avoir lieu au Palais du Luxembourg avant que les sénateurs n'aient à se consacrer à l'examen du PLF.
"La seule raison justifiable et objective serait qu’on n'ait pas de gouvernement dans les semaines à venir, ce qui serait grave pour le texte, mais au-delà, pour la France, et ça je ne peux pas l’imaginer", déclare Olivier Falorni. "La navette parlementaire est lancée, toutes les auditions préparatoires ont été menées au Sénat, il n’y a aucune raison que le texte soit entravé", estime aussi celui qui a fait de l'ouverture d'un droit à l'aide à mourir son combat depuis de nombreuses années.
Olivier Falorni indique par ailleurs que le respect des échéances sur les propositions de loi liées à la fin de vie ont été posées sur la table lors des consultations des différentes forces politiques à Matignon. "Patrick Kanner a été très clair là-dessus, il exige le respect du calendrier sur la fin de vie. Il en est de même pour François Patriat", fait savoir le député au regard des points abordés avec Sébastien Lecornu par ses collègues parlementaires du Sénat, le premier étant le chef de file des élus socialistes et le second à la tête des troupes présidentielles.
C’est un texte qui est balloté par tous les vents, mais je m’efforce d’être un capitaine de haute mer. Olivier Falorni (Les Démocrates)
Quant à la volonté de l'actuel Premier ministre de voir aboutir l'instauration d'un droit à l'aide à mourir, Olivier Falorni ne voit "pas de raison que le Premier ministre actuel soit moins respectueux de la démocratie que François Bayrou, d’autant qu’il reconnaît lui-même que l’on est dans un système beaucoup plus parlementarisé". Le député martèle donc que seule une situation de "blocage absolu" pourrait entraver la suite du processus législatif sur la fin de vie et que toute autre raison constituerait selon ses mots un "scandale".
Olivier Falorni peut toutefois difficilement s'empêcher de dresser le constat d'une réforme qui se heurte à tous les obstacles. "Le texte sur l'aide à mourir a été confronté dans un premier temps à une mauvaise volonté criante, et quand la volonté est finalement apparue, c’est l’instabilité politique qui a pris le relais". Et de rappeler les précédents épisodes qui avaient brutalement interrompu le parcours législatif du texte, dont la dissolution de juin 2024, et la chute de deux gouvernements, celui de Michel Barnier puis de François Bayrou. "C’est un texte qui est balloté par tous les vents", concède aussi l'élu de Charente-Maritime. "Mais je m’efforce d’être un capitaine de haute mer. En tant que Rochelais, cela relève heureusement du tropisme".
Si le temps presse, c'est que la réforme de la fin de vie, en particulier son volet le plus sensible sur l'aide à mourir, n'aura vraisemblablement pas fini son parcours législatif avec la lecture à venir au Sénat. Au moins une deuxième lecture devrait être nécessaire dans chacune des deux Chambres. Le rapporteur table sur un retour du texte à l'Assemblée nationale en début d'année prochaine, pour une adoption définitive par le Parlement "avant la fin de l’été 2026". L'objectif étant que la réforme soit entérinée avant la fin du quinquennat d'Emmanuel Macron.